En Bretagne, une femme construit depuis plus de 20 ans des petites maisons faites de chaux et de chanvre, parfaitement habitables. Des logements bon marchés, isolants et allant de pair avec un mode de vie respectueux de la nature.
Avec leur forme arrondie qui se fond dans l’environnement où elles sont construites, les Kerterres font penser à des habitats troglodytes. Voire à des maisons de récits fantastiques, façon Bilbo Le Hobbit. Sauf que là, ce n’est pas de la fiction : à mi-chemin entre l’oeuvre d’art sculptée et la bâtisse, ces petites maisons connaissent un succès grandissant. En breton, « Ker » signifie « lieu habité ». Le nom Kerterre renvoie donc à un retour à la terre via notre habitation.
C’est en tout cas le nom qu’a donné Évelyne Adam, ancienne professeure de piano, à ces petits habitats. « Il y a 21 ans, nous raconte-t-elle, un ami m’a donné du chanvre. Je l’ai mélangé à de la chaux, et j’ai vu que ça carbonatait, que cela devenait de la pierre. » Après des années d’expérimentations, quelques formations de maçonnerie ici et là, elle est parvenue à bâtir de véritables maisons habitables à l’aide de ce matériau naturel.
© Kerterre. Sculptées à la main, les Kerterres peuvent prendre des formes diverses très esthétiques qui se mêlent à leur environnement.
Le mélange du chanvre et de la chaux permet ainsi de créer une matière très isolante et surtout solide : « Mes petites grottes sont garanties plus de 1000 ans ! Même si je ne serai plus là…», s’amuse la créatrice des Kerterres. La Kerterre est sculptée à partir de mèches de chanvre trempées dans la chaux, qui viennent s’entremêler en créant un mur autoportant.
Prix : 500 euros pour un dôme de 3 mètres de diamètre
Mais surtout, ce matériau naturel permet de construire des maisons à très bas coût. Pour une Kerterre « moyenne », de 3 mètres de diamètre, comptez environ 500 euros de matériel (il faudra tout de même ajouter le prix des portes et fenêtres). « J’ai toujours pensé que les maisons coûtaient trop cher à la nature, et aux humains. Avec la Kerterre, pas besoin de s’endetter pour 25 ans de crédit ! », précise-t-elle.
Il est possible, avec du temps et de la motivation, de construire sa Kerterre tout seul, la technique étant plutôt simple (en gros, on plonge des longues mèches de chanvre dans un mélange de chaux, d’eau et de sable, et on a notre matériau !).
Quelques notions de base sont toutefois utiles pour bâtir sa Kerterre. C’est pourquoi Evelyn Adam et son équipe proposent des stages et formations tout au long de l’année. Si l’on possède un terrain, on peut même accueillir chez soit un stage de Kerterre pour construire sa maison à l’aide d’une équipe et des formateurs. Pour un stage de 5 jours, comptez 395 euros, et pour une formation complète de trois semaines, il faudra débourser environ 1800 euros.
« Il y a 20 ans, on se moquait de moi. Et maintenant, la demande explose ! »
Les Kerterres d’Évelyne Adam suscitent un véritable intérêt aujourd’hui en France. De plus en plus de personnes se lancent ainsi dans l’aventure, à la recherche d’un habitat plus simple, plus proche de la nature. Dans la lancée du mouvement des Tiny house ou autres habitats minimalistes, la Kerterre prend de l’ampleur dans l’Hexagone. La créatrice des Kerterres explique ainsi que « les inscriptions pour les formations sont très vite complètes. À terme, on va devoir recruter plus de formateurs. » Amusée, elle nous confie : « Il y a 20 ans, on se moquait de moi. Et maintenant, la demande explose ! »
Certains choisissent de construire tout leur habitat à la manière d’une Kerterre, d’autres vont simplement en construire une dans leur jardin pour y installer un atelier, une chambre d’ami…
« On a une majorité de femmes qui participent au stage, raconte Évelyne Adam. C’est le réveil de la femme constructrice ! ». La Kerterre ne nécessite pas spécialement de force physique et peut en effet permettre à des femmes de construire leur maison, toute seule.
© Kerterre / À l’intérieur des Kerterres, des pièces confortables.
Le Kerterre : Une philosophie de vie plus qu’un habitat
Mais c’est avant tout une façon de vivre qui est prônée avec ce type d’habitat. Évelyne Adam dit que ses Kerterres permettent de « bonifier » la terre autour de soi. En plus d’être construite à partir de matériau 100% naturel, la Kerterre a vocation à se fondre dans l’environnement où elle est bâtie. Ces types de structure impliquent l’installation d’électricité hors réseau via des panneaux solaires par exemple, ou la mise en place de toilettes sèches. Ce mode de vie peut sembler quelque peu rustique pour certains. Pour d’autres, vivre comme un hobbit, c’est tout simplement la clef du bonheur !
Pour en savoir plus, un documentaire a été réalisé par Nikita Gouëzel sur les Kerterres, intitulé « Pour moi et plus que moi ».
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