Une « radicalisation très rapide », cela s’appelle une conversion


Les heures qui ont suivi la tragédie de Nice ont vu les dirigeants chercher leurs mots pour caractériser l’auteur de l’attentat : « terroriste » assurément, mais « islamiste » pour les uns, pas forcément pour les autres, avec la même incertitude pour « radical ». Et puis est tombée la revendication du carnage par Daech, le bien mal-nommé « Etat islamique », et le ministre de l’Intérieur a pu enfin décrire un terroriste « radicalisé très rapidement ».

Plutôt que le terme de « radicalisation », dont on voit qu’il obscurcit autant qu’il éclaire, j’ai proposé dès mars dernier dans une tribune au « Monde » d’utiliser le mot de « conversion ». Le basculement « très rapide » renvoie à l’intégration dans une secte, Daech, qui prône la religion jihadiste, avec le salut assuré pour ses seuls fidèles et les pires tourments prédits, et parfois infligés, à ceux qui sont désignés comme adversaires.

Cette secte millénariste affirme l’imminence de la Fin des Temps, du fait de la multiplication de signes prophétiques sur la terre de Syrie (en arabe bilad al-Cham). C’est sur cette terre qu’a déjà commencé l’ultime bataille, entre les localités de Dabiq et d’A’maq (Dabiq est le nom du magazine en ligne de Daech et A’maq celui de son « agence de presse » où a, entre autres, été revendiqué le carnage de Nice). Les fidèles qui périront dans ce combat apocalyptique auront le privilège de racheter les péchés de 70 de leurs proches au Jugement dernier.

Mohamed Lahouaiej Bouhlel n’avait de musulman que le prénom. Il ne respectait aucune des prescriptions canoniques de l’Islam, que ce soit la prière, le jeûne, la charité ou le pèlerinage. Sa consommation d’alcool était apparemment problématique. Le tueur de Nice ne s’est donc pas « radicalisé » dans l’Islam, il s’est converti à la secte jihadiste. Converti comme des centaines d’autres Françaises ou Français, dont Daech se charge de déconstruire l’éventuel bagage culturel et religieux pour y substituer le credo de la secte.

C’est en 1987 que Bruno Etienne, avec son livre « L’Islamisme radical », popularise une catégorie au fond fourre-tout de « radicalité » : s’agit-il d’appliquer l’Islam à la racine, dans une forme de fondamentalisme, ou bien de tirer d’une religion un programme d’action politique ? Les recherches ultérieures et l’évolution des pays arabo-musulmans ont clarifié la distinction entre l’Islam politique, d’une part, et le salafisme de type littéraliste, d’autre part.

L’invasion du Koweit par l’Iraq de Saddam Hussein en 1990 et l’appel saoudien à une intervention des Etats-Unis pour l’en chasser clive jusqu’à aujourd’hui le champ islamiste : les tenants de l’Islam politique, au premier rang desquels les Frères musulmans, fustigent alors le recours à Washington, tandis que les salafistes se rallient à leurs parrains du Golfe et en sont généreusement récompensés. Mais un troisième courant, ultra-minoritaire, condamnant les uns et les autres, prône un jihad révolutionnaire à l’encontre des régimes en place.

Ce jihadisme a donc pour priorité la prise du pouvoir dans les pays arabes. Il devient « global » en faisant de la planète entière une « terre de jihad », alors que quatorze siècles de pratique islamique avaient ancré le jihad dans un territoire précis à conquérir ou à défendre. Cette mutation s’opère en Afghanistan, avant que ce « jihad global » ne se leste d’un message apocalyptique sur les terres d’accomplissement des prophéties que sont l’Irak, et plus encore la Syrie.

On voit combien l’expression d’« islamisme radical » rend mal compte de la réalité de la secte jihadiste, qui divise le monde en cinq catégories : les « Musulmans », terme réservé aux seuls membres de la secte, les « Apostats », soit tous les Sunnites, les « Hérétiques », soit les Chiites et autres familles de l’Islam, et enfin « les Juifs et les Croisés ». C’est bien pourquoi les Musulmans, et avant tout les Sunnites, sont partout en première ligne face aux sectateurs de Daech qui leur dénient leur identité même de Musulmans.

Le choix des termes justes va de pair avec la définition des alliances stratégiques dans ce combat de longue haleine contre le monstre jihadiste.

source

Jean-Pierre Filiu est professeur des universités en histoire du Moyen-Orient contemporain à Sciences Po (Paris). Il a aussi été professeur invité dans les universités de Columbia (New York) et de Georgetown (Washington). Ses travaux sur le monde arabo-musulman ont été diffusés dans une douzaine de langues.
Jean-Pierre Filiu est professeur des universités en histoire du Moyen-Orient contemporain à Sciences Po (Paris). Il a aussi été professeur invité dans les universités de Columbia (New York) et de Georgetown (Washington). Ses travaux sur le monde arabo-musulman ont été diffusés dans une douzaine de langues.

La police de Dallas a utilisé un robot pour tuer un homme


Norédine Benazdia – Übergizmo – dimanche 10 juillet 2016

L’utilisation d’un robot pour tuer un homme qui aurait mortellement tiré sur 5 policiers de Dallas soulève de nombreuses interrogations. Il est vrai que c’est la première fois que la police américaine utilise des robots de cette manière.

Vendredi matin, à l’aube, le tireur présumé, Micah Xavier Johnson, était retranché dans un parking. Après une heure d’échange de coups de feu, la police a décidé d’utiliser un robot pour déposer une bombe qui a tué le forcené.

Pour le chef de la police de Dallas, il n’y avait pas d’autres choix : »Toutes les autres options auraient exposé les policiers à un grand danger.«

Le robot utilisé était un Northrop Grumman Remotec Andros. C’est un robot utilisé pour le déminage de bombes par la police et l’armée un peu partout dans le monde. Il roule et pèse et 220kg. Il intègre de nombreux capteurs et dispose d’un bras robotique avec une pince.

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Ce robot est aussi fréquemment utilisé lorsque des personnes armées retiennent des otages. En général, ils s’en servent pour repérer où se trouve la personne hostile , ou pour apporter des pizzas bourrées de somnifère à la personne armée. Il n’avait jamais été utilisé pour tuer.

Le plus étonnant serait alors l’histoire de la « bombe » utilisée par la police. Que fait donc la police avec une bombe ? Ce n’est pas une bombe comme on pourrait l’imaginer. Il s’agit plutôt d’un assemblage de petites charges explosives utilisées par les équipes d’interventions américaines (SWAT) pour ouvrir les portes ou faire un trou dans un mur. Parfois, les équipes de déminage ont aussi de petites charges explosives pour faire exploser un sac suspect.

Forcément, cette première utilisation d’un robot tueur soulève quelques questions éthiques. Mais il faut avant tout retenir 3 choses :

1/ Tout d’abord, il ne s’agissait pas d’un robot autonome. Le robot était télécommandé et l’explosif déclenché à distance.

2/ Ce robot n’a jamais été conçu pour être armé. Il existe en revanche des robots qui sont en cours de développement. Ceux-ci seront armés de joyeusetés comme des mitraillettes ou des lance-missiles. (Si ça vous intéresse allez-voir les prototypes US MAARS et Chinese Sharp Claw).

3/ En réalité, le débat aujourd’hui est de savoir s’il est possible d’empêcher les robots autonomes d’entrer sur les champs de bataille dans un futur proche. Surtout à une époque où les militaires du monde entier commencent déjà à établir des plans et des méthodes. Dans ce débat, on se demande si ces robots ne pourraient pas s’en prendre aux civils et ne pourraient pas non plus être les auteurs d’une boucherie sans précédent.

Il est certain que l’utilisation de la robotique par les militaires, la police ou les civils va se développer dans le futur. Plus de 80 pays ont des robots dans leur armée, et des sociétés comme Google, Tesla, Uber ou Ford rêvent d’un futur avec des voitures sans chauffeur. Dans certains pays, la police utilise déjà des drones de surveillance, qu’ils soient petits pour suivre des individus ou plus grands pour surveiller des quartiers entiers.

Il faut donc distinguer les systèmes autonomes des systèmes armés. Les hélicoptères de la police ne sont pas armés par exemple, il y a donc peu de chance qu’il y ait des drones avec des armes au-dessus de nos têtes. Et la tendance aux outils autonomes ne signifie pas forcément que ces outils devront être armés.

Avant Dallas, la discussion concernant l’utilisation de robots par la police tournait autour des armes « non létales ». Dans les congrès et salons sont présentés des robots équipés de tasers ou de gaz lacrymogène. En Chine, le robot Anbot est un robot conçu pour être autonome et il est pourtant équipé d’un électrochoc similaire à un aiguillon à bétail. Ce robot fait beaucoup parler de lui pour des raisons évidentes.

Le débat est toujours de savoir si les armes non létales sont utilisées plus abusivement. Il suffit de penser au débat quand le taser est arrivé : les taser sauvent (prétendument) des vies, cependant ils peuvent être utilisés plus souvent et pas toujours à bon escient.

Jérusalem. Elie Wiesel, l’ami des colons israéliens


 

Ha’Aretz

Jewel Samad

Elie Wiesel en avril 2013 – AFP/Jewel Samad

Survivant de la Shoah et prix Nobel de la paix, l’écrivain juif américain est également à la tête d’Elad, une organisation radicale de colons israéliens qui occupe les maisons des Palestiniens à Jérusalem, révèle l’homme politique israélien de gauche Yossi Sarid.

J’ai toujours beaucoup appris des rubriques “potins”, que nos
journaux préfèrent appeler par pudeur “échos”. Sans elles, comment saurions-nous qui roule pour qui, et dans quel intérêt ?

Avant de lire les pages d’information pure, allez donc jeter
un œil à ces pages légères. Vous verrez, cela vous aidera à comprendre les
rouages du système.Renforcer la présence juive

Ainsi, vendredi dernier, Ha’Aretz comportait
un encadré de remerciements, en hébreu, à ces “dizaines de nouvelles
familles qui rejoignent la communauté juive dans la Cité de David” [nom donné au
quartier arabe de Silwan à Jérusalem-Est, site de la Jérusalem antique du roi David,
qui fait l’objet d’une campagne de ‘judaïsation’ démographique].”Nous saluons
l’engagement sioniste de tous les acteurs : nous sommes unis dans la
volonté de renforcer la présence juive à Jérusalem. Avec vous, nous accueillerons les pèlerins qui nous rendront visite pendant les fêtes.”

Le texte est suivi de signatures de proches du mouvement de
colonisation Elad. Certains des noms sont totalement inconnus, mais d’autres
étonnent. Après tout, c’est une organisation connue pour semer le trouble dans
la “ville de la paix” [Jérusalem].Que font-ils là ?

Je ne me suis pas étonné de voir le nom du chanteur israélien Yehoram
Gaon – il voit des drapeaux partout. Mais que viennent faire là l’ancien chef des services de renseignements
militaires, Amos Yadlin, l’ancien chef de la police, Shlomo Aharoniski, et
l’ancien directeur de l’hôpital universitaire Hadassah, Shlomo Mor-Yosef ?
Que fait ici Ilan Cohen, un ancien directeur du cabinet du Premier
ministre ? Peut-être devraient-ils expliquer comment ils peuvent apporter
leur soutien à des gens qui en expulsent d’autres [Palestiniens] pour s’emparer de leurs maisons ?

Et qui y a-t-il à leur tête ? Vous ne le devinerez
jamais. Pas le magnat des casinos [le milliardaire américian] Sheldon Adelson. Pas l’homme d’affaires américain Irving Moskowitz et son épouse Cherna.

Non, à leur tête se trouve un homme étroitement lié à la
mémoire de l’Holocauste, un lauréat du prix Nobel de la paix et de la médaille
de la Liberté de la présidence américaine : Elie Wiesel. Un homme au sujet
duquel le comité Nobel déclarait : “Elie Wiesel est un messager pour
l’humanité ; son message est un message de paix, de pardon et de dignité humaine.”

Voilà un homme dont on attend qu’il manifeste une sensibilité
particulière aux souffrances d’autrui, et ce où qu’il se trouve, aussi bien
dans la ville roumaine de Sighetu Marmatiei, dont il est originaire, que dans
le quartier de Silwan à Jérusalem. Voilà un homme qui se targue d’être l’ami de
Barack Obama mais qui soutient des gens qui insultent publiquement le président américain.

Les saboteurs du processus de paixAvant chaque réunion à Washington [pour la paix israélo-palestinienne], les activistes d’Elad préparent une
énième invasion à Jérusalem, sabotant du même coup les efforts laborieux
accomplis par les négociateurs. Peut-être [le Premier ministre israélien] Benyamin Nétanyahou savait-il pourquoi il
proposa, un temps, la présidence d’Israël à Elie Wiesel – nous en tout cas, nous ne comprenions pas.

Elie Wiesel se déclare en dehors de la vie politique
israélienne. Chaque fois qu’on lui a demandé de
réagir à quelque injustice autour de nous qui rappellerait quelque autre injustice lointaine, il a éludé.

Alors maintenant le voir lui, entre tous les hommes, pénétrant
violemment dans une maison [palestinienne] puis une autre, des maisons acquises par des
transactions douteuses, qu’on peut faire évacuer dans la nuit avant que
les draps et le café aient refroidi ? Lui, entre tous, brandissant le châle de prière pour dissimuler un nettoyage ethnique ?

De toutes les organisations d’Israël, il a choisi Elad, la
plus controversée, un mouvement sans vérité, sans grâce, sans compassion. On ne
comprend que trop bien pourquoi Elad l’a choisi lui à la présidence ; mais pourquoi a-t-il accepté ?

Elie Wiesel est un homme immensément respecté, par les Juifs
et par les nations non-juives, parce que ce survivant est devenu un témoin et
un passeur pour toutes les victimes de l’Holocauste. M. Wiesel, pourquoi ne
rendez-vous pas un peu de ce respect ? Revenez sur votre choix, n’associez pas votre nom à Elad, ne signez pas leurs remerciements infamants.

Yossi Sarid
Source

Premier journal publié en hébreu sous le mandat britannique, en 1919. “Le Pays” est le journal de référence chez les politiques et les intellectuels israéliens. Aujourd’hui situé au centre gauche, Ha’Aretz a toujours cultivé une ligne éditoriale […] Lire la suite

 

Elie Wiesel l’imposteur et Jérusalem


 

par Alain Gresh, 18 avril 2010

Dans une publicité intitulée « For Jerusalem » et reproduite par l’International Herald Tribune (16 avril 2010), Elie Wiesel, prix Nobel de la paix, réaffirme son inquiétude. Ce texte affirme hautement que « Jérusalem est au-dessus de la politique ». Ce qui, pour l’auteur, signifie qu’elle doit… rester israélienne.

Pour lui, précise-t-il, sa présence dans l’histoire juive est totale, elle est mentionnée « 600 fois dans les écritures et pas une seule fois dans le Coran ». Outre que cela est discutable (je ne vais pas entrer ici dans une interprétation du texte coranique), on ne voit pas en quoi la mention d’une ville dans un texte vieux de quelques milliers d’années donnerait un droit de propriété à quiconque. Ou alors il faudrait redéfinir les frontières de l’Europe en fonction des textes latins du Moyen Age ou des textes grecs de l’Antiquité.

Lire aussi Philippe Rekacewicz& Dominique Vidal, « Comment Israël confisque Jérusalem-Est »,Le Monde diplomatique, février 2007.« Il n’y a pas de prière plus émouvante dans l’histoire juive, poursuit-il, que celle qui exprime notre (les juifs) désir ardent de retourner à Jérusalem. » Cette interprétation politique d’une prière n’a évidemment aucun sens. Pendant des siècles, les juifs religieux ont effectivement prononcé cette prière, mais sans jamais vouloir la mettre en œuvre. Jusqu’en 1948, les juifs pouvaient se rendre à Jérusalem (certains y allaient pour être enterrés). C’est seulement avec la naissance du mouvement sioniste que l’objectif est devenu politique. Comme l’écrit si pertinemment Gilles Perrault dans sa biographie d’Henri Curiel, Un homme à part (Fayard), « la minorité sioniste exceptée, personne ne ressentait la nécessité d’un Etat juif et l’on n’éprouvait pas le besoin de psalmodier “l’an prochain à Jérusalem” quand il suffisait de prendre le train de 9h45 pour s’y rendre ».

« Aujourd’hui, poursuit Wiesel, pour la première fois dans l’histoire, juifs, chrétiens et musulmans peuvent accomplir leurs rites religieux librement. Et, contrairement à certaines affirmations des médias, juifs, chrétiens et musulmans ONT (en capitale) l’autorisation de construire leurs foyers n’importe où dans la ville. »

Il faut le dire clairement : il s’agit d’un honteux mensonge.

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