Archives du 6 mai 2013
L’Histoire de la Révolution Syrienne
Le Prix Nobel belge est décédé samedi. Il nous avait accordé un ultime entretien (LeSoir)
C e que je viens de vous dire, c’est pour publier plus tard, quand je serai mort. Car je suis tout proche de la mort, je suis au bout du rouleau. » Nous sommes le lundi 8 avril
Lorsque ses deux filles, Anne –
Ce samedi 4 mai en début de soirée, Françoise nous a appelée pour nous dire que son père était parti le matin même, selon sa volonté, entouré des siens. Elle nous donne le «go» à la publication de cette interview posthume et évoque les derniers instants de son père: «C’était impressionnant. Il n’était que sourire, nous demandant de ne pas pleurer, nous disant que c’était un moment heureux. Je n’ai jamais vu quelqu’un qui, au moment de sa mort, avait une telle force de vie. Il nous a quittés dans une grande sérénité, refusant la prise de calmants précédant l’injection décisive. Il est parti en nous disant Adieu et en nous souriant. »
Entre notre rencontre du lundi 8 avril et ce 4 mai, Christian de Duve n’avait donc pas changé d’avis. Ses enfants l’ont sondé, à plusieurs reprises: «C’est bien tentant de rester près de vous, leur a-t-il répondu, mais je dois partir maintenant. »
Ce mois précédant sa mort, il l’a mis notamment à profit pour écrire à ses amis, ses anciens collègues, à l’UCL, à la direction de son Institut, aux Etats-Unis, pour leur faire part de sa décision, et leur faire ses adieux. Il a lu leurs très nombreuses réponses, constatant une nouvelle fois la puissance et la densité de ce cercle qui s’est formé autour de lui au cours de ces 95 années d’une vie exceptionnelle. La vie d’un petit garçon né en 1917 qui a fait de la biochimie son arme de conquête de l’inconnu, son sésame pour la découverte des deux organes vivants des structures cellulaires. Ces fameux «
Etonnante décision que cette mort, pour ceux qui ont entendu et vu notre Prix Nobel en grande forme, à de multiples reprises ces dernières semaines en télé ou en radio. La sortie de sa passionnante autobiographie Sept vies en une chez Odile Jacob, sa fidèle éditrice, avait suscité un immense intérêt. A 95 ans – il en aurait eu 96 le 2 octobre
Lorsque nous le contactons cette semaine-là, sa fille le consulte et nous rappelle. Son père tient absolument à donner une interview au Soir mais me presse: puis-je venir très vite et publier aussi vite, de manière à ce qu’il puisse encore la lire? Elle me met dans la confidence de l’état de santé dégradé de son père mais rassure: il est devant son ordinateur, travaille. «La seule chose qui l’ennuie, c’est qu’il va devoir vous recevoir en robe de chambre, il demande si cela ne vous pose pas de souci? »
Nous accourons, le fameux lundi 8 avril, à Nethen, dans la maison où il a vécu avec sa femme, aujourd’hui disparue, et ses quatre enfants – dont Alain, professeur de bridge. Il fait grand soleil, ses filles me conduisent à l’étage. Le Prix Nobel est là, devant son bureau, face à cette fenêtre qui donne sur la nature brabançonne. Il sera durant deux heures malicieux, précis, patient, un peu essoufflé mais sans aucune trace de son malaise, passionné de bout en bout, attentionné. Il va réévoquer sa vie, la mort, les siens… Il va soudain nous livrer, avec une sérénité totale et une détermination absolue, son «scoop » comme il dit (lire ci-contre).
A la fin de l’entretien, il se lève, nous dit son bonheur d’avoir pu donner cette interview au Soir. Cet homme, qui vient de fixer la date de sa mort, est bouleversant de générosité et de dignité.
Il a été un géant, dit aujourd’hui sa fille Françoise. Le mot est faible. Samedi soir, elle nous a téléphoné pour nous libérer du secret dont nous étions dépositaires. Et donner le «go» à cette publication que son père avait planifiée, comme un point vraiment final à cette vie de 95 ans.
«
BÉATRICE DELVAUX
pour ledit entretien, il faudra attendre que LeSoir le mette en ligne
Le réveil d’un peuple
Mars 2011, c’est au tour de la Syrie d’aspirer à la liberté. Liberté fortement contestée par un gouvernement répressif et par une communauté internationale adepte de la théorie du complot. Un soulèvement pacifique de la rue demandant des réformes après plus de 40 ans de dictature. Oui la belle Syrie que beaucoup aiment tant, site touristique prisé par les occidentaux qui ne se doutent absolument pas de la réalité. Un peuple victime de censure intellectuelle, un peuple appauvri et des richesses pillées. C’est donc envahit d’un élan de courage tel leurs frères tunisiens, égyptiens, libyens et yéménites qu’ils sortent et manifestent. Les ripostes barbares de l’Etat ne se font guère attendre. Effectivement, les arrestations arbitraires et la torture se font au grand jour! Ne pensez pas que ces procédés sont nouveaux, loin de là! Ce n’est que la partie visible de l’iceberg, ces procédés ont toujours existé mais les gens ne pouvaient rien dire! La peur a traversé les frontières car même les exilés avaient jusqu’alors peur de parler… C’est dire à quel point le système est enraciné…
La ligue des Etats arabes daigne 9 mois plus tard envoyer des observateurs pour confirmer les massacres perpétrés. Ce ne sont pas les moyens de communications qui manquent pourtant… Youtube, facebook, twitter et autres réseaux permettent aux révolutionnaires pacifiques de faire entendre leur voix… Mais personne n’entend… En effet, comment un défenseur de la Palestine peut ainsi tuer son peuple? Et comment un peuple peut se retourner contre un défenseur de la Palestine? La vraie question est depuis quand est-ce que le sang humain a plus ou moins de valeur en fonction de son origine? N’oubliez pas qu’aucune tentative n’a été entreprise pour récupérer le Golan qu’Israël s’est fait un plaisir de prendre… ou que Hafez el Assad s’est fait un plaisir de céder… N’oubliez pas le massacre de Tal al Zaatar, camps de réfugiés palestiniens, perpétré par Assad père. Revenons à cette mission d’observation, c’est donc Mohammed Ahmed Moustapha Al-Dabi qui est nommé pour être chef de cette mission. Mais qui est M. Al-Dabi? C’est un général soudanais pour suivi pour génocide… Et oui… et oh grande surprise, il parle de« situation rassurante » à Homs tandis que les images et témoignages qui ne cessent de parvenir prouvent bien le contraire. La conclusion de cette mission d’observation? Allez-y, vous pouvez continuer le massacre! En effet, le massacre se poursuit en toute impunité.
C’est donc au tour de MISNUS de faire son apparition (c’est tout mignon comme nom): mission de supervision des Nations Unies en Syrie. Son rôle ? « Contrôler le respect par toutes les parties de la cessation de la violence armée sous toutes ses formes et de surveiller et appuyer l’application de la proposition en six points de l’Envoyé spécial conjoint pour mettre fin au conflit en Syrie ». Un joli pied de nez aux révolutionnaires ! Les observateurs de la LEA n’ont donc pas suffis? La médiatisation des massacres ne seraient que supercheries? Bien sur que non, tant de preuves ne peuvent être des falsifications, mais le gouvernement syrien a besoin de temps pour continuer sa répression et l’ONU se fait donc un plaisir de lui en offrir sur un plateau d’argent. Bref, la mission se termine le 19 août 2012, sans grands changements pour aucun des partis, enfin si, les Syriens continuent de se faire décimer… Ah oui, n’oublions pas les alliés de la Syrie qui sont au conseil de sécurité de l’ONU: la Russie et la Chine.
Ils ont posé trois veto (octobre 2011, février 2012 et juillet 2012), en effet les résolutions risquaient de permettre une intervention en Syrie. Mais attendez, la Russie n’attend pas d’avoir l’accord de l’ONU pour envoyer des armes au régime syrien? Et pour la Libye, la France prend les devants et réussi à faire appliquer une zone d’exclusion aérienne puis c’est l’intervention militaire qui s’en suit? Mais pourquoi se démener pour la Libye et pas pour la Syrie? Ah mais attendez! Il y a du pétrole en Libye… beaucoup de pétrole… La Russie envoie des armes, l’Iran et le Hezbollah envoie des soldats et tout cela sous la bénédiction de la communauté internationale. Rappelons également les paroles de François Hollande le 27 août 2012: «Je le dis avec la solennité qui convient: nous restons très vigilants avec nos alliés pour prévenir l’emploi d’armes chimiques par le régime (syrien, Ndlr) qui serait pour la communauté internationale une cause légitime d’intervention directe». Donc si on comprend bien c’est le feu vert donné à Bachar le boucher « fait ce que tu veux tant qu’il n’y a pas d’armes chimiques », mais aujourd’hui, on observe des blessures ne pouvant être provoquées que par des armes chimiques. Et où est la France ? Non attendez, ils attendent les preuves du gouvernement et vont surement envoyer des observateurs pour confirmer tout cela !
Mais le plus difficile est néanmoins de voir la communauté musulmane divisée sur ce sujet et de parfois les entendre dire « mais si Bachar part, ça sera encore pire, les Syriens sont une mosaïque de religions, ça va être la guerre civile ! » ah oui? Vous avez vécu ne serait-ce que trente secondes ce qu’un Syrien vit? Il est parfaitement normal que la Syrie soit une mosaïque de religions car d’une part c’est le berceau de l’humanité et d’autre part c’est justement cette mosaïque qui prouve que les musulmans ont respecté les cultures précédentes en sachant vivre ensemble… Leur présence n’est-elle pas la plus belle preuve de la tolérance?
C’est dans ce contexte que les Syriens à l’étranger commencent à s’organiser. Pour la plupart, ils avaient déjà été victime d’Assad père dans les années 1980… Ils ne pouvaient donc pas rester silencieux, leurs familles, amis, proches, biens, souvenirs sont sous le joug d’Assad fils et tout cela en toute impunité.
De même, pendant que les « missions d’observation » se multiplient, on assiste au siège de Homs et Baba Amro pendant plusieurs mois, à plusieurs massacres à l’arme blanche, souvenez-vous d’el Houla en mai 2012 ou encore de el Traimseh en juillet 2012 et Banyas en mai 2013. Les martyrs sont méconnaissables, les méthodes d’exécution sont de plus en plus originales (si je peux m’exprimer ainsi !) et le nombre de martyrs ne cesse d’augmenter avoisinant les 70 000 (1% de la population française actuelle et 3% de la population syrienne), sans compter les blessés, les déplacés, les réfugiés, les disparus, les détenus… bref, c’est bien 24 millions de personnes touchées par ce conflit!
On a également assisté au courage de certains journalistes et médecins pour d’une part relayer une information vraie et juste et d’autre part pour pallier à l’absence d’organisations médicales internationales. Je pense notamment à Edith Bouvier ou encore Jacque Bérès. Mais bien entendu ce ne sont pas les seuls, ils sont des dizaines, certains ont laissé leur vie tel que Rémi Ochlik photographe français ou encore la journaliste américaine Marie Colvin.
Aujourd’hui un autre protagoniste a fait son entrée en scène: Israël… A la pointe de la technologie militaire, on ne peut que craindre le pire. Ils disent viser les armes destinées au Hezbollah, cela permettra de conforter l’opinion de adeptes de la théorie du complot (soutenant que l’Iran, la Syrie et le Hezbollah sont de fervents défenseurs de la Palestine).
Ça prendra le temps qu’il faudra, mais la Syrie sera libre. Elle se souviendra surtout de la solitude dont elle a été victime. Il en va de même pour tous les opprimés (en Birmanie, en Palestine, en Chine et j’en passe…). L’Histoire nous prouve que les despotes, dictateurs et autres gouvernements injustes finissent toujours par perdre et disparaître (les monarchies en France, Hitler, le gouvernement de Vichy). Le sang est visiblement le prix à payer pour sa liberté, mais alors quel prix !