Geluck, plus belge, tu meurs


Philippe Geluck publie le tome 16 des aventures du Chat. Et cultive sa veine trash.

Propos recueillis par Romain Brethes

Geluck, plus belge, tu meurs

Philippe Geluck. Félidé philosophe et insupportablement fat. © Ginies Sipa – Casterman

En France, Philippe Geluck s’est révélé au grand public comme amuseur bon enfant chez Michel Drucker ou Laurent Ruquier. En Belgique, il est une véritable icône, qui incarne un certain humour belge, plus caustique, irrévérencieux et mauvais esprit. Mais, dans ces deux pays, il est avant tout l’auteur du Chat, une série légendaire qui fêtera bientôt ses 30 ans. Le volume 16 de ses aventures permet de retrouver ce félidé philosophe et insupportablement fat au sommet de sa forme, comme le montre une carte postale où il s’affiche avec ce mot aimable : « Dis-toi qu’il vaut mieux être gravement malade que légèrement mort. »

Le Point : Le Chat est apparu dans les colonnes du Soir, le grand quotidien belge, en 1983. Peut-on parler de ce personnage comme d’un emblème de la Belgique, à la manière de Tintin ?

Philippe Geluck : Le Chat est effectivement né d’une commande du Soir, mais la forme que j’ai adoptée, celle du strip, était plutôt américaine, comme Peanuts. Il n’y avait pas véritablement de tradition belge en bande dessinée pour le strip. En outre, j’ai décidé de mettre en scène un personnage étranger à l’actualité belge, avec ses aphorismes et son humour cuistre, en privilégiant un aspect intemporel. Je dois avouer qu’au début le succès a été très relatif, et les lecteurs ont été décontenancés, sans doute parce que l’esprit du Chat était assez inclassable. D’un autre côté, j’ai sans aucun doute été influencé par cette forme de comique et d’absurde que l’on trouve chez René Magritte ou Louis Scutenaire. En Belgique, et en particulier à Bruxelles, il suffit de sortir dans les rues pour respirer un air typiquement surréaliste.

Vous avez été au coeur de plusieurs polémiques sur les divisions entre Flamands et Wallons. Mais quelle est votre position ?

En fait, il y a eu deux polémiques distinctes. Tout d’abord, dans une émission de la RTBF, j’ai lancé, tout en précisant bien qu’il s’agissait d’une plaisanterie, que les Flamands, qui « possèdent » actuellement tout le littoral belge, devraient désormais, en cas de scission, le partager avec les Wallons. Et puis dans un one-man-show, que je joue actuellement à Bruxelles (Je vais le dire à ma mère), il y a une scène où je cherche à expliquer à Michel Drucker la situation en Belgique, et pour ce faire je la compare successivement au conflit israélo-palestinien, aux déchirures entre Tutsis et Hutus et pour finir à l’Afrique du Sud de l’Apartheid. C’est bien évidemment excessif, mais les réactions que ces deux traits d’humour ont suscitées, notamment celle d’un politicien flamand pseudo-modéré, montrent bien que le véritable danger en Belgique vient du nationalisme et des extrémistes de droite.

Les Belges semblent vivre cette crise avec beaucoup de distance, au grand étonnement des Français.

Oui, indéniablement. Certes, je crois qu’il vaut mieux rire de cette situation, comme je le fais en m’inspirant de Plume, d’Henri Michaux, que d’en pleurer. Mais le peuple belge a cette capacité fascinante à demeurer d’humeur égale face aux crises que le pays traverse depuis presque un demi-siècle. Près de 20 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, le pays est politiquement ingouvernable en raison de son éclatement en de multiples parlements et régions, la crise économique a très durement frappé la Belgique, et pourtant personne ne descend dans la rue, comme en France.

Vos récentes créations montrent un penchant pour l’humour noir, tel ce dessin dans votre dernier Chat : dans les projets heureusement refusés par les éditeurs de BD, Les aventures de Helmut, le clown nazi.

Les Français me connaissent surtout pour mes participations aux émissions de Michel Drucker ou de Laurent Ruquier, où je lissais beaucoup mes interventions. Pourtant, j’ai une véritable prédilection pour un humour plus trash et plus provocateur, qui explique notamment mes collaborations avec Siné Hebdo. C’est effectivement quelque chose que je perçois, qui contamine Le Chat en effet, mais cette transformation n’est pas encore achevée. Je ne sais pas jusqu’où elle me conduira.

REGARDEZ Un extrait de la BD Le Chat en vidéo

La baronne Tonge déclare qu’Israël est la principale cause du terrorisme planétaire


Un article , d’un membre du groupe  »Noor El Islam Frère »
Vraiment à faire tourner:

Le Pair britannique (du parti démocrate) Jenny Tonge affirme qu’Israël est la cause du terrorisme au niveau mondial et que des problèmes tels ceux du Cachemire et de la Palestine sont en train de retourner les musulmans du monde entier (contre l’Occident). S’exprimant devant la commission de la défense stratégique et de la sécurité, dimanche passé, à la Chambre des Lords, à Londres, Mme Tonge a dit notamment : « Les traitements brutaux d’Israël à l’encontre des Palestiniens sont un exemple de la manière dont l’Ouest traite les musulmans, et ce mauvais traitement est la principale source du terrorisme à l’échelle mondiale ».

« Même l’envoyé spécial du Quartette au Moyen-Orient, Tony Blair, a reconnu cela publiquement », a-t-elle fait observer.

La baronne Tonge a dit devant la Chambre des Lords que le comportement d’Israël à l’encontre des Palestiniens continue à bénéficier d’une totale impunité, sans doute à cause de la « culpabilité de l’Holocauste » et/ou du « pouvoir du lobby pro-israélien » au Royaume-Uni et aux Etats-Unis.

Commentant deux conflits non résolus dans le monde musulman, Mme Tonge a dit qu’il est regrettable, pour nous tous, que des problèmes tels ceux du Cachemire et de la Palestine continuent à nous aliéner les musulmans dans le monde entier.

Elle a aussi attaqué le gouvernement britannique de coalition sur sa politique hostile à l’Iran et sur ses relations extrêmement étroites avec Israël.

Elle a notamment déclaré que « des cyniques pourraient penser que la Grande-Bretagne est en état d’alerte, prête à aider Israël à attaquer militairement l’Iran ».

« Pourquoi laissons-nous perdurer cette situation ? Est-ce à cause de la culpabilité à propos de l’Holocauste ? Nous devons nous sentir coupables ; certes, nous le devrions. Est-ce la puissance du lobby pro-israélien, dans notre pays et aux Etats-Unis ?

« Ou bien est-ce le besoin, peut-être, d’avoir un porte-avions appelé Israël au Moyen-Orient, à partir duquel nous pouvons lancer des attaques contre des pays comme l’Iran ? Un cynique pourrait penser que c’est la raison pour laquelle nous pourrions avantageusement nous débarrasser du HMS Ark Royal et des avions de combat Harrier (dans le cadre des restrictions budgétaires britanniques qui frappent y compris la défense), dès lors que nous disposons déjà d’un « Ark Royal » situé dans une position stratégique, armé jusqu’aux dents et prêt à livrer combat, à conditions que nous ne critiquions pas Israël », a-t-elle conclu.

Source : Tehran Times
Traduction : Marcel Charbonnier
http://www.alterinfo.net/La-baronne-Tonge-declare-qu-Israel-est-la-principale-cause-du-terrorisme-planetaire_a51880.html

Mort d’Abraham Serfaty, opposant historique d’Hassan II


Par Pierre Haski | Rue89 | 18/11/2010 |

Abraham Serfaty à son retour d'exil français à Rabat, au Maroc, le 2 octobre 2010 (Jean Blondin/Reuters)

Abraham Serfaty est mort : le Maroc a perdu un pan de son histoire. Ancien militant marxiste-léniniste et opposant farouche au roi Hassan II, Marocain et juif antisioniste, Abraham Serfaty, dix-sept ans de prison, un temps dans la clandestinité et quelques années d’exil au compteur, est décédé jeudi à Marrakech, à l’âge de 84 ans.

Cet homme était un roc, qui en imposait à ses interlocuteurs, physiquement et mentalement. Une montagne de détermination et de conviction, que ni la prison, ni la torture, ni le temps n’ont réussi à ébranler. Il était l’un des survivants des « années de plomb marocaines », témoin engagé d’une époque noire dont les séquelles se font encore sentir au royaume chérifien.

Ingénieur de formation, ce natif de Casablanca est devenu militant communiste à l’âge de 18 ans, au Maroc comme au sein du PCF lors de ses années d’étude en France. Il a combattu activement en faveur de l’indépendance du Maroc, ce qui lui a valu la répression des autorités coloniales françaises.

Les années Ilal al-Amam (« En avant »)

Au moment de l’indépendance du Maroc, il s’engage dans la création des nouvelles institutions du royaume, alors dirigé par Mohamed V. Mais dans les années 70, après quelques années de règne de son successeur Hassan II, il rompt avec les communistes jugés « révisionnistes et trop accommodants, et s’engage à l’extrême gauche avec la fondation du groupe marxiste-léniniste Ilal-al-Amam (“En avant”).

Il se heurte de front au pouvoir implacable d’Hassan II, est arrêté et torturé une première fois en 1972, avant de plonger dans la clandestinité pour échapper à la chasse aux “gauchistes”. Il est de nouveau arrêté en 1974, pour ne sortir libre de prison que dix-sept années plus tard. Hassan II ne lui pardonna jamais son soutien aux indépendantistes du Front Polisario du Sahara occidental, annexé en 1975 par le Maroc.

Dans la revue marocaine Tel Quel, Mustapha Brahma, qui lui a succédé à la tête d’Ilal al-Amam avant de le retrouver en prison, témoigne :

“Je l’ai rencontré pour la première fois en 1985, après mon arrestation. Il était heureux de voir des jeunes assurer la continuité de son combat. C’était un colosse impressionnant par son physique, il avait de surcroît une aura pour nous, car il a préféré lutter pour la justice sociale, alors qu’il avait une grande carrière toute tracée dans l’administration.”

Il ajoute :

“En prison, Abraham Serfaty développait des conceptions nouvelles, comme lutter sur le plan légal pour arracher des libertés publiques. Il avait entre autres l’idée d’un journal pour faire passer le maximum d’idées possibles, sans mettre en équation la monarchie, afin d’éviter la censure.

Précurseur, il avait été le premier à discuter avec les détenus de la Chabiba Islamiya, qui le respectaient. Il ne voulait pas leur laisser l’apanage de la religion, contrer l’islam intégriste en insistant sur l’islam populaire et le soufisme. Il voulait que nous, marxistes, puissions commencer à défendre cet islam.”

A sa libération, il fut déchu de sa nationalité marocaine, et expulsé vers la France où il retrouva la femme qu’il avait épousée alors qu’il était en prison, Christine Daure-Serfaty, une ancienne coopérante au Maroc, militante inlassable de la cause des prisonniers politiques marocains.

Mohamed VI permet le retour

Il lui faudra attendre l’arrivée de Mohamed VI au pouvoir, la décrispation du pouvoir chérifien, pour qu’il soit réinstallé dans sa nationalité et autorisé à revenir au Maroc.

Ce retour montrera toutefois un homme déconnecté des réalités marocaines et d’une époque qui ne correspondait plus à sa vision. Un autre de ses anciens co-détenus, Abdelhamid Amine, raconte leurs retrouvailles dans Tel Quel :

“Il a pris la parole, évoquant Mohammed VI et la nouvelle ère qui s’ouvrait, selon lui. Il nous a affirmé croire que la monarchie et les forces du progrès pouvaient collaborer pour bâtir une démocratie au Maroc.

Il avait une analyse trop optimiste du nouveau règne, comptant beaucoup sur Mohammed VI. Il rêvait un peu à une expérience similaire à celle du roi Juan Carlos dans l’Espagne de l’après-Franco.

Beaucoup de gens, dont moi-même, sont restés interloqués devant ce discours. […] Le jour de son retour d’exil a vraiment marqué une rupture entre les militants de l’extrême gauche et lui.”

Il se raconte ici, dans une interview à la télévision marocaine après son retour, dans une chaise roulante. (Voir la vidéo)

Un juif pour la Palestine

516PY7PBJRL._SX200_.jpgAbraham Serfaty a beaucoup écrit, et l’un des sujets les plus sensibles est celui de la Palestine. Lui le juif marocain, issu d’une communauté qui a massivement émigré en Israël, a pris radicalement partie pour la cause palestinienne (il en parle dans la vidéo ci-dessus). L’un de ses camarades s’exclame dans Tel Quel :

“Un juif antisioniste, c’était quelque chose pour nous.”

Serfaty publie même un livre, “Ecrits de prison sur la Palestine”, dans lequel il écrit :

“ Le sionisme est avant tout une idéologie raciste. Elle est l’envers juif de l’hitlérisme.”

Sa disparition accompagne l’extinction d’une génération, qui est passée de la lutte anticoloniale au combat en faveur d’un “autre” Maroc, et qui s’est fracassée sur la répression implacable de Hassan II. Le Maroc a fait, depuis, du chemin, même si la ligne n’est pas toujours rectiligne.

Photo : Abraham Serfaty à son retour d’exil français à Rabat, au Maroc, le 2 octobre 2010 (Jean Blondin/Reuters)

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