Tunisie : l’annonce du remaniement est repoussée


mercredi 26 janvier 2011, par La Rédaction

La pression de la rue augmente, l’annonce du remaniement ministériel est repoussée. Initialement prévue pour la journée de mercredi 26 janvier, elle devrait finalement intervenir « à une heure tardive » mercredi voire « jeudi matin » a déclaré le ministre du développement régional. L’agence de presse Reuters qui cite des sources politiques avance même les ministères concercés : l’intérieur, la défense et les affaires étrangères.
Mercredi, à Tunis, la sécurité a été renforcée près du siège du premier ministre où des centaines de manifestants ont campé sur place pour réclamer la démission du gouvernement de transition. Les forces de sécurité ont bloqué à l’aide de barbelés les accès principaux de la Casbah, l’esplanade de la capitale où se situent les bureaux du premier ministre et de plusieurs ministères. Des policiers anti-émeutes ont pris position alentour. Dans la matinée, la police a tiré des grenades de gaz lacrymogène contre des manifestants qui voulaient forcer un barrage et qui leur jetaient des pierres.
Dans l’après-midi, les autorités ont cependant annoncé un allègement du couvre-feu. Selon l’agence officielle TAP, « en raison d’une amélioration de la situation sécuritaire », le couvre-feu sera en vigueur de 22 heures à 4 heures, remplaçant la précédente interdiction de circuler qui courait de 20 heures à 5 heures.
« A bas le gouvernement ! » Quelques centaines de manifestants qui ont dormi sur place au mépris du couvre-feu chantaient des slogans sous les fenêtres du premier ministre, Mohamed Ghannouchi. « Nous avons une seule demande : que le gouvernement tombe, ils doivent tous partir, Ghannouchi le premier », a déclaré l’un d’eux. « Il faut nettoyer les restes de l’ancien gouvernement. Ce gouvernement est celui du 7 novembre », date du coup d’Etat de 1987 qui avait porté au pouvoir Zine El-Abidine Ben Ali, en fuite depuis le 14 janvier en Arabie saoudite.
La fermeture des principaux accès à la Casbah par les forces de sécurité, qui ont tenté ainsi d’empêcher le ravitaillement en couvertures et nourriture des manifestants, dont de nombreux provinciaux issus de l’intérieur déshérité du pays, a suscité de l’irritation. « Vous voulez nous affamer, vous voulez nous assiéger », a lancé aux forces de l’ordre un homme venu de Sfax, à 270 km au sud de Tunis.
A Sfax, la deuxième ville de Tunisie, la grève générale a commencé mercredi avec « le débrayage de milliers de travailleurs de tous les secteurs », selon l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT). Les grévistes ont commencé à se rassembler devant le siège régional de la centrale syndicale pour demander la dissolution du gouvernement de transition, à l’appel de la centrale. « On va également demander pendant la marche la dissolution du RCD et dénoncer l’information officielle qui s’attaque à l’UGTT », a indiqué un membre du syndicat.
La centrale syndicale a joué un rôle important dans l’organisation des manifestations de la « révolution du jasmin » qui ont abouti à la chute du régime. Elle pèse aujourd’hui fortement dans le mouvement de protestation qui réclame le départ des membres de l’équipe de Ben Ali qui occupent les postes-clés du gouvernement de transition.
L’UGTT accuse des nostalgiques du président déchu d’attaquer ses locaux. « Des miliciens et des bandes de malfaiteurs liés à l’ancien régime se sont attaqués, mardi, aux sièges régionaux de Gafsa, Kasserine, Béjà, Monastir et Mehdia », a déclaré Iffa Nasr, porte-parole de la centrale syndicale. Selon lui, les assaillants étaient armés de gourdins, de pierres, d’armes blanches et de chaînes. « Ils ont saccagé les locaux et blessé des syndicalistes à Gafsa », a-t-il affirmé. « Mardi, des inconnus ont tenté d’attaquer à Gafsa le siège régional de l’UGTT, mais l’armée est intervenue pour protéger le bâtiment, qu’elle a dégagé en tirant en l’air », a indiqué Ammar Ben Amroussia. « Des bandes de malfaiteurs composées d’hommes d’affaires liés à l’ancien régime et de cadres du Rassemblement constitutionnel démocratique ont attaqué les syndicalistes à l’intérieur du siège régional syndical », a affirmé ce syndicaliste.
L’UGTT a d’ores et déjà appelé à une « grève générale » jeudi à Sidi Bouzid, foyer de la révolution qui a provoqué la chute du président Ben Ali, pour exiger la démission du gouvernement de transition.

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Mandat d’arrêt international contre Ben Ali

La justice tunisienne a lancé un mandat d’arrêt international contre le président déchu Zine El Abidine Ben Ali, réfugié en Arabie Saoudite, ainsi que contre son épouse Leïla Trabelsi, a annoncé mercredi le ministre de la Justice Lazhar Karoui Chebbi.
L’ancien président et son épouse sont poursuivis pour « acquisition illégale de biens mobiliers et immobiliers » et « transferts illicites de devises à l’étranger », a précisé le ministre, au cours d’une conférence de presse.
Le président Ben Ali a fui le 14 janvier la Tunisie, sous la pression d’une révolte populaire sans précédent, et a trouvé refuge en Arabie Saoudite. Son épouse Leïla, honnie par la population pour avoir mis le pays en coupe réglée, a également quitté le pays, à une date et pour une destination inconnues.

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Les tensions entre manifestants et policiers antiémeutes restent vives

La police antiémeutes tunisienne a tiré mercredi des grenades de gaz lacrymogène sur des manifestants qui tentaient de forcer un barrage bloquant un accès à l’esplanade où se situent les bureaux du Premier ministre. Ces incidents se sont produits alors que le gouvernement de transition doit annoncer dans la journée un remaniement pour tenter d’apaiser la colère des milliers de manifestants qui protestent chaque jour à Tunis contre la présence en son sein de nombreux caciques de l’ancien régime Ben Ali. Les policiers ont tiré des grenades lacrymogènes contre un groupe de manifestants qui avaient arraché à mains nues un premier barrage de fils de fer barbelés et leur jetaient des pierres, afin de les repousser.
De plus en plus nombreux, des jeunes ont alors bombardé de projectiles les policiers, qui ripostaient avec des gaz, sans affrontement direct. L’armée, qui s’était interposée la veille lors de heurts entre policiers et manifestants, restait passive. Les forces de l’ordre avaient installé dans la matinée des barrages bloquant l’accès à l’esplanade de la Kasbah où, pour la troisième nuit consécutive, des centaines de personnes, dont de nombreux jeunes venus des régions contestataires et déshéritées du centre du pays, ont dormi sous les fenêtres des bureaux du Premier ministre Mohamed Ghannouchi, bravant le couvre-feu.
« À bas le gouvernement ! » scandaient dès 9 heures ces manifestants, qui ont promis de rester sur place jusqu’à la chute du gouvernement. « Nous avons une seule demande : que le gouvernement tombe, ils doivent tous partir, Ghannouchi le premier », a déclaré à l’AFP Bassem el-Barouni, un jeune Tunisien ayant dormi sur place. « Il faut nettoyer les restes de l’ancien gouvernement. Ce gouvernement est celui du 7 novembre », date du coup d’État qui avait porté au pouvoir le président déchu Zine el-Abidine Ben Ali en 1987, a estimé Hamid el-Ghribi.
La fermeture des principaux accès à la Kasbah par les forces de sécurité, qui ont gêné le ravitaillement en couvertures et nourriture des manifestants, suscite la colère. « Vous voulez nous affamer, vous voulez nous assiéger », a lancé aux forces de l’ordre Hamid el-Gribi, un Tunisien venu de Sfax, à 270 km au sud de Tunis. « Vous nous enfermez comme des singes », se plaignait un jeune homme.

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Paris était « parfaitement informé des dérives du système Ben Ali » , selon un ex-ambassadeur

L’ex-ambassadeur de France en Tunisie Yves Aubin de La Messuzière affirme que « les autorités politiques françaises » étaient « parfaitement informées des dérives du système Ben Ali » et que l’expertise des diplomates a été « négligée », dans une tribune publiée mercredi dans Libération.
Lundi, Nicolas Sarkozy a déclaré que la France avait « sous-estimé (les) aspirations du peuple tunisien à la liberté », faisant ainsi un mea culpa après avoir été très critiqué pour n’avoir lâché l’ex-président tunisien Zine El Abidine Ben Ali qu’après sa chute le 14 janvier.
« Les autorités politiques françaises étaient (…) parfaitement informées des dérives du système Ben Ali, qui rejetait toute référence à la question des droits de l’Homme », écrit l’ancien diplomate, en poste en Tunisie entre 2002 et 2005. « L’expertise du Quai d’Orsay, marginalisé depuis 2007, était négligée », accuse-t-il.
« Au cours de la décennie passée, les analyses de notre ambassade à Tunis et celles du Quai d’Orsay soulignaient régulièrement la dégradation des libertés publiques et la répression qui touchait les associations et les organisations non gouvernementales », affirme encore Yves Aubin de La Messuzière.
Selon l’ancien directeur Afrique du Nord et Moyen-Orient au ministère des Affaires étrangères (1999-2002), « les rapports diplomatiques mettaient aussi l’accent sur l’exaspération et le mal-être de la jeunesse tunisienne », ainsi que sur « la prévarication et le développement d’un système de prédation du secteur privé de l’économie par le clan Trabelsi ».
« L’analyse diplomatique privilégiait le risque de mouvements sociaux à la menace islamiste », affirme-t-il encore.
Yves Aubin de La Messuzière juge que « les premières déclarations françaises, au lendemain de la chute de Ben Ali, n’ont pas été à la hauteur ». Il rappelle en outre que les propos de Nicolas Sarkozy au cours de sa visite en 2008 à Tunis, où il s’était félicité « des progrès de l’espace des libertés publiques, avaient suscité l’imcompréhension et l’indignation ».
Il conclut qu’ »un effort important est nécessaire pour rétablir la confiance » avec la Tunisie.

(Mercredi, 26 janvier 2011 – Avec les agences de presse) source

Pour une Belgique en pointe


Messieurs,
Après avoir participé à la marche « Shame », campé virtuellement au « Camping16 » et laissé pousser ma barbe à la Poelvoorde, je vous envoie, ci-joint, un article intitulé « Pour une Belgique en pointe » que j’espère bien voir publié dans mon quotidien préféré de toujours, LLB.
Il est grand temps, en effet, de mettre au pouvoir l’imagination de toutes les compétences de notre cher pays pour sortir la politique belge de l’ornière dans laquelle elle s’est profondément enlisée.
Je souhaite diffuser au maximum cette idée d’innovation et de réforme progressive, en douceur et selon le bon sens qui nous est propre. La Belgique, qui est « en pointe  » dans plusieurs domaines, devrait également l’être en politique, d’autant plus qu’elle occupe cette position géopolitique privilégiée au carrefour des cultures européennes et est de facto la capitale de l’Europe.
Je compte sur vous.
Bien cordialement
Philippe Grell

Réponse : Cher Monsieur,

Nous vous remercions de nous avoir fait part de vos considérations. Celles-ci ne peuvent faire l’objet d’une publication car nous manquons de place. Néanmoins, vos réflexions alimentent la nôtre.

Bien à vous,
LA LIBRE
LA REDACTION

Comme j’ai de la place, merci wordpress, je reproduis ici l’article de Monsieur Grell

Innover. Pas par plaisir, mais par nécessité. L’expérience du fédéralisme d’union à 3 régions territoriales et 3 communautés linguistiques n’a toujours pas réussi et a atteint ses limites. Elle a mené à l’incompréhension, à l’affrontement, à la surenchère. Elle n’arrive plus à former un gouvernement dans des délais normaux. Bref, elle divise au lieu d’unir ! Elle menace même de mener au séparatisme et de se passer de la royauté ! En sciences appliquées, lorsqu’une expérience ne réussit pas dans un délai raisonnable, on ne s’en-tête pas et on tente autre chose en tenant compte des connaissances acquises lors de l’échec ! Pourquoi en se-rait-il autrement en sciences politiques ?

La grande erreur de cette expérience est de ne pas avoir fourni à la population belge l’outil pratique de compréhension des différences linguistiques et culturelles : le bilinguisme dès la naissance ! Et ensuite, la possibilité d’une instruction multilingue et multiculturelle comme dans les écoles européennes. On a ainsi galvaudé une grande richesse potentielle et les bien-faits d’une situation géopolitique exceptionnelle au cœur de l’Europe : la culture germanique et la culture latine. Nos représentants politiques ont en effet opté pour le contraire ; ils ont défendu et favorisé la langue unique. La scission catastrophique des partis selon un critère purement linguistique, et somme toute simpliste, a fourni un exemple désastreux à la population. Ils ne se parlaient plus dans une même famille politique !

La force de l’union est devenue faiblesse et vulnérabilité de la division : une frontière linguistique honteuse, une scission lamentable bien que nécessaire de l’Université de Lou-vain, une instruction bilingue pour nos enfants devenue illégale, des médias ne couvrant plus qu’une partie du pays et défendant un monolinguisme forcené. Est ensuite venue la rage de tout diviser entre deux langues, y compris l’Institut Royal des Sourds et Muets de Woluwe-Saint-Lambert !
Il est donc temps d’innover, sous peine de disparaître, même si il est inconfortable de changer ses habitudes. Mais comment innover en douceur et en ménageant les transitions ? C’est aux spécialistes et chercheurs en sciences politiques que ce travail incombe. Mais on peut toujours réfléchir à la question et avoir quelques idées. La première est certes de créer au niveau fédéral une circonscription électorale unique, nationale, à partis politiques bilingues unifiés. Une autre, est de simplifier au maximum la décentralisation du pouvoir vers les régions en évitant les conflits de compétence, d’intérêts et les interventions multiples. Mais a t-on vraiment besoin d’une structure aussi lourde et confuse que celle que nous connaissons actuellement : des Parlements et Gouvernements régionaux comme dans des états souverains ?

En attendant que les 3 régions du pays deviennent bilingues, ne pourrait-on pas comprendre qu’en allant s’installer dans l’une d’elles, il y a lieu de faire un effort linguistique et de compréhension, notamment vis-à-vis de l’administration et des habitants d’origine comme si on allait vivre à l’étranger ? Des associations de traducteurs, bénévoles ou non, pourraient aussi voir le jour pour favoriser cette intégration en douceur.
En ce qui concerne la démocratie. Ne devrait-on pas favoriser le renouvellement plus fréquent de nos représentants en stimulant le départ des anciens, en facilitant l’accès aux jeunes et en limitant la durée des mandats (à 15 ou 20 ans par exemple) ?

Ne devrait-on pas décourager davantage leurs cumuls ? La représentation politique de la population d’un pays est-elle vraiment une carrière en soi ou bien plutôt une mise à disposition temporaire de compétences diverses pour le bien supérieur d’un état ? Le pouvoir démocratique n’est-il pas par essence un pouvoir ouvert à tous mais à durée limitée et pas une affaire de famille transmise par héritage ? Les 3 pouvoirs indépendants doivent être contrôlés et le sont. Mais le contrôle du pouvoir législatif par l’électeur n’est-il pas un leurre dès lors que ce dernier est aussi mal informé qu’il l’est actuellement et manque de choix ? Malgré l’énorme essor technique des médias, le contenu de l’information manque de transparence et les désirs de la population ne sont pas rencontrés : soit qu’on ne la consulte pas correctement (référendum ?), soit qu’on ne tienne pas compte de ses avis, soit qu’on la manipule.

Il reste de plus les défauts chroniques souvent dénoncés de particratie et d’électoralisme. Il doit être possible d’y remédier au moins dans une certaine mesure, mais nous ne voyons rien venir. Les spécialistes ne pourraient-ils pas faire travail utile en la matière ?

Concernant la bonne gouvernance. Ne serait-il pas temps de moderniser un peu ces notions devenues désuètes d’opposition gauche, droite ; cœur ou portefeuille ? Dans l’état actuel de dépendance planétaire et européenne, aucun parti politique n’a plus de grande marge de manœuvre. Tous ne se retrouvent-ils pas au centre et obligés d’utiliser la conjonction grammaticale « et » au lieu de « ou » ? Il faut à la fois avoir la volonté d’entreprendre et celle de faire fonctionner les administrations, prendre des risques calculés et gérer les affaires courantes, rémunérer le capital et aussi le travail, faire des bénéfices et alimenter la sécurité sociale. Le tout est un équilibre délicat qui n’admet plus ni l’étatisation, ni la thésaurisation, ni la spéculation inconsidérées. La différence des partis réside plus dans les priorités et les moyens mis en œuvre que dans leurs programmes proprement-dits. Ce sont les réalisations promises qui seront sanctionnées par l’électeur. Mais la sanction ne sera correcte que si l’information l’est. Et elle est actuellement déficiente certaine-ment au niveau des votes de préférence.

En ce qui concerne le travail. Après des délocalisations massives, le refus de certains travaux par nos nationaux, la concurrence effrénée dans certains secteurs, l’accès des femmes à toutes les professions, bien des choses sont à revoir dans le milieu du travail et celui de la famille. A commencer par les ambiances de travail qui laissent à désirer un peu partout. Là aussi, il s’agit d’une question pour spécialistes. Mais on peut se demander si, pour une meilleure éducation des jeunes, le choix possible par les parents d’un travail à mi-temps, à salaire cumulé suffisant, ne serait pas une solution d’avenir à étudier. D’autre part, comme nous avons énormément vendu de valeur ajoutée à l’étranger et qu’il ne nous reste pratiquement plus que notre matière grise et certaines fabrications très spécialisées, ne serait-il pas urgent d’investir davantage dans les écoles et universités, centres de recherches et laboratoires ?
Il est grand temps, à notre humble avis, de mettre au pouvoir l’imagination de toutes les compétences de ce cher pays pour sortir la politique belge de l’ornière dans laquelle elle s’est profondément enlisée. Progresse enfin la politique belge !

Philippe Grell, Ing. Civil

«GAZA-STROPHE, PALESTINE»


EXCEPTIONNELLEMENT

Jeudi 27 janvier à 21 heures 30,

au cinéma l’Arenberg,

26 Galerie de la Reine – 1000 Bruxelles

Attac-Bruxelles et l’Association Belgo-Palestinienne

vous invitent à l’avant-première de

«GAZA-STROPHE,

PALESTINE»

de Samir ABDALLAH et Khéridine MABROUK

Version cinéma (100 min) du film « Gaza-Strophe, le jour d’après »

Un film incroyable sur la guerre menée,

22 jours durant, contre la population palestinienne…

Une formidable enquête établissant la responsabilité incontestable d’Israël pour crimes commis contre l’Humanité.

Un reportage-choc qui vient d’obtenir, coup sur coup,

le Prix international du documentaire méditérranéen

et le Grand Prix «France TV»

«««

Dès 20 heures 30 précises,

LE GRAND DÉBAT:

« LA VÉRITÉ EN FACE…? »

avec, notamment,

Samir ABDALLAH

le réalisateur du film

Fatima EL MOURABITI

qui a participé à la flottille Free Gaza

dont l’arraisonnement, le 31 mai,

a causé la mort de 9 personnes,

et Henri WAJNBLUM

de l’Union des Progressistes Juifs de Belgique

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«EXTERMINEZ TOUTES LES BRUTES…»

Samedi 27 décembre 2008. La dernière attaque en date est lancée contre des Palestiniens sans défenses. Elle a été minutieusement préparée, depuis plus de six mois selon la presse israélienne. Le plan comprend deux aspects, l’un militaire et l’autre de propagande. Il est basé sur les leçons de l’invasion israélienne du Liban en 2006, mal programmée et peu «expliquée» au public.

On peut donc être certains que ce qui a été fait, cette fois, l’a été intentionnellement. Ainsi en est-il sûrement du moment de l’agression : un peu avant midi, quand les enfants sortent de l’école et que la foule s’affaire dans les rues de Gaza densément peuplée. Quelques minutes suffiront pour tuer plus de 225 personnes et en blesser 700. Début de bon augure au massacre en masse de civils sans défense, pris au piège dans une petite cage, sans moyen d’en échapper.

Dans sa rétrospective «L’inventaire des gains de la guerre à Gaza», le correspondant du New York Times Ethan Bronner a classé cet acte comme une réussite remarquablement significative. Israël a anticipé l’avantage de paraître «devenir fou» en causant une terreur totalement disproportionnée, doctrine qui remonte aux années 1950. «Les Palestiniens à Gaza ont reçu le message dès le premier jour, écrit Bronner, quand les avions de guerre d’Israël ont frappé d’un coup de multiples cibles au beau milieu d’un samedi matin. Environ 200 habitants furent tués instantanément, terrifiant le Hamas et bien sûr tout Gaza». La tactique du «devenir fou» semble avoir porté ses fruits, conclut Bronner : «Les Gazaouis ressentent tellement de douleur qu’ils ne soutiendront plus le Hamas», gouvernement qu’ils ont pourtant librement élu.

BAS DE PAGE. Dans les annales criminelles du couple Israël-Etats-Unis, cette cruauté et ce cynisme ne méritent pas même une note de bas de page. C’est trop courant. Pour citer un parallèle significatif: en juin 1982 l’invasion israélienne du Liban, avalisée par les Etats-Unis, commença par le bombardement des camps de réfugiés palestiniens de Sabra et Shatila, qui devinrent ensuite les symboles des terribles massacres supervisés par les Forces de «Défense» israéliennes. Le bombardement toucha l’hôpital local et tua plus de 200 personnes, selon le témoignage d’un universitaire américain. Cette boucherie fut l’acte d’ouverture d’une hécatombe qui extermina quelque 20.000 civils et détruisit la plus grande partie du Sud Liban ainsi que Beyrouth, avec le soutien militaire et diplomatique des Etats-Unis.

Tout cela est normal et commenté assez ouvertement par de hauts dignitaires israéliens. Il y a trente ans, le chef d’état-major Mordechai Gur observait que depuis 1948 «nous avons combattu une population habitant des villages et des villes». Ou, résumé par le plus notoire des analystes militaires israéliens Zeev Schiff, «l’armée israélienne a toujours, délibérément et consciemment visé les populations civiles…; l’armée n’a jamais distingué les cibles civiles [des militaires…mais] intentionnellement attaqué des objectifs civils». Les raisons furent expliquées par l’éminent homme politique Abba Eban : «Il y avait un but rationnel, atteint en définitive, de toucher les populations civiles afin qu’elles exercent une pression pour l’arrêt des hostilités». Le résultat, comme l’avait bien compris Eban, devait permettre à Israël de mettre en œuvre sans obstacles son plan d’expansion illégale et de répression brutale. En fait, Eban commentait l’analyse développée par le premier Ministre Begin concernant les attaques promues par le gouvernement travailliste contre des cibles non militaires; Begin, selon les mots d’Eban, donnait une image d’Israël «infligeant sans raison la mort et l’angoisse à des populations civiles, comme le firent des régimes que ni Menahem Begin ni moi n’oserions appeler par leur nom». Il faut dire qu’Eban ne contestait pas les faits qu’analysait Begin, mais le critiquait de les exposer publiquement.

Ces «détails», bien que mineurs, nous apprennent néanmoins quelque chose sur nous-mêmes et nos clients. Comme d’autres détails. Par exemple, quand la dernière agression américano-israélienne sur la bande de Gaza a commencé, un petit bateau, la Dignité, faisait route de Chypre vers Gaza. A bord, les médecins et les militants des droits de l’Homme avaient l’intention de briser le blocus criminel imposé par Israël et d’apporter de l’aide médicale à la population emprisonnée. Le navire a été intercepté dans les eaux internationales par la marine israélienne qui l’avait déjà sévèrement percuté, le coulant presque, mais il a réussi à se traîner jusqu’au Liban. Israël a publié ses mensonges ordinaires, réfutés par les journalistes et les passagers à bord, y compris le correspondant de CNN Karl Penhaul voire l’ancien représentant des États-Unis et candidat présidentiel du Parti Vert, Cynthia McKinney. Un crime grave néanmoins passé, sans attirer beaucoup l’attention.

Pourtant, ce manque d’attention a du sens. Pendant des décennies, Israël a détourné des bateaux dans les eaux internationales entre Chypre et le Liban, tuant ou enlevant leurs passagers, les transférant parfois dans des prisons en Israël, y compris des prisons secrètes ou chambres de torture, les détenant en otages pendant de nombreuses années. Étant donné que ces pratiques sont courantes, pourquoi traiter ces nouveaux crimes autrement qu’avec un bâillement?

Les nouveaux crimes que les Etats-Unis et Israël ont commis dans la bande de Gaza ne rentrent pas facilement dans une catégorie standard, sauf dans une catégorie des plus familières. Littéralement, ces crimes relèvent de la définition officielle relevée par le gouvernement nord-américain de ce qu’il faut entendre par «terrorisme», mais cette désignation ne rend pas compte de leur énormité.

AUTORITES RABBINIQUES. D’autant que les délires des dirigeants politiques et militaires israéliens sont éminemment bénins si on les compare aux prêches mystiques et sidérés émis par les autorités rabbiniques. Ce ne sont pas des personnalités marginales. Au contraire, elles sont très influentes dans l’armée ainsi que chez les colons, et ont un immense impact émotionnel. Les soldats, combattant dans le nord de Gaza, ont ainsi été gratifiés d’une visite «charismatique» de deux grands rabbins, qui leur ont expliqué qu’il n’existe pas d’ «innocents» à Gaza, que tout le monde y est donc une cible légitime, en citant un célèbre passage des Psaumes priant le Seigneur de saisir les enfants des oppresseurs d’Israël et de les jeter contre les rochers. Les rabbins ne marchaient pas en terre inconnue. Un an plus tôt, comme le rapporte le Jérusalem Post, l’ancien chef rabbin Séfarade a écrit au Premier ministre Olmert, l’informant que tous les civils dans la bande de Gaza sont collectivement coupables des tirs roquettes, ainsi il n’y a «absolument aucune interdiction morale au massacre aveugle de civils pendant une éventuelle offensive militaire massive sur la bande de Gaza visant à arrêter les tirs de fusées». Son fils, grand rabbin de Safed, a surenchéri : «S’ils ne s’arrêtent pas après que nous en ayons tué cent, alors nous devons en tuer mille, et s’ils ne s’arrêtent pas après mille, alors nous devons en tuer dix mille. S’ils ne s’arrêtent pas, nous devons en tuer cent mille, même un million. Ce qu’il faudra pour les faire cesser». Il s’ensuit que tout Palestinien, ou quiconque se trouve sur le chemin de l’impitoyable armée du Saint État, est soit un terroriste soit une victime accidentelle de ses justes crimes.

Qui plus est, le moment de l’invasion de Gaza aura vraisemblablement été influencé par les prochaines élections israéliennes. Dès les premiers jours du carnage, le commentateur israélien Ran HaCohen a calculé qu’Ehud Barak (lequel reculait fortement dans les sondages) a gagné un siège au Parlement pour 40 morts Arabes.

FATAH-HAMAS. Quelle a été la vraie raison de l’attaque israélienne? Nous n’avons pas d’éléments de preuve sur les plans d’Israël, mais nous savons que le raid est intervenu peu avant des entretiens prévus entre le Fatah et le Hamas au Caire, visant à «aplanir leurs divergences et à créer un gouvernement unifié», signalait le correspondant britannique Rory McCarthy. Ce devait être la première rencontre Fatah-Hamas depuis la guerre civile de juin 2007 qui a donné le contrôle de la bande de Gaza au Hamas, et cela aurait été une étape importante pour la diplomatie. Israël a une longue histoire de provocations en vue de dissuader la menace diplomatique, certaines ayant déjà été mentionnées. Ceci en est sûrement une autre.

Une des voix les plus sages en Israël, celle d’Uri Avnery, dit qu’après la victoire militaire israélienne, «une cicatrice restera dans la conscience du monde, l’image d’un monstre taché de sang, Israël, prêt à chaque instant à commettre des crimes de guerre et à refuser toute contrainte morale. Cela aura de graves conséquences pour notre futur, notre position dans le monde et nos chances de parvenir à la paix et au calme. En fin de compte, cette guerre est aussi un crime contre nous-mêmes, un crime contre l’État d’Israël». Il y a de bonnes raisons de croire qu’il a raison. Israël est délibérément en train de devenir le pays le plus haï au monde. Israël est aussi en train de perdre la confiance de l’Occident, y compris celle des jeunes Juifs américains qui sont peu susceptibles de tolérer encore longtemps ses crimes choquants. Il y a quelques décennies, j’ai écrit que ceux qui se déclarent «partisans d’Israël» sont en réalité des partisans de sa dégénérescence morale et de sa destruction probable. Malheureusement, ce jugement semble de plus en plus crédible.

Pendant ce temps, nous observons tranquillement un événement rare dans l’Histoire, ce que le défunt sociologue israélien Baruch Kimmerling appelait «politicide», le meurtre d’une nation…, à notre porte.

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Noam CHOMSKY,

20 janvier 2009