Quand la France ouvrait les bras à 120 000 réfugiés sauvés en mer


Jean-Paul Sartre et Raymond Aron, avec André Glucksmann debout, entente sacrée pour les boat people (MICHEL CLEMENT / AFP).

Jean-Paul Sartre et Raymond Aron, avec André Glucksmann debout, entente sacrée pour les boat people (MICHEL CLEMENT/AFP).

Pierre Haski | Cofondateur Rue89

En 1979, politiques et intellectuels français mettaient leurs désaccords de côté et accueillaient plus de 120 000 réfugiés vietnamiens et cambodgiens. Une union impensable sur la crise en Méditerranée.

Imaginez l’image : les plus grands intellectuels du pays, de droite comme de gauche, unis pour lancer un appel à sauver les migrants menacés de naufrage en Méditerranée, et à les accueillir à bras ouverts en France !

Impensable aujourd’hui, et pourtant, ça s’est produit. Oui, notre pays a été exemplaire il y a plus de 35 ans, et n’a jamais eu à le regretter.

C’était en 1979, et la crise des boat people d’Indochine dominait le « 20 heures » de nos télés, avec des images de familles entières dans des embarcations de fortune en mer de Chine, menacées par les pirates, les requins, les intempéries… Des Vietnamiens et des Cambodgiens fuyant le communisme et les persécutions ethniques, rackettés pour pouvoir partir, sans savoir où aller.

« Des hommes en danger de mort »

Et le miracle se produisit. Jean-Paul Sartre et Raymond Aron, deux intellectuels que tout opposait jusque-là, entourés de toute l’intelligentsia de l’époque, réunis autour d’une même cause. Oubliant un moment leurs divergences politiques à une époque où, pourtant, elles dessinaient des camps autrement plus antagoniques qu’aujourd’hui.

Ecoutez cette interview de Jean-Paul Sartre au « 20 heures » : il explique qu’il se met au service « d’hommes en danger de mort », abandonnant ses « opinions politiques ». Une autre France…

voir ici : http://rue89.nouvelobs.com/2015/04/24/quand-france-ouvrait-les-bras-a-120-000-refugies-sauves-mer-258841

 

Quelques mois plus tôt, cette coalition hétéroclite s’était mise en place pour affréter un bateau, avec Médecins sans frontières, pour sillonner la mer de Chine et porter secours et assistance aux boat people en détresse.

Ce bateau, L’île de lumière, a vu le jour et a effectué sa mission humanitaire en mer de Chine.

Mais dans le contexte particulier de cette fin des années 70, l’élan humanitaire français ne s’arrêta pas là.

Conformément à des décisions internationales, la France prit sa part, et même plus, pour accueillir certains de ces réfugiés qui étaient regroupés, après avoir été sauvés en mer, dans des camps installés dans les pays de la région – Hong Kong, Malaisie, etc.

Boat people en mer de Chine, sauvés par le bateau humanitaire français Ile de lumière (FRANCOIS GRANGIE/AFP)

128 531 réfugiés admis en France

Si vous n’avez pas la mémoire de ce moment-là, vous ne devinerez jamais combien de ces réfugiés d’Indochine la France a accueilli et a aidé à s’installer et s’intégrer sur son sol. Pas quelques centaines, pas quelques milliers, non : 128 531 Vietnamiens, Cambodgiens et Laotiens entrés légalement en France.

Dans un texte publié en 2006, Karine Meslin, maître de conférence au Centre nantais de sociologie, relève le paradoxe :

« En France, l’immigration de travail vient tout juste d’être suspendue et la crise économique que traverse le pays semble peu propice à l’accueil de nouveaux étrangers. Pourtant, après des mois ou des années d’attente, 128 531 ressortissants de l’ancienne Indochine, dont 47 356 Cambodgiens, entrent légalement sur le territoire français. Dès leur arrivée, ils bénéficient d’un accueil d’exception accompagné de discours empathiques, que formulent les dirigeants politiques notamment. »

Et elle s’interroge :

« Comment comprendre cette situation pour le moins paradoxale ? Comment expliquer que des réfugiés aient pu bénéficier d’un tel accueil alors qu’il est admis qu’“en période d’incertitude tout particulièrement, l’étranger est ressenti comme une menace pour le groupe enraciné” [selon la formule de l’historien de l’immigration Gérard Noiriel, ndlr] ? »

Mobilisation exceptionnelle

La chercheuse rappelle le dispositif exceptionnel que la France de Valéry Giscard d’Estaing avait mis en place pour les accueillir :

« En France, de nouveaux traitements de faveur et de nouvelles dérogations se font jour. L’arrivée des réfugiés de l’ancienne Indochine est d’abord l’occasion d’institutionnaliser une collaboration étroite entre les associations, chargées de l’accueil des réfugiés, et l’Etat, responsable de leur sécurité.

Ainsi, après un court séjour obligatoire dans un des quatre foyers de transit parisiens où ils sont accueillis, les réfugiés peuvent décider de se “débrouiller” par eux-mêmes ou rester sous la tutelle des associations mobilisées pour leur cause.

Dans ce cas, ils sont hébergés dans des centres provisoires d’hébergement (CPH) pour une durée minimum de trois mois au terme desquels, à l’échelle municipale, des comités d’accueil se chargent d’accompagner leurs démarches quotidiennes.

Dans un même temps, de nombreuses mesures facilitent leur mise au travail. Sur le terrain juridique, les conditions d’obtention de leur carte de travail provisoire et renouvelable n’obéissent pas à la procédure habituelle.

Alors que les demandeurs d’asile en sont privés jusqu’à ce que le titre de réfugié politique leur soit délivré, la politique des quotas offre aux réfugiés en question un droit de travail immédiat. De plus, tandis que les migrants – réfugiés ou non – sont, à cette époque, dans l’obligation d’être titulaires d’un contrat de travail d’une durée d’un an pour obtenir une carte de travail (non provisoire), un contrat de trois mois, même à temps partiel, suffit aux réfugiés du Sud-Est de l’Asie.

Des cellules ANPE leur sont également réservées et des mesures incitatives, notamment financières, sont prises à l’égard des employeurs pour favoriser leur embauche.

Tous ces dispositifs objectifs s’accompagnent par ailleurs de discours compassionnels et bienveillants, nettement distincts de ceux, plus stigmatisants, qui traitent des autres étrangers à l’heure où l’immigration de travail vient d’être suspendue. »

Anticommunisme et mauvaise conscience

Une bonne partie de la communauté asiatique de France, notamment dans le XIIIe arrondissement de Paris, est issue de cette vague d’immigration des boat people fuyant les anciennes colonies françaises d’Indochine.

Certes, le contexte joue énormément. Tant celui de la guerre froide qui fait que des réfugiés fuyant le communisme reçoivent une oreille plus favorable dans les pays occidentaux, que celui spécifique de l’Indochine après la découverte des atrocités commises par les Khmers rouges, dont le monde a tardé à prendre réellement conscience.

L’anticommunisme de la droite et la mauvaise conscience d’une gauche qui avait soutenu les mouvements de libération devenus à leur tour oppresseurs ont permis ce rare consensus au service d’une grande cause humanitaire.

Comme l’écrit Karine Meslin :

« La mobilisation autour des réfugiés cambodgiens, laotiens et vietnamiens est exceptionnelle à plus d’un titre. Non seulement les modalités d’accueil des réfugiés du Sud-Est asiatique ne sont “pas réellement basée(s) sur l’interprétation classique de la Convention de Genève, mais sur la volonté de l’Etat”. Mais de plus, la nébuleuse d’acteurs impliqués dans cet accueil ne fait pas partie des défenseurs traditionnels des étrangers. Ce premier constat ne doit néanmoins pas dissimuler le second.

L’exemple des réfugiés du Sud-Est asiatique permet aussi de montrer qu’une nouvelle fois, le sort des étrangers est étroitement lié aux intérêts nationaux et ce, quels que soient le statut juridique de ces étrangers ou les raisons de leur venue.

Par ailleurs, l’accueil, basé sur la mobilisation gouvernementale, dont ont bénéficié les réfugiés du Sud-Est de l’Asie a eu de nombreuses incidences. Outre qu’il a facilité leurs premiers pas en France, il a participé à modeler le regard porté sur eux et à légitimer leur arrivée en France.

La qualité de cet accueil semble avoir été perçue comme ajustée à la qualité intrinsèque des étrangers auxquels il était destiné. Ce constat rappelle, in fine, l’importance des politiques d’accueil et des discours qui accompagnent l’arrivée des nouveaux migrants. »

C’est ce contexte et ces motivations qui manquent singulièrement aujourd’hui dans la crise de la Méditerranée.

Et pourtant, certains des éléments sont communs. Les hommes et les femmes qui fuient la Syrie en guerre – un ancien territoire géré par la France, on l’oublie trop souvent –, ou l’Erythrée en dictature, ou encore la misère de l’Afrique subsaharienne où les responsabilités historiques françaises sont nombreuses, comme le rappelait ici même jeudi l’ancienne ministre malienne Aminata Traoré, ne suscitent pas la même empathie (c’est un euphémisme, à voir certains commentaires sur Rue89 jeudi).

Où sont les Sartre et Aron d’aujourd’hui ?

Quand on entend le Conseil européen évoquer l’accueil de 5 000 Syriens à répartir parmi le demi-milliard d’Européens, on croit rêver en pensant aux 123 000 Asiatiques reçus en France trois décennies plus tôt. Ou au million de Syriens, et sans doute plus, réfugiés dans le petit Liban, ou le quasi million de Libyens qui se trouvent en Tunisie…

Il est vrai qu’il n’y a pas, aujourd’hui, de personnages de la stature de Jean-Paul Sartre et Raymond Aron pour symboliser cette union sacrée pour une cause jugée noble. Et que lorsqu’on regarde en permanence derrière son épaule si le Front national n’y est pas, on a tendance à intégrer une partie de sa logique.

Ce qui vaut pour la France vaut pour ses voisins : la palme d’or revenant de ce point de vue à David Cameron, qui a annoncé (à quelques jours d’élections difficiles) qu’il enverrait un bateau de la Royal Navy en Méditerranée, mais que tout migrant sauvé par la marine britannique serait déposé sur les côtes du pays le plus proche, vraisemblablement l’Italie. Elégant.

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Nuit d’horreur à Ben Gourion pour deux étudiants musiciens


Voici le témoignage, assez représentatif, de deux jeunes étudiants en musique, Philomène et Bastien, détenus et interrogés toute une nuit à leur arrivée à l’aéroport de Tel-Aviv, avant d’être renvoyés chez eux, manu militari…  Parce qu’ils s’engageaient dans la vie musicale palestienne et ont des amis dans les territoires occupés, ils représenteraient « un danger pour la démocratie israëlienne ». Où l’on voit les méthodes de la « démocratie »de Netanyaou…

Nous sommes deux étudiants, actuellement en musicologie à l’Université Paris 8 et aux CRR 93 à Aubervilliers et CRD à Gennevilliers. Après avoir passé notre Bac, nous sommes partis en septembre 2013 pour vivre un an en Palestine. Nous y avons donné et reçu des cours de musique (violon et flûte traversière) au Conservatoire National Edward Saïd à Ramallah et contribué à créer une école de musique à Jéricho. Pendant ces vacances de Pâques, nous avions décidé d’y retourner pour revoir nos amis et retourner sur les lieux fréquentés l’année précédente.

 

Le dimanche 19 avril dernier, nous arrivons à 02h30 à l’aéroport de Tel Aviv Ben Gourion. Au passage à la douane, nous disons l’objet de notre visite, mais au mot « Ramallah », nous sommes directement envoyés dans une petit salle où d’autres personnes attendent déjà. On nous demande tout de suite d’écrire nos numéros de téléphone et nos e-mails respectifs.

Après une heure d’attente, un homme de la sécurité vient chercher Philomène, lui disant de prendre ses bagages. Dans ce premier interrogatoire, l’agent de sécurité la questionne sur l’objet de sa visite, si elle est déjà venue en Israël et pourquoi. Au bout de plusieurs minutes, il commence à s’énerver et la traite de « menteuse » car cela lui semble impossible de partir un an à vingt ans pour faire de la musique et seulement de la musique en Palestine. Il lui demande si elle a un portable palestinien. Elle lui répond que non car elle a peur de compromettre ses contacts. L’homme se lève et frappe avec ses poings sur son bureau en disant « You’re a liar, I don’t believe you ! ». Il raccompagne ensuite Philomène dans la salle d’attente et demande à Bastien de le suivre. Même scénario, il le prévient tout de suite que son amie est une menteuse et qu’il a intérêt à ne pas mentir. Bastien lui dit la vérité mais il ne le croit pas, commence alors un dialogue de sourd. Puis il lui ordonne d’aller chercher nos carte SIM palestinienne et notre appareil photo. Après avoir dû traduire tous les messages présents sur le portable et le voir regarder nos photos parisiennes pour être sûr que nous ne sommes pas activistes, il lui dit de retourner dans la salle d’attente.

Deux heures plus tard, et après avoir vu de nombreuses personnes repartir avec un visa, le même agent crie à Philomène de le suivre. Il repose les même questions mais cette fois-ci, il est persuadé qu’elle a participé à des manifestations. Elle affirme que non. Il continue jusqu’à ce qu’elle craque et se mette à pleurer. C’est au tour de Bastien, il l’accuse lui aussi d’avoir participer à des manifestations et lui conseille d’arrêter de mentir. Il va sur son compte facebook et lui demande s’il connaît une « Marie Ballanger », il répond que non, puis l’agent s’énerve en lui disant que pourtant il l’a dans ses amis et qu’elle a été refoulée en décembre dernier. Bastien comprend alors qu’il s’agit de « Bérengère », une amie qui a effectivement été refusée récemment. Il dit alors qu’il la connaît et se voit immédiatement insulté car il n’a pas réagi tout de suite. Il est de nouveau renvoyé dans la salle d’attente.

Il est maintenant 8h00, nous ne sommes plus que cinq dans cette petite salle. Nous tremblons, nous avons envie de vomir, le sandwich sec que la sécurité israélienne nous apporte ne passe pas. A nos côtés, une russe tombe dans les pommes, un agent de la sécurité lui cale une valise sous les pieds et attend qu’elle se réanime, seule…quinze minutes plus tard, un homme vient s’occuper d’elle. Nous voyons aussi un tchadien, après avoir donné tout l’argent qu’il possédait sur lui, se faire menotter et envoyé on ne sait où. Dans un coin, un homme d’une cinquantaine d’année, épuisé, pleure. L’attente assise devient insupportable, inhumaine, nous avons besoin de marcher pour aller mieux. A l’extérieur de la salle on voit des jeunes de notre âge s’occupant aussi de la sécurité, rire, crier, téléphoner, parler shopping…insouciants.

Finalement, l’agent revient chercher Bastien. Il ne veut toujours pas le croire au sujet des manifestations, il lui demande pourquoi il est si nerveux, pourquoi il tremble, ça prouve qu’il ment non ? Il fait semblant de ne pas comprendre que cela fait déjà 5h30 que nous sommes ici après un voyage d’une journée en avion et qu’à un moment, un physique normalement constitué a des limites. L’agent insiste sur le fait que Bastien, en tant que pro-palestinien, ne puisse pas être parti un an en Palestine sans être allé à Bil’in, un village résistant. N’ayant jamais manifesté, Bastien nie jusqu’au bout. C’est au tour de Philomène, il lui repose exactement les mêmes questions. Elle y apporte les mêmes réponses.

Retour à la salle d’attente, nous ne savons plus quoi penser, allons nous malgré tout avoir un visa ? Allons nous être interdit de territoire ? Nous luttons contre le sommeil et les engourdissements. A 9h, un agent de l’immigration israélienne vient nous chercher. Il nous explique que nous sommes trop dangereux pour leur « démocratie » et que malgré le fait que nous soyons étudiants et musiciens, ils ne nous croient pas et vont nous emmener en centre de rétention en attendant de prendre notre vol de retour qui sera à 16h. A partir de ce moment là, nous sommes vus comme des terroristes. On nous escorte même pour aller aux toilettes. Ils nous emmènent au bureau de l’immigration pour prendre nos empreintes et une photo pour « pouvoir téléphoner à nos proches » selon eux. Philomène leur propose de jouer du violon puisqu’ils ne nous croient pas. Indémontable, un agent lui répond sèchement qu’il n’aime pas la musique.

Ils nous escortent ensuite jusqu’à une salle de fouilles, où pendant une heure nous n’existons plus qu’en tant qu’objets. Ouverture de tous nos sacs, vérification de tous nos vêtements et autres accessoires, puis fouille au corps dans une cabine. Humiliation complète. Ils démontent et gardent la valise de Bastien et mettent toutes ses affaires dans un colis. Nous sommes maintenant étiquetés-fluo de partout.

Nouvelle attente. On demande quand nous pouvons téléphoner, on nous répond « in a few minutes » comme depuis le début de la nuit. Enfin à 10h30, nous sortons du terminal de l’aéroport et montons dans un fourgon grillagé qui nous conduit, avec la russe, au centre de rétention.

Arrivés au centre, nos geôliers entreposent nos affaires dans une salle et nous disent de prendre notre argent et nos cigarettes si l’on veut fumer. Nos portables sont interdits. Mais, nous pouvons enfin contacter nos proches, huit heures après notre arrivée. Nous sortons prendre l’air, toujours accompagnés, dans une cour clôturée. Puis, on nous conduit dans une cellule dans laquelle nous resterons jusqu’au départ de l’avion. Nous voici enfermés, sans notion du temps dans un lieu sale, rempli de puces et avec plus que la peur, une notion d’absurde qui nous fait doucement rire … Nous en sortirons trois heures et demies plus tard.

Il est 15h, nous quittons enfin cette prison et retournons dans le fourgon qui nous emmène directement sur le tarmac où notre avion nous attend. Inconvénient, nous apprenons que notre avion arrive à Bruxelles et que si nous voulons rejoindre Paris, nous devrons attendre huit heures dans l’aéroport. Nous montons dans l’avion, nos geôliers donnent nos passeports aux hôtesses de l’air qui nous font entrer, l’air désolé.

Nous ne retrouvons nos passeports que cinq heures plus tard (et dix-sept heures après notre atterrissage), lors de notre arrivée à Bruxelles, où la police des frontières belge nous attend. Elle nous conduit dans un bureau pour vérifier que nous ne sommes pas dangereux pour leur État. Nous ne le sommes pas. Nous décidons alors de ne pas prendre l’avion à destination de Paris, nous préférons rentrer en France par nos propres moyens le lendemain.

 

Chaque année, à l’aéroport de Ben Gourion, de nombreux visiteurs d’origines variées sont confrontés à des situations similaires. Voyant ainsi, leurs droits humains les plus élémentaires bafoués : violation de l’intimité, torture psychologique, déshumanisation de la personne, racisme, vol, traumatismes… Peu d’entre eux présentent une réelle menace pour l’État israélien. Ce dernier nuit ainsi au bon déroulement d’une multitude de projets humanitaires, culturels et autre. A l’heure actuelle, rien n’est fait. Ce qui se passe à cette frontière est inconnu aux yeux de tous. Nos États ont le pouvoir de faire cesser ces exactions. Nous avons le devoir de renseigner le plus grand nombre pour qu’un jour les droits humains soient respectés à cette frontière. Nous espérons que ce témoignage puisse être un vecteur de réflexion et de changement quant à cette triste réalité.

 

Philomène Constant et Bastien Anthoine, Angers, le 22 avril 2015

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Migrants: Le fantasme de l’invasion


G.T. Publié le vendredi 24 avril 2015 à 19h33 – Mis à jour le vendredi 24 avril 2015 à 20h24

INTERNATIONALSi les récents naufrages en Méditerranée ont suscité une vague d’empathie et relancé le débat sur la politique migratoire européenne, ils n’ont pas manqué d’alimenter les fantasmes parmi les aficionados des courants populistes et d’extrême droite. Sur les réseaux sociaux et les forums Internet, ceux-ci se déchaînent, répétant jusqu’à plus soif que l’Europe est la cible d’une invasion. Ces embarcations, affirment-ils, sont moins remplies de légitimes demandeurs d’asile, que de “Noirs” (sic) qui se ruent sur l’Europe afin de profiter des largesses de son système social. On vous passe par ailleurs les multiples dérapages racistes nauséeux qui accompagnent ces torrents de bile.S’il est exact qu’une part des personnes qui tentent cette traversée sont des migrants économiques poussés par la recherche d’une vie meilleure, il convient d’objectiver les chiffres et de remettre les choses en perspective.
Le tiercé : Syrie, Erythrée, Somalie
Selon les données officielles du bureau européen du Haut commissariat de l’Onu pour les réfugiés (HCR), 170 100 personnes sont arrivées en Italie l’an dernier. Un contingent impressionnant composé pour moitié de Syriens (42 323), d’Erythréens (34 329) et de Somaliens (5 756). Soit un total de 82 408 personnes. “Autant de ressortissants qui se voient accorder le statut de réfugié dans 90 à 100 % des cas”, souligne le porte-parole du HCR. Pour le solde, on retrouve un melting-pot de Maliens, Egyptiens, Pakistanais, Afghans, Irakiens, Libyens ou encore Ethiopiens. Même si le taux de personnes admissibles à la protection internationale est moins élevé dans ces cas de figure, il n’est pas inutile de rappeler qu’il ne fait pas toujours bon être homosexuel ou opposant politique dans ces pays – pour ne citer que ces exemples.A Malte, 568 personnes ont été recensées l’an dernier, parmi lesquelles 134 Syriens, 118 Somaliens et 38 Erythréens.En Grèce, le bilan 2014 s’est élevé à 26 366 Syriens; 1539 Somaliens et 699 Erythréns. Soit 28 604 personnes sur 43 916 arrivants. On peut également citer la présence de 11 391 Afghans.En ce qui concerne 2015, les données disponibles courent du 1er janvier au 31 mars. A cette date, le HCR a déjà comptabilisé 10 165 arrivées en Italie. Parmi celles-ci, on dénombre 1 107 Somaliens, 1 056 Syriens et 906 Erythréens. Un bon tiers du total, donc. On peut également noter un important contingent de Maliens – un pays où les tensions demeurent dans le nord aux mains de groupes armés autonomistes –, mais aussi de Gambiens et de Sénégalais. De son côté, la Grèce a déjà enregistré 12 481 arrivées. Soit 7 286 Syriens, 435 Somaliens et 115 Erythréens, auxquels s’ajoutent notamment 2 352 Afghans. Malte n’a jusqu’ici reçu la visite que de 89 exilés, essentiellement d’origine africaine.

Enfin, on peut encore souligner que bon nombre de femmes et d’enfants – parfois des nourrissons – se lancent dans cette dangereuse aventure. Et rappeler, tant qu’à faire, que la couleur de peau ne constitue pas un critère dans l’attribution du droit d’asile.