Homs sous le siège’


‘Homs sous le siège’ est une nouvelle série (sous-titrée en Français) sur la situation humanitaire dans les quartiers assiégés de Vieille Homs.
L’activiste Bebars Telawe se promène dans les rues de Homs, rencontre ses habitants qui nous parlent de leurs vies quotidiennes, leurs souffrances et leur détermination de lever le siège de Homs !
Homs sous le siège || Episode 1 || Politique d’immigration
Homs sous le siège ||
Episode 2 || Un tour dans le quartier Al Qusur
Episode 3 || Rencontre avec des enfants Homsis.
Episode 4 || Tout faire pour lever le siège

Le cercle de l’irresponsabilité aux Nations-Unies


dimanche 21 avril 2013 – 06h:54

John Lyons
The Australian


L’UNICEF à Jérusalem est-elle complice dans le blanchiment de la torture israélienne des enfants palestiniens ?

De : Omar Barghouti : omar.barghouti@gmail.com

Sujet : L’UNICEF a-t-il censuré son propre rapport sur la torture israélienne des enfants palestiniens ?

Date : le 18 avril 2013

L’UNICEF à Jérusalem est-elle complice dans le blanchiment de la torture israélienne des enfants palestiniens ?

La torture est considérée comme un crime contre l’humanité en droit international.

L’UNICEF a-t-elle volontairement censuré le terme « torture » dans son rapport pour plaire à Israël (et à son patron américain) ? La directrice de l’UNICEF a-t-elle été promue suite à cette complicité ?

Si la preuve ci-dessous est exacte, l’UNICEF et son ancien chef Jérusalem doivent en être tenus responsables.

Omar

Dernière publication d’Omar Barghouti sur Info-Palestine :

- Le mouvement BDS expliqué – Pourquoi j’ai boycotté Israël

Le cercle de l’irresponsabilité aux Nations-Unies

John Lyons – The Australian

Il serait difficile d’imaginer conférence de presse plus bizarre.

Quand l’UNICEF, le Fonds des Nations-Unies pour l’enfance, a récemment averti les journalistes à Jérusalem qu’elle publiait un rapport sur les enfants palestiniens dans le système judiciaire militaire d’Israël, cela a suscité beaucoup d’intérêt.

La question a eu une portée internationale grandissante, particulièrement en Grande-Bretagne où elle a fait l’objet d’un débat parlementaire.

Le ministre des Affaires étrangères, Bob Carr, et son prédécesseur, Kevin Rudd, l’ont abordée avec Israël. Mais quelque chose d’étrange s’est produit.

Au cours des deux dernières années, plusieurs organisations ont été prises à partie pour avoir mis l’accent sur le traitement des enfants palestiniens par Israël.

« Briser le Silence », qui est une organisation de 850 soldats ou anciens soldats israéliens faisant campagne pour que s’améliore en Israël la situation des droits de l’homme, a été prise à partie pour s’être concentrée sur cette question.

Mais pas l’UNICEF.

Après ce nouveau rapport, le ministre israélien des Affaires étrangères a déclaré : « Israël va en étudier les conclusions et s’efforcera de les mettre en œuvre dans le cadre d’une coopération avec l’UNICEF, dont nous apprécions le travail et que nous respectons. Cette année, Israël a rejoint le conseil d’administration de l’UNICEF et nos relations de travail et notre collaboration avec l’organisation sont appréciées par la communauté internationale  ».

Alors, pourquoi l’UNICEF n’a-t-elle pas été prise à partie ?

Il a été évident lors de la conférence de presse de Jérusalem que quelque chose allait de travers. Dans la salle, il y avait 60 chaises, pour seulement une poignée de journalistes.

« Nous avons été limités pour le nombre de journalistes que nous pouvions inviter  » a avoué un officiel de l’UNICEF.

« Vous ne croiriez pas les pressions dont nous avons fait l’objet pour annuler cette initiative » a dit un autre.

Cinq officiels de l’UNICEF ont pris place derrière l’étiquette de leur nom et un micro, puis les caméras de télévision ont été installées. Cela avait l’air d’une véritable conférence de presse.

Le photographe d’Inquirer avait apporté une caméra vidéo pour filmer pour le compte du site de The Australian. Mais le responsable UNICEF pour Jérusalem a fait une annonce : seules, les cinq premières minutes pourront être filmées et aucun officiel ne pourra être cité. Une conférence de presse où vous ne pouvez pas filmer ? ni citer des officiels ?

Jean Gough a commencé à parler. Pendant les cinq premières minutes, elle a loué Israël pour son dialogue au sujet du système par lequel les enfants palestiniens depuis l’âge de 12 ans sont jugés par les militaires israéliens, alors que les enfants juifs dans les colonies voisines sont jugés par des tribunaux civils. « Je tiens à les en remercier  » a-t-elle dit en parlant des Israéliens.

JPEG - 29.5 ko

Mais une fois les caméras éteintes, une version totalement différente a été donnée – un officiel a dit que les mauvais traitements contre les enfants palestiniens étaient « généralisés, systématiques et institutionnalisés » ; un autre a raconté comment les enfants palestiniens étaient « tapés, giflés et frappés à coups de pied » par les soldats israéliens.

Il a indiqué qu’on disait parfois aux enfants qu’ils seraient tués ou que des membres de leur famille seraient agressés sexuellement s’ils ne faisaient pas des aveux, en général pour jets de pierres. Un autre a dit qu’il existait un « mode systémique de mauvais traitements et de tortures  ».

Ce n’était pas là simplement une façon de gérer les médias, mais une déformation de la vérité. La version lors des cinq premières minutes était fortement favorable à Israël, mais la version qui a suivi a montré un système atroce dans lequel se trouvaient des enfants arrachés à leurs maisons – généralement la nuit – par des soldats israéliens lourdement armés, des enfants à qui on bandait les yeux, on refusait de l’eau et les cabinets, et qui étaient même placés en isolement jusqu’à un mois. Et alors que l’UNICEF faisait le constat qu’Israël était impliqué dans des actions répondant à sa définition de la torture, le rapport a évité d’utiliser le mot dans ses conclusions.

Une enquête d’Inquirer a suggéré que l’UNICEF avait cédé aux pressions d’Israël ou s’était censurée. Plus nous posions de questions, moins l’UNICEF répondait. Gough n’a pas répondu à certaines questions, nous renvoyant au directeur exécutif de l’UNICEF à New York, Antony Lake.

Mais Lake n’a pas répondu à une seule question, alors qu’il est signataire du rapport. Dans un cercle d’irresponsabilité, son bureau nous a renvoyés à Jérusalem, parce que « c’est un rapport sur les enfants de là-bas, pas un rapport mondial ».

Et le bureau de Lake de déclarer : «  La question est donc close pour le siège, et vous aurez vos réponses de la région ».

Mais le bureau de Jérusalem ne répondra pas à plusieurs questions – de sorte que pour l’un des rapports les plus importants de l’UNICEF, de nombreuses questions sont restées sans réponse.

Il y a des références générales à la torture, mais quand il s’agit d’en arriver à des constats spécifiques le mot disparaît. Le rapport supprime même le mot « torture » quand il cite les articles concernés du droit international et il y substitue celui de « contrainte ».

Par exemple, il déclare : « Dans la majorité des cas, la principale preuve contre l’enfant est son propre aveu, lequel dans la plupart des cas est extorqué sous la contrainte durant l’interrogatoire… bien que de nombreux enfants aient déclaré avoir fourni des aveux à la suite de mauvais traitements, peu ont soulevé cette question devant le tribunal de peur que leurs protestations ne conduisent à des condamnations plus sévères, même si le droit international interdit que des preuves obtenues sous la contrainte soient utilisées par un tribunal. »

Le rapport dit se fonder pour cela sur l’article 15 de la Convention contre la torture – qui se réfère à la torture, pas à la contrainte.

Le rapport énumère les pratiques qui correspondent à « une torture ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants, selon le Comité contre la torture  ». Il indique notamment : détention dans des conditions pénibles ; menace, notamment menace de mort ; coup de pied, coup de poing et coup ; usage excessif de la force ; détention au secret ; isolement ; privation sensorielle ; manque de nourriture et d’eau.

Le rapport constate qu’Israël a commis nombre de ces pratiques, mais il n’emploie à aucun moment le mot torture.

Gough a donné à Inquirer différentes raisons pour cela. D’abord, elle a dit que si une seule de ces pratiques était appliquée, elle ne constituait pas une torture. « Nous n’avons pas de preuves suffisantes pour affirmer que toutes ces pratiques ont été mises en œuvre sur un unique enfant » a-t-elle dit. Gough a déclaré que l’UNICEF n’était pas un « mécanisme de plaintes  » et n’avait pas suffisamment de personnel pour enquêter sur les cas individuels.

Selon l’UNICEF, les données probantes du rapport incluent plus de 400 cas documentés de mauvais traitements. Environ 200 ont été fournis par Defence for Children International (DCI), qui a aussi donné à l’UNICEF accès à son rapport Ligotés, yeux bandés et détenus. Les cas dans le rapport de DCI incluent un garçon qui a eu les mains attachées derrière le dos pendant 19 heures ; un autre dont les menottes étaient si serrées que sa chair se décollait ; un autre encore qui dit avoir été frappé dans les testicules et un dont la tête a été projetée contre le mur.

La bizarre conférence de presse de Jérusalem faisait suite à un débat d’un an. En mars de l’année dernière, il a été dit que l’UNICEF ne publierait aucun rapport. Une source a indiqué qu’il y avait du « grabuge massif  » à l’intérieur de l’organisation.

Selon cette source, certains ont fait valoir que ce serait une erreur de ne pas publier le rapport alors que d’autres suggéraient que le rapport pourrait être reporté à l’infini, ce qui repousserait le mécontentement d’Israël.

La source indique qu’une position intermédiaire a été prise – le lancement de la publication se poursuivrait mais le nombre de journalistes invités serait limité pour « calmer tout le monde ». C’est une décision incroyable ; normalement, les organisations recherchent le plus de couverture possible pour leurs rapports.

Gough a reconnu que, durant le processus de l’avant-projet, « nous avons pris l’avis d’avocats israéliens  ».

Est-ce que les avocats israéliens ont vu la mouture définitive ? « Bien sûr  », a dit Gough. « Nous avons eu des discussions à ce sujet. Cela pour s’assurer que nous ayons un dialogue  ».

Gough, pendant ce temps, était promue à la direction du bureau du Nigéria, la deuxième mission la plus importante de l’UNICEF. Interrogée sur son nouveau travail, elle a répondu : « C’est une promotion  ». Mais d’ajouter aussitôt : « Mais pas à cause du rapport ».

* JOHN LYONS est correspondant au Moyen-Orient pour The Australian

Du même auteur :

- Un magazine australien dénonce les tortures israéliennes sur les enfants palestiniens – 19 décembre 2011

source

«La non-assistance au peuple syrien est un crime»


Forum de Marseille L’écrivain et chercheur Gilbert Achcar défend le principe d’armer les rebelles.

Par JEAN-PIERRE PERRIN

Titulaire d’une chaire à la School of Oriental and African Studies, auteur d’ouvrages sur le Proche-Orient dont le très remarqué les Arabes et la Shoah (Sindbad, Actes Sud, 2009), Gilbert Achcar a consacré son dernier ouvrage – Le peuple veut (Sindbad, Actes Sud, 2013) – à «une exploration radicale du soulèvement arabe», qu’il interprète comme «le point de départ d’un processus révolutionnaire» et non comme une «éruption aboutie».

L’urgence, c’est d’abord la Syrie. Pourquoi cette réticence des pays occidentaux à livrer des armes à l’insurrection ?

A cause du veto des Etats-Unis qui ne veulent pas que le régime syrien soit renversé par l’insurrection, mais préfèrent une solution négociée. Ce qu’ils veulent, c’est une démocratisation avec une continuité de l’Etat. Cela procède des leçons mal digérées de l’Irak. On a eu le même processus imposé au Yémen, d’où ce sentiment de frustration des insurgés. En Libye, même si une intervention militaire a permis de sauver Benghazi, elle s’est faite à une cadence plutôt réduite, les bombardements servant surtout à faire pression sur Kadhafi pour qu’il cède le pouvoir à son fils Saïf al-Islam, avec un processus de démocratisation contrôlée. En Syrie, l’émissaire de l’ONU, Lakhdar Brahimi, qui «roule» pour Washington, et même son prédécesseur, Kofi Annan, s’inscrivent dans cette ligne de privilégier des «solutions négociées». Mais tous se heurtent à l’obstination du président, Bachar al-Assad, qui, fort du soutien de Moscou et Pékin, pense toujours qu’il va gagner, d’autant qu’en face de lui les insurgés n’ont pas profité jusqu’ici d’une aide en armements qui leur permettrait de neutraliser la supériorité militaire du régime.

Mais le chef de la Coalition nationale, Moaz al-Khatib, lui-même s’est prononcé pour des négociations avec le régime…

Il croyait que c’était le prix à payer pour avoir une aide substantielle des pays occidentaux, en premier lieu un changement d’attitude de Washington. Il a fait les déclarations qu’on attendait de lui, mais cela n’a rien donné. En réalité, les représentations extérieures du soulèvement – naguère le Conseil national syrien, puis la Coalition nationale – ont bénéficié d’un soutien des insurgés de l’intérieur du pays en raison de l’espoir que ces formes de représentation, exigées par les puissances occidentales et les monarchies du Golfe, allaient obtenir un appui massif de l’Occident. Or, il n’en a rien été jusqu’ici. En Syrie, il se commet un crime contre l’humanité et les puissances occidentales y ont une grande part de responsabilité. La non-assistance à un peuple en danger est un crime. Certes, une intervention militaire directe en Syrie, à la libyenne, aurait été une catastrophe, mais il ne s’agit pas de cela. En refusant à l’insurrection des livraisons conséquentes d’armes sous divers prétextes, on la prive de la possibilité de se défendre à armes égales. Depuis deux ans, ce n’est pas une guerre entre deux camps ayant des moyens comparables, mais un massacre systématique de la population par des forces armées ayant des moyens largement supérieurs à ceux des groupes locaux, qui agissent, eux, sans véritable centralisation et ne disposent que d’armement léger pour l’essentiel. Par cette attitude, les Etats occidentaux arriveront à des résultats contraires à leurs objectifs avoués : ne pas donner les moyens de se défendre à l’insurrection populaire – dont les comités locaux de coordination qui ont incarné et incarnent toujours, en dépit de tout, une insurrection démocratique et laïque -, c’est permettre aux groupes islamiques les plus fanatiques de progresser du fait que les cercles wahhabites saoudiens leur envoient fonds et armes. Cette attitude criminelle suscite un ressentiment contre l’Occident, en donnant l’impression qu’il laisse détruire la Syrie pour favoriser Israël.

A quoi peut-on s’attendre ?

Le régime n’a cessé de perdre du terrain depuis plus d’un an, malgré des contreoffensives victorieuses par moments. Il a beau avoir des corps d’élite, ceux-ci sont gagnés par l’épuisement. Les insurgés, eux, commencent à améliorer leurs moyens par les récentes livraisons d’armes offertes par les monarchies du Golfe, mais surtout par leur prise de contrôle de bases militaires du régime. A moyen terme, on peut donc estimer que le régime est condamné. Plus cela se confirmera, plus on pourrait espérer qu’une partie de l’appareil militaire, dans le meilleur intérêt de la communauté alaouite, renverse le clan Assad et organise conjointement avec les représentants du soulèvement la passation des pouvoirs à un gouvernement démocratiquement élu. Ce serait l’alternative la moins coûteuse. Mais elle ne peut se réaliser que si les forces loyalistes prennent conscience de ce que leur défaite est inévitable sur le court ou moyen terme. Or, comme leur chef, elles conservent encore plus ou moins l’illusion qu’elles vont gagner, encore une fois à cause du soutien qu’elles reçoivent de l’extérieur. Quand un corps d’armée privilégié bénéficiant d’un important soutien matériel et financier a l’impression de se battre le dos au mur, la guerre peut durer des années.

Pourquoi cette différence entre les soulèvements tunisien, égyptien et la Syrie ?

Depuis Hafez al-Assad, l’appareil d’Etat a été complètement réorganisé de façon à créer un lien organique entre le régime – qui utilise la carte alaouite [moins de 10% de la population, ndlr] comme atout de son pouvoir – et les forces armées, noyau dur de l’Etat. A la différence de la Tunisie et de l’Egypte où le noyau dur s’est vite désolidarisé des autocrates, il n’y a pas eu en Syrie de processus pacifique : la solidarité avec la dynastie régnante est beaucoup plus forte. Placé devant le choix de renverser le régime ou de se faire écraser, ce n’était donc pas une «erreur» pour le soulèvement syrien de s’armer. A présent, le peuple est dans un isolement tragique.

Est-ce que les soulèvements dans les autres pays arabes ont une trame commune ?

Oui, certaines modalités de l’explosion sont identiques. On ne peut les résumer à des luttes pour la démocratie sous peine d’être réducteur. Le volet social y est très présent. En Tunisie, avant le slogan «Le peuple veut renverser le régime», on entendait : «L’emploi est un droit, bande de voleurs !» Car, le monde arabe détient les records mondiaux de chômage depuis des dizaines d’années, en dépit de ressources considérables. La raison ? Un type particulier de développement capitaliste qui s’est mis en place. Selon les recettes néolibérales imposées depuis quarante ans, le secteur privé est censé être le moteur du développement en lieu et place du secteur public. Or, le capitalisme privé du monde arabe, orienté en grande partie vers la spéculation et le profit à court terme, n’a pas compensé le retrait de l’Etat. D’où un blocage de la croissance dont les conséquences sociales dramatiques (pauvreté, inégalité, précarité, chômage) se sont aggravées depuis les années 70 sous l’effet du despotisme politique ambiant et du népotisme que les régimes entretiennent comme mode de gouvernement. Il ne manquait plus, sans mauvais jeu de mots vu l’immolation du jeune Bouazizi, qu’une étincelle pour que tout s’embrase. Au regard de ces données, on comprend pourquoi ce qui s’est déclenché n’est pas prêt de s’arrêter. Je parle ainsi de «processus révolutionnaire à long terme». Le despote n’était pas le seul visé. Le processus n’aboutira à une stabilisation quelconque qu’après un certain nombre d’années. A défaut de gouvernements avec des perspectives radicalement différentes sur les questions sociales et économiques, la région persistera dans ce processus révolutionnaire avec des avancées et des reculs, comme toute révolution.

Ces révolutions ignorent la question des mœurs, la nécessité d’une certaine mixité…

Au début des mobilisations de la place Tahrir, au Caire, les rassemblements étaient mixtes sans harcèlement sexuel, ou beaucoup moins que ce à quoi l’on aurait pu s’attendre. Après, on a vu de plus en plus de dérapages avec des viols. Mais n’oublions pas que la révolution en cours se fait après trois décennies de réaction politique et culturelle, avec un régime qui jouait l’islam à fond pour contrer la radicalisation sociale. Ils ont ainsi laissé les universités s’islamiser pour contrer la gauche étudiante. Ces gouvernements ont utilisé l’ordre moral et islamique, laissant les religieux intervenir à loisir dans les domaines sociaux et culturels, afin de mieux museler la contestation.

Et, aujourd’hui, les partis d’inspiration religieuse triomphent…

Ce pourrait être leur chant du cygne. Ils récoltent ce qu’ils ont semé pendant des années, mais ce sont des fruits empoisonnés. Car, ils n’apportent aucune solution. En Egypte, Mohamed Morsi, c’est Moubarak avec en plus des versets du Coran dans les discours. L’opposition a raison de souligner qu’il y a plus de continuité que de discontinuité entre Morsi et Moubarak. Je ne suis pas désespéré par leur victoire car je ne m’attendais à rien d’autre. Les raisons ? Appui télévisuel d’Al-Jezira, soutien financier du Qatar, opposition laïque et de gauche plutôt chétive. Ce qui est étonnant, ce n’est pas leurs victoires en Egypte et en Tunisie, mais leurs scores aussi médiocres. En Egypte, sous Sadate et Moubarak, les Frères musulmans avaient été tolérés et avaient pu construire une imposante machine organisationnelle, d’où leurs premiers succès électoraux. Mais, des élections parlementaires à la présidentielle, on a vu leur score s’effriter. Leur arrogance a contribué à ce qu’un secteur grandissant de la population les rejette. Ainsi, Mohamed Morsi, élu de peu au second tour grâce aux voix de ses concurrents opposés aux militaires, n’a pas pris en compte cette réalité. Pareil pour Ennahda en Tunisie, qui se comporte comme s’il avait dirigé la révolution alors qu’il n’a fait que s’y rallier. Ces partis, par leur comportement, accélèrent leur propre rejet. Reste à voir si l’opposition de gauche parviendra à construire une alternative crédible, en mettant en avant les revendications sociales.

Aller plus loin Lire tous les articles du dossier Forum de Marseille : agir aujourd’hui en Méditerranée

source