Syrie : Al-Assad promet de réprimer la rébellion «d’une main de fer»


Monde

5 août 2013 à 08:21
Photo fournie par l'agence Sana montrant le président syrien Bachar al-Assad, lors d'un discours à Damas le 4 août 2013.

Photo fournie par l’agence Sana montrant le président syrien Bachar al-Assad, lors d’un discours à Damas le 4 août 2013. (Photo AFP)

Dans un discours télévisé diffusé dimanche, le président syrien a de nouveau fait part de sa détermination à écraser l’insurrection, .

Par AFP

Le président syrien Bachar al-Assad a exprimé dimanche soir sa détermination à écraser d’une «main de fer» la rébellion qui depuis plus de deux ans tente de le renverser, quelques jours après avoir affiché l’image d’un régime sûr de la victoire. «Aucune solution ne peut être trouvée avec le terrorisme, excepté en le réprimant avec une main de fer», a déclaré le président Assad au cours d’une rare allocution retransmise à la télévision publique.

Dans ce discours d’une durée de 45 minutes, le président a encouragé les forces armées à continuer à combattre les rebelles, qualifiés de terroristes par le régime. «La crise ne sera résolue que sur les champs de bataille», a-t-il lancé.

Fort de deux importants succès militaires, Bachar al-Assad avait déjà adressé jeudi un message aux militaires à l’occasion de la fête de l’armée. «Si en Syrie nous n’étions pas sûrs de la victoire, nous n’aurions pas eu la capacité de résister et nous n’aurions pas pu poursuivre (la bataille)» après plus de deux ans de guerre, avait-il souligné. Il avait aussi effectué un rare déplacement hors de Damas dans un ex-bastion rebelle et les autorités avaient diffusé des images de lui saluant des soldats.

Au cours de son discours prononcé dimanche lors d’un iftar-repas de rupture du jeûne, au coucher de soleil, pendant le mois de ramadan-, Al-Assad a par ailleurs estimé que la Coalition nationale syrienne (opposition) a échoué et qu’elle n’a aucun rôle à jouer dans la recherche d’une solution pour mettre fin au conflit qui ensanglante le pays depuis 28 mois. Selon lui, elle «n’est pas fiable» et est «à la solde de plus d’un pays du Golfe».

En présence de personnalités politiques et religieuses, et de membres de la société civile, ll a aussi souligné les «réalisations héroïques de l’armée syrienne dans la défense du pays» et a salué le peuple syrien «pour s’être rangé du côté des forces armées, afin de défendre la Syrie et ses ressources».

Toujours plus de morts sur le terrain

En mars 2011, la Syrie avait connu un mouvement de protestation pour exiger sans succès des réformes démocratiques. Le régime avait déclenché une brutale répression contre l’opposition, qualifiant systématiquement les opposants et les rebelles de «terroristes» et refusant d’admettre l’existence d’une révolte populaire.

La contestation populaire s’est ensuite transformée en insurrection armée qui a fait plus de 100 000 morts selon l’ONU. L’opposition syrienne a affirmé dimanche qu’elle était prête à coopérer à «une enquête impartiale» sur les crimes de guerre commis dans le conflit syrien, répondant ainsi à un appel de Navi Pillay, Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme.

Cinq membres d’une famille favorable au régime ont par ailleurs été assassinés dimanche par des hommes armés dans le nord de Damas, a indiqué l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Dans l’ouest du pays, une bataille entre rebelles et forces du régime a causé la mort d’au moins 30 personnes des deux camps dimanche, a également annoncé l’OSDH, et une voiture piégée a explosé à un poste de contrôle de l’armée dans le quartier de Boustane al-Dour, au sud de Damas.

Les forces du régime ont continué leur bombardement de Barzé (nord) et Jobar (est), a précisé l’OSDH qui a fait également état de combats dans le Jabal al-Akrad, dans la province de Lattaquié, au cours desquels 12 rebelles et 19 soldats et supplétifs ont trouvé la mort. Et à Ariha, dans la province d’Idleb (nord-ouest), quatre personnes, dont un enfant, ont été tués dans un bombardement, toujours selon la même source.

Tandis que le conflit a forcé des millions de personnes à fuir leurs foyers, le pays a plongé dans une crise économique sans précédent. L’économie syrienne a ainsi connu une dollarisation croissante en raison de la chute de la monnaie nationale -la livre syrienne (SYP)- qui a perdu les trois-quarts de sa valeur par rapport au dollar, amenant le président Assad a promulgué dimanche un décret interdisant toute transaction commerciale en devises étrangères.

Sur le plan diplomatique, le nouveau président iranien Hassan Rohani a affirmé dimanche que rien ne pouvait affecter les relations de l’Iran avec la Syrie, en recevant à Téhéran le Premier ministre syrien Waël al-Halaqi, selon l’agence officielle Sana.

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Lettre d’Alep : avec les Syriens que l’on a abandonnés à leur sort


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Jean-Pierre Filiu
Universitaire
Publié le 27/07/2013 à 15h00

Dans les ruelles de la vieille ville d’Alep, au milieu des destructions (JACK HILL/THE TIMES/SIPA)

Chers riverains, je rentre d’un séjour de « terrain » dans les zones « libérées » d’Alep, soit les secteurs tenus par la révolution depuis près d’un an, dans la métropole du nord de la Syrie.

L’enlèvement, le 6 juin 2013, de deux journalistes d’Europe 1, mon ami Didier François et le photographe Edouard Elias, a rendu ce type d’enquête encore plus périlleux. J’ai pour ma part choisi l’immersion dans la résistance civile, plutôt que la « protection » par tel ou tel groupe armé.

J’ai pu constater sur place les multiples stigmates des bombardements gouvernementaux, menés par hélicoptères, par avions, par artillerie et par blindés. J’ai entendu une fois un bombardement aérien, dont je n’ai pas vu l’impact. J’ai aperçu de loin les volutes de fumée provoquées par un tir d’artillerie.

J’ai vu, devant chacun des hôpitaux de campagne, les tentes d’urgence installées en cas d’attaque chimique. Pour mémoire, les services de santé d’Alep, gérés pour la première fois de leur histoire par une municipalité démocratiquement élue, disposent de 10 000 doses d’atropine (à injecter en cas d’exposition au gaz sarin) et de… seize masques à gaz.

Je me suis surtout plongé dans cette population de deux millions de femmes et d’hommes pour qui le retour de la dictature est tout simplement inconcevable. Les pilonnages récurrents ne font qu’intensifier la haine contre « l’âne », « le chien » ou « le canard », ainsi qu’est indifféremment désigné Bachar al-Assad par ses anciens sujets.

L’effroi des missiles Scud

Mais de toutes les armes dont le despote frappe les civils insoumis, ce sont les missiles Scud qui suscitent l’effroi le plus intense. Ces missiles balistiques sont en effet tirés depuis la banlieue nord de Damas, à 300 kilomètres de là, pour s’abattre sur des zones résidentielles de manière aveugle. Il n’y a pas de précédent à la perpétration d’un tel crime de guerre à l’encontre d’une population désarmée.

Ce soir du 26 juillet, dans le quartier de Bab Nayrab, les familles s’étaient réunies, comme dans les autres foyers musulmans d’Alep, pour partager le repas de rupture du jeûne du Ramadan.

Un missile sol-sol s’est abattu sur l’immeuble. 35 cadavres auraient été extirpés des décombres, dont ceux de 19 enfants.

L’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) ne confirme sur le moment que dix victimes, précisant que le bilan peut rapidement s’alourdir. Les secours s’activent dans la nuit à la lumière des projecteurs. En voici l’enregistrement vidéo mis en ligne par des « reporters-citoyens » de l’Aleppo Media Center (AMC).

Alep

Ces Syriens que l’on a abandonnés à leur sort…

J’entends déjà de bons esprits affirmer qu’un bilan aussi tragique doit être confirmé de « sources indépendantes ». Mais où trouver ces fameuses « sources » quand l’ONU s’interdit l’accès aux zones révolutionnaires, quand les actions humanitaires y sont ciblées et quand les journalistes étrangers y sont enlevés ?

Alors laissons à ces Syriens, que l’on a abandonnés à leur sort, le droit de compter leurs morts.

Une autre tentation pourrait être de dresser un parallèle entre ce massacre de civils par la machine de guerre Assad et les revers sanglants essuyés ces derniers jours par les forces gouvernementales au sud-ouest d’Alep (l’opposition a même dénoncé l’exécution sommaire de dizaines de prisonniers par un groupe jihadiste).

Comme si les crimes des uns excusaient les crimes des autres. Comme si des civils désarmés ne devaient pas être protégés par toutes les garanties du droit international.

Les fantômes de Guernica

En septembre 2012, Le Monde avait rompu avec sa pratique éditoriale en publiant sur une double page l’image d’un bombardement à Alep et le témoignage des deux reporters qui y avaient assisté. Ce texte évoquait avec émotion les fantômes de Guernica. Dix mois plus tard, des images comparables en provenance d’Alep ne provoquent plus que l’indifférence.

Il est 14 heures en ce 27 juillet et, à ma connaissance, pas un organe de presse occidental n’a encore rapporté le massacre de cette nuit à Alep.

Il est vrai que, ce samedi matin, deux nouveaux raids aériens ont frappé deux autres quartiers d’Alep, Bustan al-Qasr et Maadi.

Alors que l’on ne nous parle plus de ce « monde transparent », de cette « conscience universelle », de « l’impossibilité pour un dictateur de massacrer aujourd’hui son peuple ». Qu’on ne nous en parle plus, car Bachar al-Assad le fait depuis 28 mois, et il s’en porte très bien.

Durant l’été 2012, j’avais eu le triste privilège d’annoncer, à vous riverains, un massacre de civils en cours à Daraya, dans la banlieue de Damas.

Le carnage n’avait fait que quelques lignes dans nos quotidiens. La Syrie nous lasse, elle nous fatigue. Nous avons tellement hâte qu’elle disparaisse de notre horizon que certains en viennent à souhaiter, de moins en moins discrètement, que Bachar écrase ses opposants une fois pour toutes. Et qu’on n’en parle plus.

Cela ne sera pas, car les révolutionnaires de Syrie sont allés trop loin pour jamais reculer. Ni les Scud, ni les gaz ne parviendront à les briser.

Le graffiti préféré que je ramène d’Alep est le suivant :

« La révolution que nous voulons, c’est la révolution de la vie. »

Et c’est ce message d’espoir que je vous ramène, malgré tout, d’Alep, chers riverains.

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Syrie. Lettre de Bachar al-Assad à son père


Cher Papa,

Je sais que tu te faisais beaucoup de souci pour moi avant de mourir. Je crois que tu avais tort. Tout s’est en effet très bien passé au moment de la succession. J’ai eu ensuite quelques petits problèmes avec le Liban (il m’a fallu liquider Hariri), mais il a suffi de faire le gros dos pour que, petit à petit, tout rentre dans l’ordre. La Syrie a prospéré au cours des dix premières années de mon règne. Je dois dire que le cousin Rami m’a beaucoup aidé. Tout allait bien et tout aurait pu durer ainsi éternellement – même s’il me fallait périodiquement emprisonner des contestataires -, sans l’agitation que Ben Ali et Moubarak ont laissé se développer dans leurs pays. Tu imagines ? : Ils ont été renversés. Pire encore, Kadhafi a été écharpé par son peuple.

Bien entendu, le mouvement de protestation a fini par arriver chez nous. Je me suis souvenu de la manière inflexible avec laquelle tu avais traité les Frères et j’ai suivi ton modèle. J’ai transformé toutes les villes de Syrie – ou peu s’en faut – en autant de Hama. Le problème, que tu n’avais pas rencontré en 1982, est qu’il m’a été impossible de boucler le pays. Avec les moyens de communication qui ont cours aujourd’hui, les images de la répression se sont répandues dans le monde entier.

Au début, cela m’a beaucoup inquiété. Toutes ces démocraties qui, périodiquement, venaient me parler de droits de l’homme risquaient de vouloir intervenir, comme elles l’ont fait en Libye. Mais – le croiras-tu ? – elles n’ont pas bronché. Bien entendu, elles m’ont traité de tous les noms : « boucher », « assassin », tous les qualificatifs désobligeants y sont passés. J’ai eu droit aussi à des remarques ridicules sur la perte de toute légitimité. Curieux, comme ces dirigeants sont incapables de concevoir que nous ne pensons pas comme eux. Mais ils se sont contentés de discourir.

Il est vrai que les Russes m’ont beaucoup aidé. Tu avais vraiment raison de conclure une alliance avec eux. Ces gens-là ont la même façon de voir les choses que nous. Et ils se moquent de toutes ces remarques grotesques sur la vérité et le mensonge, le bien et le mal. Ils savent que la seule chose qui compte est de rester au pouvoir. Avec les Chinois, qui m’ont toujours paru moins convaincus qu’eux, mais qui les ont suivis, ils ont tout bloqué au Conseil de sécurité. Les Occidentaux n’ont pas osé passer outre et recommencer ce qu’ils avaient fait pendant la guerre de Bosnie. Ils ont même publiquement assuré que jamais ils n’interviendraient en Syrie. Je n’en attendais pas tant, mais, bien sûr, j’en ai profité pour réprimer à tout-va.

Les Iraniens m’ont, eux aussi, beaucoup aidé. Tes anciens collaborateurs m’avaient critiqué de m’être rapproché de l’Iran lorsque tout allait encore bien pour nous. Ils voient maintenant que j’avais raison. Je sais bien que les Perses ne me soutiennent pas pour mes beaux yeux bleus, mais pour garder leur emprise sur la région. Qu’importe, tant qu’ils me fournissent (comme les Russes) des armes et même des hommes. Le Hezbollah est je dois dire un précieux allié : tu as eu une riche idée en encourageant sa création.

Tout n’est pas réglé, loin s’en faut, mais je tiens toujours Damas et les rebelles ne disposent pas d’autant de matériel que l’armée du régime. Rien n’est perdu. Fidèle à ton enseignement, je crois qu’il me suffit d’attendre que l’ennemi s’épuise. Au pire, nous nous replierons sur notre montagne et, d’une manière ou d’une autre, nous continuerons à nous battre et à empêcher la Syrie et ce peuple, si ingrat, de se relever.

Ce qui m’a le plus frappé dans toute cette affaire, ce sont les contradictions, la pusillanimité et la lâcheté des peuples occidentaux. Au fond, ils ne savent pas ce qu’ils veulent. Ils dénoncent ma politique, réclament mon départ, veulent me faire juger à la CPI tout en continuant à m’envoyer des émissaires. Rends-toi compte : ils ont ressorti Kofi Annan et maintenant Lakhdar Brahimi pour jouer ce rôle !

Je suis parvenu à les manipuler d’une manière digne de toi. C’est tellement facile de les embrouiller en faisant croire que certaines de nos opérations ont été menées par des rebelles que ce n’en est même plus drôle. Ils en sont à donner des leçons de morale aux généraux rebelles plutôt que des armes. Car, vois-tu, ils ne supportent pas l’idée que l’armée rebelle puisse tuer qui que ce soit, y compris les chabbiha. En revanche, si, comme la semaine dernière, je fais égorger 400 civils, dont pas mal d’enfants, ils ne réagissent même pas.

J’ai aussi repris ta technique du repoussoir jihadiste. Cela marche à tous les coups. Je n’ai eu qu’à libérer quelques-uns des terroristes maison et à demander aux « services » d’inoculer ce poison dans les rangs des rebelles. Quelques attentats bien organisés ont jeté le discrédit sur l’opposition armée. Le succès a dépassé toutes mes espérances ! Alors que nos ennemis commençaient à susciter un début de sympathie en Occident, il n’est plus question dans leurs médias que de la menace « islamiste » ! Il est vrai que les brigades jihadistes font vendre les journaux ou regarder les nouvelles à la télévision, bien plus que mes massacres.

Un dernier exemple de la faiblesse de caractère des Occidentaux. Obama (l’actuel président américain) et ses homologues britanniques et français m’avaient menacé il y a quelques mois si j’utilisais des armes chimiques. Curieux qu’ils ne se soient pas rendu compte que cela signifiait a contrario que je pouvais tuer autant de Syriens que je voulais par d’autres moyens (je suis récemment passé aux SCUDS : cela marche très bien), sans qu’ils ne s’en mêlent. J’ai voulu voir jusqu’où je pouvais aller – d’autant que les Iraniens étaient intéressés eux aussi par ce test. J’ai donc fait tirer quelques missiles armés de produits chimiques à dose réduite. La première fois, l’Américain, l’Anglais et le Français ont décrété qu’il n’y avait pas de preuves. J’ai donc recommencé à plusieurs reprises. Cela devenait difficile à Obama de prétendre que je n’avais pas franchi ce qu’il avait qualifié de « ligne rouge ». Ne voulant décidément rien faire contre moi, il a ajouté une seconde condition : il faudrait que les armes chimiques soient employées à grande échelle pour « changer le jeu ». Le « jeu » ! Je peux donc continuer à m’amuser tranquillement à détruire la Syrie à petit feu. Quand on pense que la droite américaine soupçonne cet Obama d’être musulman !

Comme tu le vois, cher Papa, j’ai tout bien en main. J’ai bien retenu toutes les leçons que tu m’as enseignées et je les appliquerai jusqu’au bout, dussè-je pour cela détruire complètement le pays.

Ton fils dévoué,

Bachar

(Avec l’assistance d’Isabelle Hausser)

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http://petitseigneur.com/lettre-de-bachar-al-assad-a-son-pere/

Nouvelle tuerie en Syrie: découverte de près de 80 corps de jeunes exécutés


Créé le 29-01-2013 à 12h47 – Mis à jour à 22h02

 Au moins 65 jeunes hommes, exécutés d'une balle dans la tête, ont été retrouvés dans un quartier rebelle d'Alep, a indiqué mardi l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).<br /><br />
(c) Afp
Au moins 65 jeunes hommes, exécutés d’une balle dans la tête, ont été retrouvés dans un quartier rebelle d’Alep, a indiqué mardi l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). (c) Afp

ALEP (Syrie) (AFP) – Près de 80 corps de jeunes gens exécutés ont été découverts mardi dans la cité syrienne d’Alep, dernier carnage en date dans le pays en guerre, à quelques heures d’une intervention du médiateur international Lakhdar Brahimi à l’ONU.

L’émissaire des Nations-Unies et de la Ligue arabe en Syrie devait rendre compte vers 20H00 GMT au Conseil de sécurité de ses efforts, en vain jusque-là, à mettre fin à une révolte devenue guerre civile qui a fait plus de 60.000 morts en près de deux ans selon l’ONU.

Sur le terrain, les violences n’ont connu aucun répit, avec la découverte notamment de dizaines de corps à Alep, la métropole du Nord en proie aux combats entre soldats et insurgés.

A l’école Yarmouk, où s’entassent les cadavres, un rebelle de l’Armée syrienne libre (ASL) Abou Seif a affirmé que 78 corps avaient été récupérés dans la rivière Qouweiq et qu’il en restait encore une trentaine que l’ASL ne peut pas récupérer en raison des tireurs embusqués du régime.

« Nous ne savons pas qui ils sont car ils n’ont pas de pièces d’identité », a déclaré un volontaire en aidant à mettre un corps dans un camion. Dans le véhicule, un correspondant de l’AFP a pu compter quinze cadavres.

L’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), qui s’appuie sur des militants et des médecins, a fait état de « 65 cadavres non identifiés retrouvés à Boustane al-Kasr », quartier tenu par les rebelles.

« Agés d’une vingtaine d’années, ils ont été exécutés d’une balle dans la tête. Vêtus en civil, la majorité ont les mains liées derrière le dos », a-t-il ajouté. Ils ont été sortis de la rivière qui sépare Boustane al-Kasr et Ansari, quartier également aux mains des rebelles.

Le régime les a « jetés dans la rivière pour qu’ils arrivent dans la zone sous notre contrôle et que les gens croient que nous les avons tués », a affirmé de son côté Abou Seif.

Mais un responsable au sein des services de sécurité a affirmé à l’AFP qu’il s’agissait de « citoyens de Boustane al-Kasr qui ont été enlevés par des groupes terroristes après avoir été accusés d’être en faveur du régime ». Le régime assimile les rebelles à des « terroristes ».

Corps jetés dans la rivière

« Leurs familles ont essayé de négocier (leur libération) sans succès à plusieurs reprises avec les groupes terroristes », a-t-il dit, ajoutant: « ils ont été exécutés dans la nuit de lundi à mardi et leurs corps ont été jetés dans la rivière ».

Rebelles et régime s’accusent mutuellement de massacres, mais il n’est pas possible de confirmer les informations de source indépendante.

Ailleurs dans le pays, les insurgés ont réussi une percée majeure à Deir Ezzor (est) en prenant un poste des renseignements politiques et deux ponts enjambant l’Euphrate, sur la route utilisée par l’armée pour approvisionner la cité de Hassaké, plus au nord, a précisé l’OSDH.

« Si les rebelles continuent leur avancée, ils remporteront une victoire stratégique car la ville est la clé de toute la province (éponyme) qui recèle les principaux champs pétroliers et gaziers du pays », a affirmé à l’AFP le directeur de l’OSDH, Rami Abdel Rahmane.

Les rebelles contrôlaient par ailleurs quasi-totalement la prison centrale d’Idleb (nord-ouest), selon l’ONG. Une source au sein des services de sécurité a confirmé que les soldats avaient évacué lundi soir la prison et les détenus ont été transférés dans des sièges des services de sécurité dans la ville.

A Damas, un député a été grièvement blessé par l’explosion d’une bombe fixée à sa voiture, selon l’OSDH.

Selon un bilan provisoire de l’OSDH, les violences ont fait mardi 91 morts: 38 civils, dont six enfants, 30 soldats et 23 rebelles.

Alors qu’une conférence de donateurs est prévue mercredi au Koweït pour débloquer des fonds en faveur des civils syriens, des organismes de charité ont promis 182 millions de dollars d’aide et les Etats-Unis ont annoncé une aide supplémentaire de 155 millions de dollars.

Médecins sans frontières (MSF) a regretté de son côté que l’aide internationale souffre d’un « grave déséquilibre » au détriment des « zones insurgées ».

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SYRIE. Pourquoi Poutine rapatrie-t-il ses ressortissants ?


Créé le 22-01-2013 à 17h24 – Mis à jour à 18h50

Moscou douterait-il de la solidité de son allié ? Ou Assad se prépare-t-il à une guerre totale et a prévenu son allié?

 

Bachar al-Assad s'apprêtrait à briguer un nouveau mandat en 2014. (HOPD/AP/SIPA)

Bachar al-Assad s’apprêtrait à briguer un nouveau mandat en 2014. (HOPD/AP/SIPA)

Le régime syrien et son allié russe craindraient-ils pour le maintien du clan Assad au pouvoir en Syrie, alors que la répression se poursuit toujours dans le pays ? En deux jours, des signes de crise de confiance sont apparus. A moins que Damas ne se prépare à une offensive encore plus meurtrière dans le pays…

Premier signe récent de doutes au sein même du cercle au pouvoir, la mère de Bachar al-Assad, Anissa Makhlouf, aurait quitté Damas pour Dubaï ont annoncé à l’AFP des résidents syriens ainsi qu’un opposant. Selon ces derniers, elle se trouverait à Dubaï depuis une dizaine de jours auprès de sa fille, Bouchra, l’unique sœur du chef de l’Etat syrien. Bouchra est la veuve de l’un des principaux responsables de l’appareil sécuritaire en Syrie, le général Assef Chawkat, tué en juillet dans un attentat qui avait également coûté la vie à trois autres hauts responsables syriens.

Pour l’opposant Ayman Abdel Nour, président du groupe « Chrétiens syriens pour la démocratie » et rédacteur en chef du site all4syria.com, « son départ de Syrie est une nouvelle indication qu’Assad perd ses appuis même au sein de la famille ». Le pouvoir en Syrie est concentré depuis des dizaines d’années entre les mains de la famille Assad et de certains membres de la famille Makhlouf. Et selon certains analystes ce clan se serrait encore resserré ces derniers mois pour ne concerner qu’un noyau restreint de personnes. Le départ d’Anissa Makhlouf n’est donc pas un signe très positif pour le régime.

Moscou rapatrie des ressortissants

Par ailleurs, une responsable du ministère russe des Situations d’urgence, citée par l’agence Interfax, a annoncé que « sur la demande des dirigeants russes, le ministère a envoyé (…) à Beyrouth deux avions pour que tous les Russes qui le souhaitent puissent quitter la Syrie », évoquant le nombre de 100 personnes sur le point de fuir le pays. Crise de confiance de Moscou vis-à-vis de Damas ? Doutes sur les capacités d’Assad à rétablir le calme dans le pays? Prise de conscience au Kremlin de la déliquescence de la situation sur place ? Rien de tout ça, assure un diplomate russe. « Il y a des milliers de ressortissants russes en Syrie. Le problème est que les liaisons aériennes russes ne fonctionnent plus depuis Damas, donc nous aidons quelque 100, maximum 150 personnes, à quitter la Syrie via Beyrouth, qui est tout proche », a affirmé sous le couvert de l’anonymat à l’AFP le diplomate, niant qu’une opération d’évacuation était en cours. « Dès que suffisamment de personnes auront demandé une assistance au consulat à Damas, nous organiserons de nouveaux vols », a-t-il précisé.

Nouvelles forces paramilitaires

Il n’en demeure pas moins que le régime syrien, pour faire face aux nombreuses pertes dans les rangs de son armée régulière, a annoncé la création d’une force paramilitaire pour aider l’armée dans sa lutte contre les insurgés dont les victoires militaires se succèdent dans ce conflit qui a fait plus de 60.000 morts en 22 mois. Cette « Armée de défense nationale » doit regrouper les Comités populaires, des civils favorables au régime qui ont pris les armes dans leurs quartiers pour empêcher les rebelles de l’Armée syrienne libre (ASL) d’y pénétrer. Depuis le début du conflit, le régime s’appuie sur de redoutables miliciens, les chabbihas, accusés des massacres les plus barbares. Quelle soit due à une crise de confiance ou non, la création de cette nouvelle armée non professionnelle, qui risque d’engendrer de nouvelles exactions dans le pays, est un nouveau signe de fuite en avant.

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Syrie. Le régime aurait utilisé une arme chimique à Homs


Syrie. Le régime aurait utilisé une arme chimique à Homs

Mis à jour le 19/01/2013 | 17:23 , publié le 19/01/2013 | 16:58
Des rebelles syriens, dans les quartiers nord d'Alep, le 13 novembre 2012.Des rebelles syriens, dans les quartiers nord d’Alep, le 13 novembre 2012.

(JAVIER MANZANO / AFP)

C’était une « ligne rouge » à ne pas franchir, selon les avertissements de Washington. Pourtant, le régime syrien aurait bien utilisé une arme chimique contre des opposants, selon Le Monde daté du 20 janvier, sans déclencher d’intervention internationale en Syrie. Le site d’informations Foreign Policy (en anglais) précise que le ministère américain des Affaires étrangères avait été informé de la manoeuvre. Francetv info détaille ce que l’on sait de l’affaire.

De quelle arme chimique s’agit-il ?

Le gaz employé n’est pas nommé par Le Monde, « faute d’échantillon » à analyser. Il s’agirait d’une « arme chimique incapacitante, non létale », précise le quotidien, qui cite des sources au sein de services de renseignements occidentaux. Pourtant, Foreign Policy, s’appuyant sur un télégramme diplomatique, affirme avec une quasi-certitude qu’il s’agit d' »Agent 15″, un gaz paralysant qui provoque notamment de graves troubles respiratoires, des nausées et peut entraîner la cécité et la mort.

Où et quand ?

Le régime aurait tiré quatre roquettes chargées de gaz sur Homs, l’un des centres nerveux de l’opposition, le 23 décembre. Dès le lendemain, l’opposition avait dénoncé l’usage de grenades dont « s’échappait une fumée blanche ». C’est la première date à laquelle cette arme aurait servi.

Un test de Bachar Al-Assad ?

« La décision de l’employer a été prise tout au sommet » de l’Etat syrien, selon Le Monde. L’objectif, d’après les multiples sources anonymes du quotidien était de tester la réaction des Occidentaux. Car les Etats-Unis, suivis de la France et d’autres puissances occidentales avaient mis en garde Damas. L’emploi d’armes chimiques était « une ligne rouge » dont le franchissement aurait « des conséquences », avait menacé Barack Obama, sans plus de précision. Dans la foulée, en août 2012, François Hollande affirmait qu’il s’agirait d’une « cause légitime d’intervention directe ».

Washington informé par un diplomate ?

La porte-parole du Département d’Etat américain, Victoria Nuland, interrogée sur les révélations de Foreign Policy, n’a pas contesté l’existence d’un télégramme diplomatique, envoyé par le consul américain à Istanbul, Scott Frederic Kilner, informant le ministère des Affaires étrangères de l’utilisation de gaz. Mais elle en a écarté la conclusion : « Nous avons vérifié les informations obtenues, et n’avons trouvé aucun élément crédible permettant de corroborer ni confirmer que des armes chimiques ont été employées ».

Francetv info

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SYRIE. Discours d’Assad : de Paris à Berlin, des réactions outrées


Créé le 07-01-2013 à 07h09 – Mis à jour à 12h26

VIDÉO. Opposition et communauté internationale condamnent l’allocution du président syrien, qui a proposé ce dimanche une sortie du conflit selon ses conditions.

Le président Bachar al-Assad a présenté dimanche 6 janvier une « solution politique » pour mettre fin au conflit.

Le président syrien Bachar al-Assad a proposé dimanche 6 janvier un plan « politique » impliquant son maintien au pouvoir, une solution aussitôt rejetée par l’opposition et la communauté internationale.

Dans sa première allocution en sept mois, Bachar al-Assad s’est montré inflexible, assurant encore une fois que le conflit qui a fait, selon l’ONU, plus de 60.000 morts, n’opposait pas le pouvoir et l’opposition mais « la patrie et ses ennemis » qui souhaitent sa partition.

Paris dénonce un  « déni de réalité »

Le discours du président syrien a provoqué des réactions outrées de la France, de la Grande-Bretagne, de l’Allemagne et des Etats-Unis, tandis que le pape Benoît XVI a lancé un appel à un « dialogue constructif ».

La France a ainsi dénoncé lundi 7 janvier « le déni de réalité » du discours du président syrien, et demandé une nouvelle fois son départ du pouvoir. « Ces déclarations qui interviennent peu après la publication par les Nations unies d’un rapport mettant en lumière les exactions commises par son clan, ne trompent personne », assure dans une déclaration Philippe Lalliot, porte-parole du Quai d’Orsay. « Le départ de Bachar el-Assad reste une condition incontournable de la transition politique, comme le rappelle la Coalition nationale syrienne » (opposition), ajoute-t-il.

Assad « au-delà de l’hypocrisie »

Sur Twitter, le chef de la diplomatie britannique, William Hague, a estimé que les « vaines promesses de réformes » de Bachar al-Assad « ne trompent personne », estimant que le discours du président allait « au-delà de l’hypocrisie ». Berlin a regretté qu’il n’exprime « aucune nouvelle prise de conscience ».

Pour Washington, le discours du président syrien « est une nouvelle tentative du régime pour s’accrocher au pouvoir (…). Son initiative est déconnectée de la réalité », selon la porte-parole de la diplomatie, Victoria Nuland. L’Union européenne l’a exhorté à se retirer pour permettre « une transition politique ».

Depuis le Vatican, où il s’exprimait devant les ambassadeurs du monde entier – , comme le veut la tradition en chaque début d’année – Benoît XVI a lui aussi réagi aux propos de Bachar al-Assad : « Le conflit ne connaîtra pas de vainqueurs mais seulement des vaincus s’il perdure », a affirmé le pape, qui a évoqué « les effroyables souffrances » des Syriens, renouvelant « son appel afin que les armes soient déposées et que prévale le plus tôt possible un dialogue constructif ».

« Plus de 60.000 martyrs »

L’opposition a, de la même façon, rejeté ce plan, accusant le chef d’Etat de vouloir choisir ses interlocuteurs et de chercher à se maintenir au pouvoir. Le porte-parole de la Coalition de l’opposition, Walid al-Bounni, a affirmé, joint par téléphone à Beyrouth, que l’opposition souhaitait « une solution politique, mais l’objectif pour les Syriens est de sortir (M. Assad) et ils ont déjà perdu pour cela plus de 60.000 martyrs (…) ils n’ont pas fait tous ces sacrifices pour permettre le maintien du régime tyrannique ».

Alors que Bachar al-Assad a présenté pour la première fois une feuille de route aussi détaillée pour une sortie de crise, les Frères musulmans syriens, importante force d’opposition, ont estimé dans un communiqué que ce plan ne représentait « rien », qualifiant le dirigeant de « criminel de guerre devant être jugé ».

Devant un parterre de partisans réunis à la maison de la culture et des arts, Bachar al-Assad a appelé à un dialogue pour lequel il a affirmé ne pas avoir trouvé jusqu’à présent de « partenaire ». Depuis qu’a éclaté en mars 2011 une révolte populaire devenue guerre civile, Damas affirme combattre des « terroristes » armés et financés par l’étranger.

« Terroristes »

Refusant de négocier avec « des gangs qui prennent leurs ordres de l’étranger », le président a proposé un plan en trois étapes qui commencera par un engagement des pays finançant les « terroristes » « à arrêter ». Aussitôt après, l’armée cessera ses opérations, a-t-il promis, « tout en conservant le droit de répliquer ».

Dans ces conditions seulement s’ouvrira « une conférence de dialogue national », a-t-il poursuivi. Cette conférence devra rédiger une « Charte nationale » qui sera soumise à référendum, tandis qu’un nouveau Parlement et un nouveau gouvernement émergeront des urnes.

Toute transition doit « se faire selon les termes de la Constitution », a-t-il insisté, en faisant référence à des élections. Samedi, le quotidien libanais pro-syrien « Al-Akhbar » affirmait que Bachar al-Assad posait comme condition sine qua non la possibilité pour lui d’être candidat à sa propre succession en 2014.

« Une véritable guerre menée de l’étranger »

Sur le terrain, au moins 78 personnes, dont 36 civils, 22 rebelles et 20 soldats ont trouvé la mort dimanche, selon un bilan provisoire de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).

Bachar al-Assad avait prononcé son dernier discours le 3 juin devant le Parlement, et s’était depuis exprimé dans des médias turc puis russe, martelant à chaque fois que son pays faisait face « à une véritable guerre menée de l’étranger » et se posant comme un rempart contre le « terrorisme ».

Son discours intervient alors que le ballet diplomatique semble s’intensifier depuis quelques semaines, notamment dans la région.

source

Bachar Al Assad ignore le mécontentement populaire et tente de rassurer fidèles et alliés


Aurélien Pialou

Au cours de ce qui constitue l’événement médiatique du jour, le chef de l’Etat syrien Bachar al Assad s’est prononcé sur la manière dont il souhaitait conduire la Syrie pour lui permettre de surmonter la crise. Trois aspects de son dicours retiennent l’attention.

Nouveau discours, nouvelles promesses
(selon Ali Farzat)

Tout d’abord, la rhétorique. Dans le conflit en cours, il – le président… et ceux qui monopolisent avec lui les moyens de la violence qui s’exerce sur les masses – représente le peuple. Il ne fait que se défendre. Il est attaqué en raison de ses positions, ô combien courageuses, sur la Palestine, qui ne l’ont pas dissuadé, rappelons-le, d’attaquer récemment le camp de Yarmuk et de massacrer les Palestiniens qui y résident. Bref, le diptyque, « je suis la nation » et « la nation syrienne représente le monde arabe légitime », reste plus que jamais d’actualité dans la pensée présidentielle.

Ensuite, le programme. Il est clair. Un pardon circonstancié en fonction de critères obscurs, un dialogue national et un nouveau gouvernement. Précisons bien les termes. Le nouveau gouvernement demeurera sous la conduite du chef de l’Etat. Le dialogue national sera conduit et le pardon prononcé par les services compétents, les moukhabarat.

Enfin, le décorum. Des foules fanatisées qui ne crient pas pour défendre la Syrie, mais pour clamer leur amour de Bachar al Assad. Elles considèrent, mais sous une autre forme qu’en avril 2011, que leur « leader maximo » dispose de toutes les qualités requises pour accéder au titre et à la fonction de « président de l’univers ». Dans les rituels staliniens, il est indispensable de disposer d’une foule galvanisée, prête à s’enflammer quel que soit le discours. On est ici face au même cas de figure. En cela, il faut saluer la constance du président. Son discours d’avril 2011 et celui de janvier 2013 exploitent les mêmes arguments, les mêmes logiques, les mêmes visions, les mêmes méthodes. Le message est clair !

« Ophtalmo, guéris-toi toi-même »
(par Ali Farzat)

Pendant ce temps, la réalité devient chaque jour plus dramatique pour les Syriens, trop souvent occultée par la succession des événements. Elle offre deux faces, radicalement antagonistes.

D’un côté, le message du président et de son régime. Il s’écrit en lettre de sang. Le nombre de morts, objet d’un débat indécent depuis quelque jours, est brutalement passé de 47 à 60 000 morts durant la semaine écoulée. Ce « rattrapage » révèle la difficulté de ceux qui assitent au drame en simples spectateurs à percevoir l’ampleur du carnage. Alors qu’à l’intérieur, tout le monde s’entend pour parler de plus de 100.000 morts, voire peut-être 150.000, reconnaître une telle réalité reviendrait, pour les instances internationales, à reconnaître la faillite de leur approche. Que dire alors d’autres réalités de cette politique défendue et martelée par le président en personne ?  Que dire du million de Syriens et Syriennes torturés, dont quelques uns ne sont sortis des geôles du régime que pour décéder dans les jours suivants, et dont les autres ne se remettront sans doute jamais de cette épreuve, durablement brisés dans leur chair et leur être ? Que dire des quatre millions de Syriens jetés sur les routes par la destruction de leur demeure, grâce au zèle d’une armée qui brûle le pays pour sauver un seul homme, son « dieu », Bachar al Assad ? Faudra-t-il être en mesure de dénombrer les yeux arrachés dans les geôles syriennes par les sbires assadiens, pour comprendre notre aveuglement ? Le message est pourtant clair !

De l’autre côté, le manque de recul dissimule quelques traits qui ne manquent pourtant pas de force. Bien qu’affecté et meurtri, le peuple syrien reste uni dans l’épreuve. Il n’est pas une famille qui ne compte pas de martyrs, morts pour que vive un président dont l’unique souci est de se maintenir. Mais ces mêmes familles, dans leur majorité, participent à l’entraide quotidienne. Dans le chaos syrien, déclenché, maintenu et accru par la seule volonté d’un chef à mille lieues de la réalité, les Syriens font preuve d’un courage sans nom pour s’aider les uns les autres. Aujourd’hui, le lien social qui fait que la Syrie demeure un pays – et qu’elle le demeurera – tient à la solidarité quotidienne entre ses habitants, qui pour loger un proche déplacé, qui pour fournir une couverture, qui pour conduire un blessé vers un espace de soin, qui pour le soigner, qui pour fournir un panier de nourriture… Et ce sont ces Syriens anonymes, grâce à qui la Syrie reste unie après deux ans bientôt de massacres et de tortures, qui sont qualifiés, par la loi de juillet 2012, de « terroristes » !

« Même pas peur… »
(selon Ali farzat)

La Syrie d’aujourd’hui, c’est la rencontre de deux forces. L’une est celle du peuple. L’autre celle d’une mécanique dévastatrice. La première, incarnée dans l’Armée Syrienne Libre, a libéré depuis le mois d’août dernier la majorité des espaces ruraux du pays. Elle a assuré la maitrise des axes dans le Nord du pays. Elle a récupéré de nombreux quartiers dans les villes. De manière évidente, tout espace qui bascule se libère, et aucune force, quelle que soit sa puissance de feu, ne permet de le récupérer. Sur le terrain, le message est donc clair.

Et pourtant, malgré la limpidité de ce message, que fait la communauté internationale ? Successivement, à différents niveaux, elle a envoyé des observateurs qui ont vu le peuple syrien se faire massacrer. Puis elle s’est décidée à deléguer des médiateurs, sans mandat précis et sans capacité de contrainte. On en voit le résultat dans les pérégrinations touristiques de Lakhdar Brahimi, qui, affolé par la dégradation de la situation humanitaire sur le terrain, répète qu’il « faut trouver une solution ». Mais cette même communauté internationale reste paralysée, imputant tour à tour son immobilisme à la complexité de la situation, à l’absence de structuration de l’opposition, aux désaccords prévalant entre les puissances, et au blocage par la Russie et la Chine de tout processus politique. Leur inaction ne dissuade pas ces mêmes pays de poclamer leur « soutien ».

Les Syriens n’attendent que deux choses de notre part. Ils ne veulent ni de corps expéditionaire, ni d’opération militaire. Ils ont démontré, depuis deux ans, leur courage et leur capacité au combat. En revanche, ils attendent toujours les moyens qui leur permettront d’acquérir les armes qui leur font défaut pour contrer la folie destructrice d’un régime aux abois. Et ils demandent que nous cessions de parler, que nous agissions, que nos gouvernements donnent effectivement les sommes qu’ils promettent dans leurs discours, et qu’on les laisse enfin se procurer ce dont ils ont besoin pour assurer leur survie…

Au nom de quoi ces demandes seraient-elles illégitimes? Quel peuple, dans son histoire, n’a pas affronté de temps compliqués ? Si George Washington avait été abandonné sans arme et si un « dialogue » lui avait été imposé, les Etats-Unis auraient-ils aujourd’hui le privilège de vivre libre? Si les Alliés n’avaient pas consenti à fournir les matériels nécessaires pour contrer les forces de l’Axe, l’Europe serait-elle aujourd’hui une terre d’espoir et de droits pour ses citoyens?

A certains moments, il faut que les messages soient clairs!

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Des Syriens réduits à manger des racines


MINOUI,DELPHINE

Le Soir Page 10

Mercredi 26 décembre 2012

LE CAIRE

DE NOTRE CORRESPONDANTE

A Kafranbel, il n’y a plus d’écoles – elles servent d’abris aux milliers de Syriens des villages alentours qui fuient les bombardements du régime. D’ailleurs, il n’y a même plus de bancs ni de pupitres pour étudier. « On s’est mis à les brûler pour survivre au froid de l’hiver », raconte Raed Fares, un activiste, par le biais d’une connexion skype aussi fébrile que sa voix.

Près de deux ans après le début de l’insurrection contre Bachar el-Assad, sa ville est au bord de l’agonie. « Nous manquons de tout : d’essence, de lait en poudre pour les enfants, de pain », dit-il. Vendu au marché noir, et en quantités limitées, le fioul est inabordable pour la plupart des familles : en l’espace de quelques mois, il est passé de 0,6 dollar à plus de 3 dollars le litre. « Alors, pour pouvoir se réchauffer, les gens en sont réduits à couper les oliviers et les figuiers, dont ils brûlent le bois », raconte-t-il. Faute d’électricité, le feu garantit également un minimum de lumière à la nuit tombée, avant que la ville, située au Nord du pays, ne plonge dans l’obscurité la plus totale.

La journée, c’est la course aux denrées entre deux averses. « Trouver de quoi se nourrir est un combat quotidien. La grande boulangerie de la ville avait l’habitude d’approvisionner 22 villages. Aujourd’hui, elle est au point mort faute de fioul, de farine et d’argent pour payer ses employés. Du coup, vous pouvez passer votre journée à faire la tournée des quartiers et à faire la queue pendant des heures dans l’espoir de décrocher un morceau de pain », poursuit Raed Fares. Et bien souvent, ajoute-t-il, « les parents se contentent de quelques racines d’herbes bouillies, ramassées au fond des vergers, pour laisser le pain aux plus jeunes ».

Les nouveau-nés, eux, sont nourris à l’eau de riz selon l’ONG Avaaz, qui évalue à 2,5 millions le nombre de déplacés qui ont fui leur logement à cause de la guerre. Dans son nouveau rapport, le Programme alimentaire mondial estime à un million le nombre de Syriens qui vont être victimes de la faim cet hiver. L’organisation onusienne, qui avoue souffrir d’un manque de financement, se dit également dans l’impossibilité d’approvisionner certaines zones à cause de la violence des combats et des bombardements.

Des raisons que Raed Fares refuse d’accepter. « Kafranbel est à 10 kilomètres de la Turquie. La frontière est ouverte et la route est relativement sûre. Pourtant, aucune aide ne nous parvient. Je connais une famille de déplacés qui a trouvé refuge dans une des 13 écoles de Kafranbel. Les gamines passent leur temps à faire des bonds sur place pour ne pas mourir de froid : est-ce une façon de vivre ? Où est la communauté internationale avec ses belles promesses ? Si les étrangers ont peur de venir en Syrie pour nous aider, qu’ils nous approvisionnent à la frontière et on se chargera de faire la distribution dans les villages », s’emporte-t-il.

Dans la ville de Kafrnabod, au centre du pays, l’hiver est encore plus rude. « C’est une prison à ciel ouvert », lâche Adnan, un de ses habitants. Contacté lui aussi grâce à une connexion Internet bricolée clandestinement – le pouvoir de Damas ayant bloqué la téléphonie mobile dans la région de Hama depuis plus d’un an –, cet instituteur anti-Bachar raconte que les rebelles ont fini par libérer la ville du régime il y a quatre jours. Mais les habitants, recroquevillés entre la vie et la mort, ont à peine de quoi se nourrir. « L’armée s’est retirée mais elle nous assaille de bombes au quotidien. Impossible de sortir de Kafrnabod pour s’approvisionner dans les autres villes : les tanks sont postés à 5 kilomètres. Et quand bien même nous voudrions prendre la voiture pour nous réfugier ailleurs, il n’y a plus d’essence pour remplir les réservoirs », ajoute Adnan.

A Kafrnabod, où la température frôle le zéro degré, la population se réchauffe avec des branches d’arbre et du vieux plastic brûlé. « C’est très toxique, mais on n’a pas d’autre solution », avance-t-il. Le pain, aliment de base des Syriens, est désormais rationné à la miette près et les médicaments font cruellement défaut. « Je connais une femme dont le nouveau-né, âgé de 22 jours, a fait une terrible poussée de fièvre. Quand elle a voulu l’emmener à l’hôpital de la ville la plus proche, l’armée lui a bloqué la route. Alors, elle est rentrée chez elle et son enfant est mort à 4 heures du matin. Des exemples comme celui-ci, j’en ai à profusion. Vous pensez peut-être qu’on exagère, qu’on invente des histoires. Mais dans notre pays, la réalité a dépassé la fiction. Toutes ces images d’horreur que vous voyez à la télévision, c’est un dixième de ce que nous vivons au quotidien », murmure Adnan.

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