Israël recrute des « amis » en Europe


Le document n’a pas filtré par Wikileaks. C’est le Guardian de Londres qui se l’est procuré directement (28 novembre) : un câble transmis quelques jours avant par le ministère israélien des affaires étrangères à ses ambassades dans dix pays européens. Il contient l’ordre du ministre Avigdor Lieberman de trouver d’ici fin janvier environ 1000 personnes qui agiront en « amis d’Israël ». Elles devront être « recrutées parmi des journalistes, universitaires, étudiants et militants soit juifs soit chrétiens ». Elles seront informées par des fonctionnaires israéliens pour intervenir en faveur d’Israël par des articles, lettres et interventions dans des assemblées publiques. Elles devront non seulement recevoir des messages mais en faire une active promotion.

Par Manlio Dinucci manliodinucci@tin.it
 

Les principaux centres de cette campagne seront cinq capitales européennes : Londres, Paris, Berlin, Madrid et Rome. Là, « les ambassades israéliennes recevront des fonds pour recruter aussi des professionnels : sociétés spécialisées en relations publiques et lobbyistes ». Elles auront comme tâche de renforcer l’action des « amis d’Israël » en diffusant des messages politiques sur des arguments comme la position israélienne à l’égard des Palestiniens et la violation des droits de l’homme en Iran.

Le ministère des affaires étrangères suggère en outre aux ambassades en Europe d’organiser mensuellement des événements publics de haut niveau en faveur de la politique israélienne et d’inviter des personnages influents à visiter Israël. Lieberman lui-même rencontrera le mois prochain ses ambassadeurs dans les pays européens pour donner une impulsion à cette nouvelle « offensive dans les relations publiques ».

Interviewé par le Guardian à propos de ce document, un fonctionnaire israélien s’est refusé à commenter la découverte. Il a cependant déclaré : « Evidemment nous cherchons toujours de nouvelles façons d’améliorer nos communications, il n’y a rien d’étrange à cela ». Il a ainsi précisé qu’« il existe une préoccupation particulière sur la façon dont Israël est vu à l’étranger, en particulier dans certains pays d’Europe occidentale ».

Une nouvelle offensive de propagande du gouvernement israélien est donc en train de se préparer, focalisée dans les principales capitales européennes, parmi lesquelles Rome. Pourquoi en ce moment ? On se souviendra que, bien que la propagande soit une denrée quotidienne (pas seulement pour Israël), la dernière grande campagne israélienne fut lancée en décembre 2008 pour présenter l’opération « Plomb durci » contre Gaza comme une action défensive. Il n’est pas difficile de comprendre quel est l’objectif de cette nouvelle campagne : convaincre l’opinion publique italienne et européenne que non seulement Israël mais aussi les pays européens sont menacés par l’Iran. En préparant ainsi l’opinion à accepter comme inévitable une nouvelle guerre, encore plus catastrophique, au Moyen-Orient.

Il faudra nous en souvenir quand les « amis d’Israël », recrutés par Lieberman, commenceront leur offensive sur les journaux et dans les talk show.

Sur le même sujet, lire le communiqué d’Al-Manar : « « Israël » prépare une campagne de relations publiques en Europe« , ISM-France, 29.11.2010.

Emission « en voyage » de Guy Lemaire consacrée à Israël


http://www.rtbf.be/tv/emission/detail_en-voyage?id=593 (la bande annonce)
Lettre de Marianne  Blume qui dit:

Voici la lettre que j’ai écrite après avoir visionné le reportage.
Tout n’y est pas mais je me suis attachée à suivre les étapes de son
émission.La carte est ignoble. Si le texte vous
semble virulent, sachez que je l’ai autocensuré.

Cher Monsieur,

Que vous aimiez Israël, personne ne vous en fera grief. Que vous
adoptiez une carte, reprise deux fois, où le Golan, la Cisjordanie et
la Bande de Gaza sont partie intégrante d’Israël me semble beaucoup
plus suspect. Vous évitez Bethléem avec son checkpoint mais Bethléem
est, selon votre carte, en Israël. Bizarre pour le moins. N’est-ce pas
une des villes saintes pour le christianisme? Vous ne parlez pas de
territoires occupés, encore un fois bizarre: les médias les plus
populaires le disent.
Mais ce n’est pas tout. Jérusalem. Quelle belle ville, n’est-ce pas?
Vous commencez au mur des lamentations et je ne vous en tiendrai pas
rigueur puisque c’est une image d’Epinal. Par contre, raconter
tranquillement qu’il s’agit du mur du palais d’Hérode et reprendre
sans vergogne la maquette de ce temple me semble parfaitement
a-historique. Mais peut-être ne savez-vous pas que les archéologues
n’ont rien trouvé qui renforce cette affirmation. Il suffisait sans
doute de dire que c’était ce que pensaient les juifs croyants et cela
aurait donné un brin d’objectivité.

Vous allez ensuite à Yad Vashem. Et vous avez raison. personne ne peut
oublier. Cela vous aurait-il écorcher les lèvres de dire qu’en face se
trouve Deir yassin, un Oradour sur Glane palestinien perpétré par les
milices juives. Mais là, je vais sans doute un peu loin: vous ne
connaissez pas vraiment le terrain ni son histoire. C’est une excuse
que je vous donne et j’espère avoir raison.

Puis, dans votre reportage, c’est Massada et la mer morte. Une autre
image d’Epinal. Un must donc. Sauf que vous répétez gentiment ce qu’on
vous a dit. Je suis philologue classique et j’ai lu Flavius Josèphe.
Lisez et vous y apprendrez que les zélotes réfugiés là étaient des
brigands qui avaient tué d’autres juifs, dont ils étaient mal vus. On
n’aborde pas des problèmes historiques par des on-dits, surtout quand
ils viennent de ceux qui veulent justifier leur mythologie. Mais bon,
là encore, vous ne pouvez pas tout savoir. Et de deux excuses. je vous
conseille pourtant de voir le film d’un Israélien, Avi Moghrabi, pour
que vous compreniez la signification actuelle de Massada. j’espère que
vous le ferez.

Pauvre Mer Morte qui disparaît progressivement vu, selon vos dires,
« l’irrigation excessive ». Par qui? Vous l’êtes-vous demandé? Peut-être
que vous auriez appris que c’est du fait des israéliens et notamment
des colons. J’admets sans mal que cela aurait gâché la belle image que
vous vous attachez à donner d’Israël. Mais vous êtes journaliste et
donc je croyais (un peu naïvement?) que vous vous informiez sur les
réalités actuelles à défaut de connaître l’histoire. Là, il n’y a pas
d’excuse.

On passe ensuite à la fascinante Tel Aviv. Fascinante en effet,
surtout par sa sécularité, contrairement à Jérusalem. Elle a été crée,
toujours selon votre commentaire par des familles juives parties de
Jaffa. Oui, elle est fondée sur des terres de villages palestiniens
dont Sheikh Muwannis (université de Tel-Aviv), Jammusin, salame,
Summeil… Aucune mention de votre part. Un ville née du sable, grâce
à quelques familles juives, c’est plus beau, c’est sûr. Et les plages,
comme elles sont belles, n’est-ce pas? Et on n’y est si tolérant qu’on
peut y venir avec son arme. A quand la même tolérance à Knokke ou
Ostende?

Vous terminez sur Jaffa, que j’aime. Une ville ancienne. Une ville et
un port jadis important. Une ville israélienne? L’architecture aurait
dû vous mettre la puce à l’oreille si vous ne saviez pas que c’était
une ville palestinienne, vidée de ses habitants. En fait, il en reste
mais ils n’apparaissent pas dans votre beau reportage. C’est vrai que
l’Etat israélien fait tout pour les évacuer, les mettre dans un ghetto
appauvri. Vous ne savez pas que ces habitants palestiniens originaires
de la ville n’ont pas le droit de récupérer leurs maisons et pas le
droit de rénover ou agrandir celles qu’ils habitent encore? Les noms
des rues sont pittoresques, les noms des signes du zodiaque. Et
pourquoi croyez-vous? Les rues portaient des noms arabes mais faire
disparaître cette réalité fait partie de l’effort israélien d’occulter
la réalité palestinienne.

Cher Monsieur, ou vous êtes un ignorant ou vous êtes un propagandiste.
Dans l’un et l’autre cas, cela fait de vous un mauvais journaliste.
Vous objecterez sans aucun doute que vous faisiez un reportage
touristique et que vous ne pouviez pas tout dire. On pourrait
l’admettre si vous n’aviez de manière honteuse repris un carte
d’Israël qui n’est que propagande.

Bien à vous,

Marianne Blume