Rudi Barnet
C’est une lapalissade d’écrire que les puissances politiques et religieuses ont de tous temps utilisé les moyens de communication pour asseoir ou préserver leur pouvoir.
Pendant des siècles, l’expression artistique (architecture, peinture, musique…) joua ce rôle – pyramides, temples, cathédrales, mosquées, tableaux, statues… – mais à l’ère dite moderne, la presse, l’audiovisuel et les nouveaux medias ont pris une place prépondérante.
En ce qui concerne l’audiovisuel, principalement le cinéma, on constate que, depuis le début du XXème siècle, il a été un outil majeur de la propagande d’Etats tels la Russie soviétique, l’Allemagne nazie ou l’Italie mussolinienne et qu’il l’est toujours actuellement pour des nations comme les USA ou Israël.
À propos de ce dernier pays, sa stratégie de propagande dans le domaine cinématographique est d’une redoutable efficacité mais pour l’identifier et tenter de l’analyser, il est assez utile de faire…
Un peu d’Histoire pour…
Comme l’écrivait l’historien Marc Bloch : « L’ignorance du passé ne se borne pas à nuire à la connaissance du présent : elle compromet, dans le présent, l’action même » (1)
Un rappel succinct de l’utilisation du cinéma pour la propagande dans quelques grands pays producteurs n’est donc, sans doute, pas sans intérêt.
D’Eisenstein à Poutine
Dès son invention par Edison et les frères Lumière, le régime tsariste avait bien compris l’intérêt de ce nouvel outil pour glorifier son régime – le tout premier film réalisé en Russie est celui du couronnement de Nicolas II – et Tolstoï lui-même écrivait en 1908 « Vous verrez que cette petite machine qui tourne en faisant clic-clac révolutionnera notre vie« (2)
Mais c’est après la révolution de 1917, quand le régime soviétique le nationalisa, que le cinéma deviendra un véritable outil politique.
Les films des cinéastes de la première moitié du vingtième siècle (Eisenstein, Dovjenko, Poudovkine, Vertov, Barnet…), réalisant l’ambition de Lénine « Vous devez toujours garder présent à l’esprit que de tous les arts, c’est le cinéma qui est pour nous le plus important », (3) mettront principalement en images la révolution et les héros historiques.

Le cinéma soviétique sera, à la fois, caractérisé par la glorification de son passé et par son action culturelle auprès de la population au travers de films de grande qualité, de « Ivan le Terrible » à « Au bord de la mer bleue » en passant par « La Terre » ou « L’homme à la camera ».
Autre particularité de ce cinéma : il est tourné vers l’intérieur.
Il faudra, en effet, attendre plusieurs dizaines d’années et la fin de la guerre 40/45 pour que cette cinématographie sorte véritablement de ses frontières et arrive en Occident, essentiellement via les réseaux culturels.
A partir des années 50 et la mort de Staline, commence ce que l’on a appelé « Le dégel du cinéma soviétique » qui mènera peu à peu les réalisateurs russes à créer des films plus personnels ou plus commerciaux, sans réels objectifs de propagande politique.
De la UFA…
Les plus anciens se souviendront sans doute de la puissante arme de propagande qu’était le cinéma du régime nazi.
Dès son accession au pouvoir en 1933, Hitler fonda un département du film qu’il confia à Goebbels son « Ministre de l’Education du Peuple et de la Propagande »(4) qui n’hésitait pas à déclarer « le cinéma est un des moyens de manipulation des masses les plus modernes« . (5).
Il instaura immédiatement une « loi sur le cinéma » qui l’autorisait à régenter l’ensemble de la production cinématographique en fonction des intérêts du régime, tant sur le choix du sujet que sur sa réalisation.
Jusqu’en 1945, plus de 1300 films de long métrage furent produits dans les studios de la UFA (Universum Film AG) – le cinéma allemand est alors, après les USA, le plus important au monde quant au nombre de films produits – dont seulement quelques centaines sont clairement de propagande.
Les scénarios de tous les films étaient contrôlés par un censeur (Reichsfilmdramaturg) pour vérifier leur conformité avec la doctrine nazie et ceux qui ne faisaient pas ostensiblement partie du programme de propagande étaient présentés comme des divertissements.
On verra plus loin que cette stratégie consistant à amalgamer subtilement délassement et discours politique fera des émules aux USA et en Israël.
Côté glorification du régime, on citera « Le Triomphe de la volonté » de Riefenstahl dont les premières images montrent Hitler descendant des cieux pour sauver le peuple allemand (!)

Côté bourrage de crâne raciste, « Le Juif Suss » est l’exemple le plus connu, mais ce sont surtout les films documentaires qui diffuseront l’idéologie nazie dans la population (« Le Juif éternel », « Le Führer offre une ville aux juifs », « Les Rothschild »… etc)
Il est à noter que, contrairement au cinéma soviétique, les films de la UFA seront diffusés à l’étranger et, à partir de 1939, dans tous les territoires conquis.
… à Cinecitta

Beaucoup ignorent encore que les célèbres studios de « Cinecitta », inauguré en 1937 et où furent tournés tant de films célèbres est né de la volonté de Mussolini de créer un cinéma de propagande fasciste qui puisse supplanter les studios de Hollywood.
Dans la même optique, le régime avait déjà créé le Festival de Venise en 1932.
Appliquant une politique similaire à celle de son cousin allemand, le régime fasciste fera produire près de 800 films, dont une centaine ouvertement de propagande… Les autres étant contrôlés par la « Direzione generale per il cinema ».
Les objectifs sont similaires à ceux prônés par le Nazi Goebbels : diffuser une image positive du régime, célébrer les « valeurs fascistes », exalter les opérations militaires, valoriser la « mission civilisatrice » de la colonisation… etc.
On constatera plus loin de bien curieuses analogies avec les buts affichés par d’autres régimes.
Du 7ème de cavalerie à la MPAA
Contrairement aux pays déjà évoqués, aucun « service de la propagande » n’a existé aux USA.
C’était inutile car depuis l’origine de Hollywood et le célèbre « Naissance d’une Nation » de Griffith en 1915, la très grande majorité des films étatsuniens glorifiaient systématiquement les colons européens, créateurs cet Etat.
Rappelons-nous ces westerns dans lesquels de braves pionniers pacifiques se faisaient scalper par les sanguinaires Apaches… Alors que la politique du scalp est une « trouvaille » des envahisseurs qui, pour toucher la « prime », ramenaient ainsi la preuve qu’un indien de plus était allé rejoindre le grand Manitou.
Il faudra attendre près de cinquante ans pour voir apparaître les premiers films présentant les Amérindiens pour ce qu’ils sont, les victimes d’une colonisation inhumaine.

Durant la guerre 40/45, il y aura bien l’un ou l’autre film clairement antinazi (« Le Dictateur », « Casablanca », « Mortal Storm »…) ou anti-japonais (« Prisonniers de Satan ») mais ce sont presque tous des productions indépendantes, pas des initiatives gouvernementales.
C’est seulement après cette guerre que le cinéma des USA deviendra une arme politique par la création de la MPAA (Moving Picture Association of America). (6)
Sous l’égide de la CIA qui venait d’être fondée (1947), une gigantesque chasse aux sorcières est lancée en 1950 par le sénateur McCarthy.
Elle entraînera la condamnation de nombreux acteurs, musiciens, scénaristes…
La liste des victimes va de Léonard Bernstein à Orson Welles, en passant par Luis Bunuel et Charlie Chaplin (7)… Près de cent intellectuels ou artistes!
Ce « maccarthysme » sévira pendant quatre ans. (8)
Il confirme l’assujettissement de la création cinématographique à la censure gouvernementale et permettra à la MPAA d’imposer la loi de l’industrie US dans le monde. Elle contrôlera non seulement les producteurs mais également la distribution et les festivals internationaux.
Plus tard, avec l’arrivée de Jack Valenti à la tête de l’organisation (1966), cette emprise sur le cinéma s’accentuera encore. Durant près de quarante ans, Valenti développera l’exportation du modèle politique étatsunien et s’opposera avec virulence à toutes les idéologies différentes de la sienne.
Quelques « joyeusetés » imposées par ce gardien de l’ordre.
La présence d’un drapeau américain dans un coin du décor de tous les films de Hollywood (hormis dans les péplums et les films de cape et d’épée, évidemment) ne doit rien au hasard… C’est une obligation faite par la MPAA aux producteurs.
Cette mesure est toujours d’actualité.
Autre « joyeuseté » : jusque dans les années 90, la MPAA interdisait aux producteurs de l’Etat de participer aux festivals internationaux qui ne faisaient pas allégeance à la MPAA et ne se soumettaient pas à son règlement.
Comme on le voit, les USA n’avaient pas besoin de créer un office de propagande… leur industrie audiovisuelle avait conquis l’Univers!
… Comprendre la Hasbara.
En hébreu, Hasbara signifie « explication », mais pour un observateur des pratiques israéliennes, il signifie plutôt « propagande ». (9)
En 2005, Nissim Ben Sheerit, alors délégué général du Ministère des affaires étrangères, déclarait “Pour nous la culture est un outil de la Hasbara de premier plan. Pour nous il n’a pas de distinction entre Hasbara et culture.”. (10)
Du cinéma des pionniers à la Croisette
Dès avant même la création de l’Etat – le premier film de propagande date de 1935 (« Avodah »… où on voit les pionniers faire jaillir l’eau du désert) – le cinéma israélien n’a cessé d’être au service de l’idéologie sioniste.
Durant une quarantaine d’années, c’est le modèle soviétique qui sera mis en pratique dans la fabrication des films, surtout documentaires : forger l’identité nationale, glorifier « l’homme nouveau »… etc. Et comme en URSS, la production sera prioritairement destinée à la population locale.
Une première évolution interviendra vers les années 70/80 quand les célèbres cousins Golan et Globus (11) entreprirent d’importer le style hollywoodien et contribuèrent fortement à l’exportation des films.
Plutôt discrète jusque là, la production israélienne sera de plus en plus présente dans les marchés mondiaux de l’audiovisuel (Cannes, Berlin, Los Angeles, Rotterdam…) et se diffusera de mieux en mieux via le « Israël Film Center » et le « Israël Export Institut »
D’une propagande à l’autre
Comme l’a rappelé Limor Livnat, ex-ministre de la culture : « Le cinéma israélien prouve à chaque fois que la culture est la meilleure ambassadrice de l’Etat« .
… Et en 2000 Israël avait bien besoin d’un ambassadeur efficace pour rafistoler son image et tenter de faire oublier l’agression contre le Liban, l’annexion du Golan, l’expansion de l’occupation et des colonies en Cisjordanie, le blocus de la bande de Gaza…
Le général Barak fait alors voter une loi garantissant l’augmentation du budget alloué au cinéma (±13M€) et soutenant la création d’une vingtaine d’écoles de cinéma.
A partir de cette date, la production de films sera de plus en plus orientée vers la promotion du régime sioniste à l’étranger et la ligne de conduite stratégique adoptée pour la fabrication affichera de fortes similitudes avec celle pratiquée par les régimes nazis et fascistes : amalgame de divertissement et de discours politique.
Mais les responsables du « Israël Film Fund » et des divers ministères en charge de la propagande se montreront bien plus subtils et efficaces que les fonctionnaires qui assuraient les orientations de la UFA et de Cinecitta.
Contrairement à des films comme « Le Juif Suss » ou « Il Piloto Regresa », aucun film israélien n’attaquera de front les Palestiniens ou les opposants au régime sioniste.
Pas de diffamation directe, mais réalisation de films, surtout documentaires, propageant une image positive du régime et exaltant les « valeurs » du sionisme… Et escamotant au maximum la réalité du terrain.
Les réalisateurs veilleront aussi à jouer sur l’émotionnel avec des images montrant des Israéliens altruistes ouvrant leurs bras aux “frères arabes”.
Enfin, ils mettront en avant, quand c’est possible, des Palestiniens rejetant la lutte (toujours appelée terrorisme) pour une chaude collaboration avec leurs généreux et pacifiques amis.
… Ou comment faire pleurer dans les chaumières
Le film emblématique de cette nouvelle « ligne directrice » est sans doute « Valse avec Bachir » de Ari Folman, tourné en 2008.
Remarquablement réalisé, le film est centré sur les traumatismes d’un jeune tankiste israélien durant l’opération « Paix en Galilée ».
Ce soldat est tourmenté par les horreurs de la guerre et le massacre des réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila, massacre que le réalisateur attribue à des phalangistes chrétiens « fous ». (12)
Durant tout le film, les morts palestiniens ne sont que des silhouettes fantomatiques et les victimes de la tuerie n’apparaissent que dans la dernière scène où des femmes hurlent de désespoir parmi les décombres et les cadavres.
Il est manifeste que pour le réalisateur, l’horrible carnage est secondaire au regard du drame du pauvre tankiste plein d’humanité, bouleversé par le rôle qu’il a involontairement joué dans cette tragédie.
L’habileté du réalisateur fait que l’émotion évince le drame et que le spectateur est entraîné à ressentir avant tout de la compassion pour le pauvre jeune homme… L’objectif politique est atteint!
Il pleut des films
Sous le gouvernement du général Sharon (2001/2006), la production cinématographique connaît un nouveau développement : accroissement supplémentaire des subventions à la production et signature d’un accord de collaboration avec le gouvernement français et son CNC (centre national du cinéma).
C’est aussi l’époque où les festivals consacrés aux documentaires commencent à être inondés de films israéliens… Et que les programmateurs consciencieux et intègres commencent à éprouver des difficultés à identifier ceux qui sont déontologiquement acceptables.
Ainsi, d’année en année, le financement du cinéma s’est accru au point de devenir énorme pour un Etat de la taille d’Israël.
Les subventions pour “booster” la production cinématographique, surtout des documentaires, proviennent de diverses sources (Fonds publics, Fondations, Entreprises…) et sont estimées aujourd’hui à ± 30 millions € par an.
C’est sans commune mesure avec les montants des aides au cinéma dans des pays comme la Belgique, les Pays-Bas ou la Suède.
Ces investissements font aussi que le pays compte actuellement plus de 120 sociétés de production qui réalisent près de 400 heures de films (fictions, documentaires et dessins animés) par an diffusés à travers le monde.
Suivant les circonstances, des budgets supplémentaires sont investis.
Exemple récent : Jérusalem et la “judaïsation” des quartiers Est.
En 2014, le gouvernement et la mairie de Jérusalem ont décidé de coupler leurs efforts et débloquent 6,3 millions $ pour réaliser des films favorables à la politique du régime à Jérusalem.
Ce montant est, évidemment, en surplus des autres subventions.
Le Brand, les militants, les pharisiens et les idiots utiles
En 2010, les services de la Hasbara relancèrent l’opération « Brand Israël » en réponse à l’amplification des condamnations internationales après l’opération « Plomb durci » qui fit plus de 1.300 morts dans la population palestinienne… dont plus de 250 enfants.
Le ravalement de l’image était urgent!
La principale activité de cette nouvelle campagne de relations publiques consistera à fabriquer des produits ou à réaliser des événements valorisant Israël, bien sûr… Mais en les présentant comme autonomes, déconnectés des réalités: « Nous faisons du commerce, pas de politique! Ç’est de la culture… Rien à voir avec la guerre! »
Ce « Brand » sera largement financé et bénéficiera du réseau des ambassades, des organismes commerciaux et des associations sionistes qui seront mobilisées pour mettre sur pied des conférences, des expositions, des rencontres commerciales, des concerts… présentés comme des initiatives citoyennes.
Pour casser l’image négative du régime sioniste et, si possible, décrédibiliser les opposants, les responsables israéliens iront jusqu’à soutenir de soi-disant associations de lutte contre l’antisémitisme… fondées par des sionistes racistes qui insultaient « Ce sont des chiens! » les pacifistes du « Mavi Marmara » (13) qui avaient tenté de briser le blocus de Gaza.
En résumé, on assiste depuis quatre ans – avec une accélération après les exactions de « Bordure protectrice » à Gaza en 2014 – à une mobilisation des forces sionistes de droite extrême pour tenter de manipuler l’opinion publique occidentale.
La campagne vise également la communauté juive avec des discours alarmistes amalgamant « Juif européen = Israélien »… Sans oublier d’étiqueter « antisémite » quiconque ose dénoncer les crimes du régime de M. Netanyahu.
Pour ce qui est du cinéma, la tentative de conquête des festivals n’ayant pas vraiment produit les effets espérés, les services de la Hasbara mirent une nouvelle initiative au point : organiser directement des festivals via les groupes locaux.
C’est ainsi que des « Semaines du Cinéma » ont récemment été organisées dans de nombreuses villes européennes avec le soutien financier des ambassades.
Il faut reconnaître que la tactique mise au point est d’une grande habileté.
Tout est mis en œuvre pour dédouaner ces festivals de la moindre intention de propagande.
On intitule, par exemple, le festival « cinéma juif » alors qu’il n’y a pas le moindre film concernant la culture ou la religion juive, mais essentiellement des productions à la dévotion du régime.
Deux exemples de films, parmi des centaines d’autres, de cette propagande « soft ».
“Le Prince Vert” trace le parcours d’un des fils d’un chef du Hamas qui refuse le « terrorisme », collabore avec le Shin Bet (sorte de CIA israélienne) et finit par se convertir au christianisme.
“Dancing in Jaffa” est le portrait d’un vieux professeur de danse qui fait se rencontrer et danser ensemble enfants israéliens et israélo/palestiniens.
Ce « Dancing in Jaffa » est un remarquable modèle de cette propagande qui avance masquée.
Medallia, la réalisatrice américaine, sioniste pur jus et grande admiratrice des cousins Golan/Globus (14) a fait venir spécialement des USA ce vieux monsieur si sympathique et émouvant pour la réalisation de cette si émouvante rencontre d’enfants, tous Israéliens (israélo-juifs et israélo-musulmans) — les enfants palestiniens de Jérusalem-Est, de Cisjordanie ou de Gaza, n’ont pas été invités — qui ne peut que susciter la compassion et embuer les yeux.
Après le tournage et la tournée de promotion du film, le vieux monsieur si sympathique est rentré chez lui, à New York.
… Et, quand ce genre de manifestation est critiquée par les sympathisants de BDS (15), les organisateurs jouent les victimes naïves ou les autruches, et font mine d’ignorer qu’il existe de nombreux cinéastes israéliens et israélo/palestiniens qui refusent de collaborer avec cette croisade d’intoxication et produisent des films de qualité racontant la vie et la réalité politique de leur pays. (16)
C’est les films de ces réalisateurs-là que tout festival qui se veut intègre choisit de programmer!
… Mais la Hasbara ne manque pas de ressources supplémentaires pour contrecarrer les critiques.
Il y a d’abord certains sionistes occidentaux, se disant « progressistes et militants pour la paix », qui montent aux créneaux pour inciter leur entourage et la communauté locale à soutenir ces festivals.
Ce sont les mêmes qui dès qu’un choix déontologique se présente à eux, s’empressent de trouver des excuses au régime israélien, la justice et le droit pour les Palestiniens passant au second plan.
Il y a du cul-bénit et de la « Dame patronnesse » dans cette attitude, non?
La machine à décerveler est puissante et perverse, au point que des militants actifs dans la défense des Droits de l’Homme se sont parfois laissés endormir par cette propagande hypocrite.
C’est un peu désolant pour leurs amis et pour les « lanceurs d’alerte ».
Dans ces temps difficiles pour l’information et l’esprit critique, où la lutte contre le racisme est quotidienne, cette époque où les cours et tribunaux ont de plus en plus tendance à être au service des puissants, où l’idéologie de « la bête immonde » (17) ressurgit… la vigilance des citoyens est primordiale.
Cela vaut aussi pour les acteurs du monde culturel.
Rudi Barnet
Ancien expert pour l’audiovisuel du Ministère de la Culture de la Communauté Wallonie-Bruxelles
Ancien Directeur du Festival International de Cinéma de San Sebastian
(21 décembre 2014)
Notes
1.- Marc Bloch L’étrange défaite, Gallimard, 1990
2.- Dans « New York Times » du 31/1/1937
3.- Sovietskoïé Kino [Le Cinéma soviétique]. n° 1-2, 1933, p. 10
4.- Antisémite et antichrétien, il joua un rôle moteur dans les persécutions contre les Juifs allemands.
5.- Dans « propagande-par-le-cinema.over-blog.com
6.- Initiative du « Département d’Etat », la mission de cette association, créée en 1945, est de favoriser l’exportation des films américains, faire la promotion du « American way of life » et s’opposer à la propagation de l’idéologie communiste.
7.- Chaplin fut même obligé de s’exiler. Il ne reviendra aux Etats-Unis que vingt ans plus tard.
8.- Incité par la CIA et McCarthy, Hollywood produira de nombreux films anti-communistes durant cette période, notamment pendant la guerre de Corée.
9.- A propos de la « Hasbara », Noam Chomsky proclamait ironiquement « la position d’Israël étant toujours juste quelle que soit la question considérée, il est seulement nécessaire de l’expliquer« . (Pirates and Emperors, Old and New: International Terrorism in the Real World, South End Press, 2002, p. 182.)
10.- Yuval Steinitz, le Ministre actuellement en charge de ce département est l’ancien président du « Sous-comité pour l’intelligence et les services secrets »… Il n’y a pas de hasard.
11.- Leur « Cannon Group », produisit un grand nombre de films de « série B » (Chuck Norris, Sylvester Stallone, Jean-Claude Van Damme…) et lança la vague des films « ninjas ».
12.- Ce massacre prémédité de civils dans deux camps de réfugiés au Liban en 1982 fit plus de 2.000 morts, dont un grand nombre de femmes et d’enfants. La tuerie est le fruit d’une collaboration entre les phalangistes (fascistes) libanais et les troupes du général Sharon, surnommé « Le Boucher » par les Palestiniens. Sharon recevra un blâme de ses pairs et devra quitter ses fonctions pour un court moment… Nommé Ministre l’année suivante (Lire la résolution de l’ONU 37/123 du 16/1282)
13.- 700 pacifistes de 42 pays, dont Mairéad Maguire, Prix Nobel de la Paix et l’écrivain suédois Henning Mankell, se trouvaient à bord de ce bateau qui fut arraisonné dans les eaux internationales par un commando israélien qui tua 9 passagers.
14.- La même année (2014) elle réalise « The Go-Go Boys » en hommage à ces deux grands militants du projet sioniste.
15.- « Boycott, désinvestissement et sanctions » est une campagne lancée par 171 organisations non-gouvernementales palestiniennes pour, entre autres, obliger Israël à respecter le Droit International, de mettre fin à sa politique d’apartheid et d’arrêter l’occupation.
16.- Quelques noms : Emad Burnat, Eyal Sivan, Keren Yedaya, Maryse Gargour, Guy Davidi, Jonathan Ben Efrat, Shira Geffen, Yoav Shamir, Ronit et Shlomi Elkabetz, Simone Bitton, Mohammad Bakri, Scandar Copti, Yotam Feldman, Michel Khleifi…Tant d’autres.
17..- « Le ventre est encore fécond, d’où a surgi la bête immonde » (Berthold Brecht dans « La Résistible Ascension d’Arturo Ui »)