Prononcer vos prénoms


mercredi 22 mai 2013

Prononcer vos prénoms
Vous savoir chaque jour sous le feu d’une violence que rien ne désamorce. Passer la main sur les images de vos visages. Savoir que je ne peux plus révéler la lumière de vos regards. Vous savoir sur les fils du danger à chaque instant. Vous savoir tenus de choisir entre une haine ou l’autre. Vous savoir tenus de fuir entre un refuge ou l’autre. Vous savoir séparés, reclus chacun de vous dans l’étau de vos appartenances. Vous savoir traversés d’épuisements et de colères, ballotés de détresse, animés du plus grand des courages. Vous savoir piégés, verrouillés, entravés, si fragiles.

Vous que je n’ai connus que dans les espaces de la fraternité. Vous qui m’avez appris, comme on grandit, à décliner, en toutes langues, l’amitié.
Sur les bras d’une roue, sur les berges d’un fleuve, autour d’une sobbiah.

Prononcer vos prénoms

Malgré l’oubli du monde. Malgré ceux qui, prétendant vous défendre, parlent en votre nom pour annuler vos voix. Malgré les mille complicités signant, comme on s’échappe, la liste des délits pour ne pas vous sauver.

Prononcer vos prénoms

Parce qu’ils vous mettent, sans s’étouffer, au banc du monde. Parce que tous, agrippés à la laideur de leur posture, ne vous dessinent plus que comme un enjeu pour des joutes verbales évidées de tout sens.

Et quelques ventes d’armes… Et quelques pouvoirs supposés, lustrés, argumentés par des émissaires façonnés sur mesure.

Prononcer vos prénoms

Pour que vos visages demeurent. Et la trame de vos vies, le souffle de vos élans, cette chaleur, ce seul chemin. Et que la distance qui nous ronge s’égrène à nouveau dans les multiples et les possibles.

Prononcer vos prénoms

Comme un défi
Pour que des femmes et des hommes sages se lèvent
Pour que des femmes et des hommes sages fassent taire les fous
Et que vienne l’instant de liberté
Et que vienne le chant où la vie s’accomplit

Prononcer vos prénoms

Yasser  Azzam  Khaled  Fayez  Mustafa  Abdallah  Abdelkarim  Faisal  Mohamed
Et celles et ceux de mes silences…

Marion Coudert 

Hezbollah


Ils sont devenus comme leurs anciens ennemis: des envahisseurs. Ils se font eux aussi appuyer par l’aviation; ils se font à leur tour humilier par une résistance farouche; ils s’embourbent dans leur mauvais rôle; ils se font attraper et filmer dans leur posture cadavérique, eux naguère ces fantômes insaisissables et invincibles…

Ils ne se rendent pas compte qu’en tous les cas ils seront perdants (ou peut-être s’en rendent-ils compte mais s’en foutent, maintenant que leur masque est tombé) : perdants, même en cas de victoire ponctuelle, à la Pyrrhus, obtenue à un prix exorbitant de morts et de blessés; perdants pour leur discrédit aux yeux des populations arabes qui ne voient maintenant en eux que des mercenaires chiites pro-iraniens, et notamment aux yeux des Libanais, des Syriens et des Palestiniens; perdants pour les retombées a posteriori de leur agression sur leur propre communauté et leur propre territoire; perdants politiquement et socialement, car ne pouvant plus évoluer et s’épanouir dans un milieu environnant devenu entièrement hostile; perdants de faire gagner leur ancien ennemi sioniste qui se réjouit de voir ses ennemis s’entretuer et lui épargner l’effort et le coût d’opérations militaires.

Félicitations, chers «honorables», pour ce déshonneur; pour avoir réussi à vous faire haïr par ceux dont vous prétendiez défendre l’honneur, au point de faire de l’ennemi traditionnel un moindre mal comparé au vôtre, car je peux deviner qui, de vous ou de l’occupant israélien, est l’ennemi à abattre en priorité, aux yeux des peuples arabes.

Ronald Barakat