Famine à Madaya : Les images de Syrie que personne ne veut voir


Madaya

Traduction publiée le 5 Janvier 2016 17:40 GMT

 

Quarante-mille personnes habitent la ville syrienne de Madaya, aux abords minés, et y meurent de faim depuis six mois. Crédit photo : page Facebook de Madaya

Quarante-mille personnes, habitant la ville de Madaya, dans les monts Qalamoun en Syrie, seraient en train de mourir de faim dans l’indifférence du reste du monde, disent des militants de la cause syrienne. Cette petite ville de montagne, située à 1.400 mètres d’altitude, à 40 kilomètres au nord de Damas dans le gouvernorat de Rif Dimashq, le long de la frontière libanaise, est assiégée par les forces gouvernementales appuyées par la milice du Hezbollah, qui empêchent depuis juillet toute nourriture et aide d’y pénétrer.

La ville est au centre d’une lutte entre différentes factions embourbées dans la guerre civile syrienne, et ses habitants en paient le prix.

Dans un article publié hier, accompagné de photos terribles de Syriens et d’habitants de Madaya mourant ou morts de faim, l’Observatoire syrien des droits humains (SOHR en anglais), basé au Royaume-Uni, explique :

Les gens de Madaya connaissent la famine depuis 174 jours du fait du siège rigoureux par les forces du régime et du Hezbollah, la ville compte 40.000 personnes dont 20.000 civils qui ont fui leurs maisons à Zabdani où ont eu lieu de violents affrontements et de lourds bombardements par les forces du régime et l’aviation.

Le SOHR a constaté des centaines de mines terrestres posées par le Hezbollah et les forces al-Assad autour de la ville de Madaya s’ajoutant à la coupure de la ville d’avec les environs au moyen de barbelés et de fils de fer pour empêcher toute opération d’entrée ou sortie, la ville compte 1.200 cas de maladies chroniques, et 300 enfants souffrant de malnutrition et de maladies diverses, au milieu d’une pénurie aiguë de produits alimentaires et médicaux qui a causé une hausse spectaculaire des prix de l’alimentation, 1 kg de sucre ou de riz coûte 3600 livres syriennes soit près de 90 dollars US, le SOHR a documenté la mort de 17 civils parmi lesquels des femmes et des enfants, par manque de nourriture et de médicaments, ou à cause des mines et des snipers lors de tentatives de trouver de quoi manger autour de la ville.

La presse rapporte que les habitants de Madaya mangent des feuilles, des insectes, et même des chats, depuis l’épuisement de leurs réserves. Sur sa page Facebook, Hand in Hand for Syria (Main dans la main pour la Syrie) dépeint un tableau plus affreux :

La plupart des photos qui sortent de la petite ville de Madaya (environs de Damas) sont trop crues pour être montrées. Les images choquantes dépeignent le vrai visage du désespoir humain : des êtres réduits à des squelettes, yeux enfoncés dans leurs orbites, cages thoraciques saillantes, attendant leur tour d’être appelés par la mort.

Cela fait six mois que les gens de Madaya sont assiégés. Récoltes et provisions se sont amenuisées, ne laissant rien d’autre que le désespoir. La nourriture restante dans la ville est devenue si chère que la plupart des gens ne peuvent simplement pas se payer de quoi manger.

Ils ont commencé par faire cuire les récoltes. Quand il n’en resta plus, ils cuisaient l’herbe, les plantes… puis les insectes. Quand la malnutrition devint insupportable, ils se sont résolus à manger les chats.

Les chats.

A ce jour, la famine a pris les vies d’une cinquantaine d’habitants. La malnutrition est répandue, et avec le froid de l’hiver qui s’installe, c’est par milliers que les gens sont en danger accru d’hypothermie.

Pourtant le monde reste impassible, constate le blogueur BSyria :

Assad affame Madaya. Enfants, femmes et hommes meurent de faim. Le monde se contente de regarder.

Selon Raed Bourhan, un fixeur syrien vivant à Beyrouth au Liban, l’arrivée de l’hiver exacerbe encore davantage la situation déjà désespérée de Madaya :

CXvXuT9UoAEG9ph

Des milliers vivent dans des conditions hostiles, le gel à -5°, mazout et bois de chauffage sont rarement sous la main

Dans un autre tweet, il partage des photos d’enfants “dépouillés de leurs droits” par la poursuite de la guerre en Syrie :

Les enfants ont perdu leurs droits fondamentaux, bonheur, éducation, chaleur et espoir #Madaya_meurt_de_faim

Un troisième tweet décrit comment les prix alimentaires ont explosé dans les zones assiégées, qui sont encerclées de mines et de tireurs embusqués interdisant aux habitants de partir :

Les prix alimentaires battent tous les records, 1 kg de céréales et de riz coûte au moins 100 dollars #Madaya_meurt_de_faim

La page Facebook de Madaya a lancé un appel à des manifestations de solidarité des défenseurs la cause syrienne devant les ambassades russes (la Russie mène des frappes aériennes en Syrie) et les représentations de l’ONU :

Invitation aux militants et organisations humanitaires et de droits humains à travers le monde, et une manifestation de solidarité avec Madaya assiégée, devant les ambassades de Russie et les bureaux de l’ONU.
‪#‎sauvez_madaya
‪#‎répondez_nous

Une autre entrée supplie le monde de sauver les enfants de Madaya :

Un enfant syrien de Madaya, assiégée depuis six mois. Crédit photo : Page Facebook de Madaya

CXvfeY3UwAA1k77

Sur Facebook, la Syrienne Kenan Rahbani partage des photos d’habitants de Madaya mourant de faim et commente :

Pardonnez-moi de publier ces photos choquantes, mais je le dois.

Si ces gens meurent de faim, ce n’est pas parce qu’ils sont pauvres, ou que la nourriture manque. Le Hezbollah et le régime Assad affament à mort la ville de Madaya. Elle est totalement assiégée, et ni nourriture, ni médicaments ni eau ne sont autorisés à y pénétrer. L’ONU est là mais ne peut entrer dans la ville parce que le Hezbollah et le régime Assad ne les laissent pas entrer.

Cela se passe en 2016 en Syrie. Et l’EI n’y est pour rien.

La militante syrienne Rafif Joueati se demande combien de personnes devront encore mourir avant que le monde agisse :

Madaya n’est ni la première ni la dernière à subir la famine d’un siège. La question est, combien d’autres dizaines de milliers vont mourir avant une action internationale ? #Syrie

Elle pose une autre question :

Et quand il n’y aura plus de feuilles à manger ?

Et de s’interroger :

Aveugles. Si on disait que 40.000 chiots mouraient de faim le monde entier défilerait pour protester. Des humains ? pas tellement.

source

QU’EST CE QU’ISRAËL EST SUPPOSE FAIRE ?


MikoPeled2

par MIKO PELED
Traduction Sonia Fayman pour IJAN

Israël est attaqué par les pays arabes qui veulent le détruire, alors qu’est ce qu’Israël est supposé faire ? Les soldats israéliens sont attaqués par des terroristes palestiniens armés de couteaux, que sont-ils supposés faire ? L’Iran a une puissance nucléaire et veut effacer Israël de la carte, dans ce cas qu’est ce qu’Israël est supposé faire ? Le Hamas est décidé à tuer des civils israéliens, alors qu’est ce qu’Israël est supposé faire ? Et la liste de ce qui met Israël dans l’impossibilité de faire autre chose que s’armer, attaquer et tuer des Palestiniens se poursuit. Donc, il n’y a pas d’espoir, et aucune raison d’attendre un changement.

Bon, c’est super. C’est la ligne officielle tenue par Israël depuis qu’elle a été officiellement mise en avant vers 1956 par celui qui était alors le général Moshe Dayan (et que les sionistes défendaient de temps en temps avant cette date) pour justifier absolument tous les crimes de l’État d’Israël. Moshe Dayan était un criminel de guerre médiocre et lâche, devenu célèbre à cause de son bandeau sur l’œil. Il était aussi un voleur d’antiquités bien connu et un maquereau (on dit que lorsque Ben Gourion, le premier Premier ministre d’Israël, fut informé que l’insatiable appétit sexuel de Moshe Dayan devenait embarrassant, il a répondu : « et alors ? Le roi David aussi était un homme à femmes et un bon roi »). Chef d’état major de l’armée, Dayan a servi ce « que faire?» en guise d’excuse, dans un discours inoubliablement éloquent avant l’attaque de l’Égypte par Israël en 1956.

Dayan semait la peur et un certain sens du destin quand il décrivait les pauvres réfugiés de la bande de Gaza comme « en attente de nous massacrer et de répandre notre sang » parce que, comme Dayan lui-même l’a admis, « nous avons pris leur terre et l’avons faite nôtre ». Mais, expliquait-il, « nous avons fait cela parce que nous n’avions pas le choix, ou « que fallait-il faire ? » Après des milliers d’années en exil, persécutés indéfiniment et à l’issue de l’holocauste nazi, nous sommes maintenant retournés et devrons vivre toujours par l’épée en la tenant bien fermement, « parce que si notre force se relâchait » ces Arabes assoiffés de sang verraient cela comme un signe de faiblesse et le sang juif s’écoulerait dans les rues. Autrement dit, peut-être que ces Arabes assoiffés de sang qui nous regardent de derrière les grilles de Gaza sont justifiés à nous haïr, mais c’est une réalité face à laquelle nous n’avons pas le choix. C’est notre destin de vivre par l’épée.

Comme c’est commode !

Les crimes commis par Israël sont commis parce qu’Israël n’a pas le choix. Dans une interview donnée il y a plusieurs années par un responsable des interrogatoires des services de renseignement israéliens, celui-ci décrivait comment les médecins des hôpitaux israéliens fermaient les yeux lorsque des agents de renseignement venaient torturer des « suspects de terrorisme » blessés qui étaient hospitalisés. Il a décrit comment « ils tirent un peu sur les tubes, et assez vite les Arabes se mettent à parler ». Il a ensuite ajouté que bien sûr personne ne trouve ça bien, mais que faire ? » Il justifiait ainsi la torture la plus immorale et horrible de gens qui sont confiés aux soins d’un hôpital, les médecins détournant les yeux et les agents des renseignements faisant leur besogne avec la même excuse sans honte, « qu’est-ce qu’Israël est supposé faire ? »
Au cours du mois d’octobre 2015, alors que j’étais à Jérusalem, je regardais les nouvelles à la télé israélienne. Il y avait une interview de Mohammad Baraka, membre palestinien de la Knesset du groupe de la liste arabe, le troisième parti en nombre de membres, du parlement israélien. À lui aussi il fut demandé « que doit faire un soldat si un Palestinien armé d’un couteau s’approche de lui ? » Quand Baraka s’est mis à parler de l’occupation, il a été interrompu et on lui a dit que ce dont il parlait n’était pas le sujet et qu’il s’en tienne à la question. Autrement dit, l’occupation israélienne en Palestine n’a rien à voir avec tout cela et qu’est ce qu’un soldat est supposé faire ? » Vous êtes prié de dire que ce que font les soldats israéliens est justifié, que le meurtre systématique de Palestiniens, c’est bien, parce que « que doit faire Israël ? » Les Palestiniens sont toujours amenés à la télévision israélienne pour y être ridiculisés ou sommés de se taire.

Le nettoyage ethnique de la Palestine était justifié parce que les Juifs n’avaient pas le choix. Le lent génocide du peuple palestinien est justifié parce qu’Israël n’a pas le choix, le meurtre de milliers d’habitants de Gaza est justifié parce qu’Israël na pas le choix, et ainsi de suite. Les media américains sont allés un peu plus loin et ont ajouté : « nous ferions la même chose », comme si cela donnait plus de poids à l’argument « qu’est ce qu’Israël est supposé faire ? »

Il est peut-être temps d’aborder sérieusement cette question et de voir s’il y a une réponse. Qu’est ce qu’un soldat est supposé faire : se tirer vite fait des villes, des villages et des quartiers de Palestine. Et détruire le Mur et tous les checkpoints en partant. Que doit faire Israël avec les roquettes de Gaza ? Lever le siège de Gaza, détruire le mur et les checkpoints qui s’y trouvent et permettre aux gens de Gaza de jouir de la liberté qu’ils méritent. Que doivent faire les Israéliens ? Si ça ne leur plaît pas de vivre dans un pays à majorité arabe, ils peuvent aller ailleurs ou faire avec et, s’ils choisissent de rester, se comporter comme des immigrants plutôt que comme des colonisateurs (cette distinction est importante, ainsi que me l’a expliqué mon neveu Guy Elhanan).

Quant à la question principale « que doit faire Israël ? », Israël doit libérer tous les prisonniers politiques, abroger toutes les lois qui donnent aux Juifs des droits exclusifs en Palestine, abroger la loi qui interdit aux Palestiniens de rentrer sur leur terre et débloquer les milliards de dollars qui vont être nécessaires pour payer des réparations aux réfugiés et à leurs descendants. Puis, Israël doit organiser des élections libres, une personne-une voix, où tous les habitants de la Palestine mandataire voteront à égalité. Voilà ce qu’Israël devrait faire.

Miko Peled est un écrivain et militant israélien vivant aux États Unis. Il est né et a été élevé à Jérusalem. Son père était le général Mati Peled. Amené par une tragédie familiale à découvrir la Palestine, ses habitants et leur histoire, il a écrit un livre sur son trajet depuis la sphère d’un Israélien privilégié vers celle des Palestiniens opprimés. Son livre est intitulé « Le fils du général, voyage d’un Israélien en Palestine ». Peled s’exprime au niveau national et international sur la question de la Palestine. Peled soutient la création d’un État démocratique unique sur toute la Palestine. Il soutient aussi fermement BDS.

Traduction Sonia Fayman pour IJAN

SOURCE

Créez un site Web ou un blog gratuitement sur WordPress.com.

Retour en haut ↑