en France, l’étranger n’est ni un problème ni une menace
[vimeo vimeo.com/125478738]Archives Mensuelles: mai 2015
L’aviation israélienne bombarde Gaza
Syrie: Daech perd le contrôle de tous les villages chrétiens assyriens
« A l’issue d’une offensive de dix jours les combattants kurdes ont pris le contrôle, en début de semaine, des 14 villages assyriens que l’EI contrôlait depuis février », a affirmé à l’AFP Rami Abdel Rahmane, directeur de l’OSDH.
Le 23 février, l’EI s’était lancé à l’assaut de la région de Khaddour, qui compte 35 villages assyriens, et les jihadistes avaient pris le contrôle de quatorze d’entre eux, poussant à la fuite plus de 5.000 personnes. L’EI garde toujours en otage 210 Assyriens. Les Assyriens, une communauté parmi les plus anciennes converties au christianisme, sont environ 30.000 en Syrie, soit 2,5% des 1,2 million de chrétiens du pays.
Des maisons piégées par Daech
Ils vivent en majorité dans 35 villages de la province de Hassaké, dans le nord-est de la Syrie. Ces villages sont aujourd’hui tenus par les forces kurdes et quelques uns par le régime. Selon Oussama Edward, directeur du réseau assyrien des droits de l’homme (RADH) basé à Stockholm, « le contrôle des villages par les Kurdes a été rendu possible à la suite de violents raids de la coalition internationale » anti-jihadiste conduite par les États-unis.
Il a précisé à l’AFP que les photos qu’il a pu avoir entre les mains « montrent un grand nombre de destructions de maisons et d’églises ». « La majorité des habitants ont peur de revenir car ils craignent que l’EI ait piégé leur maison avant de s’enfuir », a-t-il ajouté. L’EI a profité de la guerre qui fait rage en Syrie depuis 2011 pour s’implanter dans le pays, qu’il contrôle désormais à 50%, selon l’OSDH.
Par ailleurs, toujours selon l’OSDH, les forces kurdes ont pris le contrôle mercredi de la cité de Mabrouké, au sud-ouest de la ville frontalière de Ras al-Aïn, dans la province de Hassaké et qui comptait environ 50.000 habitants avant la guerre.
La localité dispose d’un point de passage menant à Ceylanpinar en Turquie, et les villages alentours sont contrôlés par les Unités de protection du peuple kurde (YPG), la principale force kurde en Syrie. Mabrouké est un fief important de l’EI dans la zone, selon l’OSDH.
« Ce contrôle ouvre la route vers Tal Abyad », localité à la frontière turque utilisée par l’EI pour le passage de combattants en provenance de la Turquie, a dit Rami Abdel Rahmane, ajoutant que les forces kurdes s’étaient emparées de 4.000 km2 en vingt jours dans le nord de la Syrie.
Repair Café het clipje
Complotisme et antisémitisme : Avec qui manifester notre solidarité envers le peuple palestinien ?
Rédigé le 19 mai 2015 par: Marie Peltier
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La question de l’importation du conflit israélo-palestinien est régulièrement évoquée dans le débat public depuis plusieurs années. Derrière cette appellation souvent floue, se cachent des enjeux complexes et multiples, souvent instrumentalisés ou « brouillés » par certains partisans de l’un et l’autre « camp ». Parmi ces enjeux, la question de l’antisémitisme ne peut être contournée
Le lien entre la recrudescence de l’antisémitisme et l’enlisement du conflit politique en Israël/Palestine semble de plus en plus prégnant. Pour approcher cette question délicate, nous nous attacherons ici à un des nombreux aspects de cette problématique, non pas dans une optique exhaustive, mais bien pour ouvrir un questionnement : « Comment le complotisme instrumentalise-t-il la cause palestinienne dans une perspective antisémite? » ou, pour le dire en d’autres termes, « Comment le complotisme et l’antisémitisme ont-ils « contaminé » certains acteurs de la défense de la cause palestinienne? ».
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Antisémitisme et complotisme
Pour tenter d’apporter des éléments de réponse, il convient d’abord de souligner la dynamique du complotisme[1], qui se construit en 2 temps :
· Il s’agit d’abord de dire à l’individu qu’il ne peut plus croire personne car « tout le monde lui ment ». Les idéologues du « complot » instillent ainsi un doute fondateur sur toutes les réalités qui entourent le sujet. En essentialisant le réel, désigné comme un « système » organisé et intrinsèquement mensonger, l’opprobre est ainsi jetée sur toute parole autre que la leur.
· Vient ensuite la phase de sectarisation et de dogmatisation : « On vous apporte la seule vérité ». L’individu, qui a été mis en position de grand inconfort voire d’anxiété vis-à-vis des réalités politiques et médiatiques qui l’entourent, en vient donc à « boire » ce discours comme une réponse à ce malaise.
Les antisémites s’appuient généralement sur cette logique complotiste. Pour eux, les seules « réponses » mises en avant consistent en réalité à désigner des « coupables universels » : « Les responsables de tous vos/nos malheurs sont le lobby juif et/ou le lobby sioniste et/ou le lobby judeo-maçonnique », comprenez ici « les juifs ».
Certains acteurs de la défense de la cause palestinienne peuvent en venir à entretenir ou nourrir cette dynamique, parce qu’ils ne prennent pas garde au registre sémantique et rhétorique de leur positionnement. En effet, si certains, minoritaires, entretiennent cette rhétorique dans une perspective clairement antisémite, d’autres, plus nombreux, peuvent glisser vers ce registre simpliste et aux implications potentiellement haineuses par manque de vigilance quant à la terminologie et à la matrice de leur discours. Dès lors, comment y voir clair ?
Posture « anti-système » et instrumentalisation de la cause palestinienne
La nébuleuse complotiste, et plus particulièrement dans le monde francophone celle qui est alimentée par Thierry Meyssan, Dieudonné, Alain Soral et leurs « proches », a fomenté une posture présentée comme « anti-système ». Cette posture consiste en fait à rejeter en bloc tout discours militant, politique et médiatique autre que le leur, en fustigeant un « système » qui serait aux seules mains d’une élite mondialisée qu’il faudrait non pas combattre (car rien n’est proposé concrètement en termes d’actions) mais « dénoncer » en boucle.
Cette posture « anti-système » peut dans les faits se confondre avec le discours de certains militants véritables de la cause palestinienne qui s’enferment dans un anti-impérialisme (qui devient primaire et borgne), dans la mesure où ces derniers rendent le conflit israélo-palestinien paradigmatique, comme s’il suffisait à lui seul comme grille de lecture pour toute situation d’injustice au Proche-Orient, dans le monde, et pour la vie en société ici.
Il y a en effet une tendance assez prégnante dans certains mouvements de gauche et d’extrême-gauche à évacuer la complexité des logiques d’oppression, en se focalisant uniquement sur l’impérialisme américain, dont l’occupation par Israël des territoires palestiniens serait l’incarnation « suprême ». Dans cette logique binaire et souvent obsessionnelle, le glissement sémantique peut se faire rapidement. Car en « hyperbolant » une situation de réelle injustice, on prend le risque non seulement de la décrédibiliser, mais également de s’aveugler sur d’autres réalités et d’autres situations d’injustice tout aussi avérées[2]. Cette dynamique peut conduire certains à s’associer – consciemment ou inconsciemment – à des acteurs ou à des discours hostiles à la vision émancipatrice et progressiste qu’ils prétendent défendre.
Quelques balises pour y voir clair
Pour éviter de nourrir ces ambiguïtés et de glisser vers des compromissions inacceptables dans le combat démocratique et antiraciste, il y a, comme dans toute lutte, une importance capitale à préserver des lignes rouges clairement définies.
A cette fin, il n’est pas inutile de rappeler quelques basiles qui peuvent guider et clarifier le positionnement des acteurs engagés dans la défense de la cause palestinienne, afin d’apporter des éléments de réponse à cette question : « à quoi faut-il veiller pour un engagement militant cohérent et conséquent ? »
1) Il s’agit d’accorder une attention particulière aux sources bibliographiques et numériques utilisées pour notre combat. Au-delà du fait qu’ils diffusent beaucoup de fakes et de propos délirants, les sites antisémites et complotistes sont devenus « champions » dans la reprise d’articles « sérieux » et « intéressants » – qu’ils copient-collent sur leur site pour gagner de la crédibilité et pour élargir leurs réseaux. Il importe donc de ne pas céder à cette technique de manipulation « classique » des mouvements d’extrême-droite : on ne reprend pas un article même pertinent sur un site qui est par ailleurs antisémite et/ou négationniste et/ou soutenant explicitement d’autres situations d’injustice par ailleurs (par exemple certains régimes dictatoriaux au Proche Orient ou ailleurs dans le monde). Tout simplement parce que ces sites sont incompatibles et même hostiles au combat démocratique et pour la justice que nous menons.
2) Dans le même esprit, et de manière transversale, la justesse de l’imagerie mobilisée pour notre engagement militant est essentielle. En ce qui concerne la défense de la cause palestinienne, il s’agit de veiller aux représentations et à la symbolique utilisées, de manière à éviter tout registre « ethnique », tout cliché raciste et/ou historiquement chargé (les juifs banquiers, les juifs qui tirent les ficelles, les images et symboles évoquant le génocide juif et le nazisme, etc). Le registre symbolique choisi est en effet révélateur de la matrice de notre discours et de notre engagement : en venant « polluer » un combat avec des références lourdes de sens d’un point de vue mémoriel et sémantique, on prend le risque de détourner une action politique vers un discours de haine et de stigmatisation.
3) Parallèlement, l’attention aux mots, au vocabulaire utilisé est fondamentale. L’enjeu, encore une fois, est de veiller à n’entretenir ni l’ « hyperbolation », ni l’essentialisation, ni l’instrumentalisation mémorielle, et de bannir toute référence antisémite. Plus encore, il convient de redonner sens aux mots, en ne jetant pas en pâture une terminologie non-clarifiée auprès des personnes qui l’utilisent. A cette fin, l’exigence en termes de connaissance des enjeux est fondamentale : revenir sur l’histoire du conflit, sur la définition du sionisme, sur les différents acteurs en présence, sur une meilleure connaissance des sociétés civiles palestinienne et israélienne (etc.) permet de ramener les choses au « réel » et non à la « projection ». A cet égard, l’importance de la formation et de l’apport d’une information de qualité dans les écoles, auprès des acteurs sociaux, des militants, des politiques (etc.) est essentielle.
En filigrane de ces différents points d’attention, il y a une exigence : celle d’accorder une importance capitale – et conséquente – au choix des acteurs avec qui l’on s’associe. En quelques mots simples, on pourrait dire ceci : ce n’est pas parce qu’un acteur dit défendre la cause palestinienne que l’on doit considérer d’emblée qu’il est un allié. Et plus encore : l’intégrité du combat démocratique et antiraciste doit primer sur des alliances de circonstances qui portent préjudice à la cause et la décrédibilisent dans ses fondements.
Les perspectives à retrouver
Cet ajustage terminologique et sémantique est d’une nature bien plus fondamentale qu’un simple « toilettage » : il s’agit en réalité de se recentrer sur la lutte active, politique et militante que le complotisme, chantre de la passivité, évacue. Plutôt que de désigner des « coupables » en boucle, l’enjeu est de proposer des pistes concrètes d’action, de réflexion, dans une dynamique proactive, constructive et non-victimaire.
D’autre part, il est bien ici question de réinscrire notre engagement dans une visée universaliste de la lutte antiraciste et du combat pour la justice, tenant compte de la complexité des acteurs et des enjeux ainsi que de la diversité des situations d’injustice.
Car c’est bien en unifiant les luttes, et non en les divisant et en les opposant artificiellement, qu’elles peuvent gagner en crédibilité, en cohérence et en intégrité. Et qu’elles peuvent donc se rendre, in fine, plus audibles et efficaces.
[1] Sur cette question voir : Marie Peltier, « Complosphère et Dissidence, le triomphe de la posture », Pax Christi Wallonie-Bruxelles, Février 2015 –http://paxchristiwb.be/publications/analyses/complosphere-et-dissidence-le-triomphe-de-la-posture,0000554.html
[2] L’immobilisme de ces mêmes mouvements face au conflit syrien en a été un exemple révélateur.
16 produits victimes d’une traduction française totalement hilarante
Vous avez sûrement déjà lu la notice ou l’étiquette d’un produit sans comprendre la moitié de ce qui était écrit. Le célèbre « Made in Turkey » (Fabriqué en Turquie) traduit par « Fait en dinde » n’est pas un mythe. Découvrez une petite sélection hilarante !
Vous savez ce qu’on dit : « le français est une langue difficile et les subtilités sont complexes à comprendre pour les étrangers ». Alors oui, utiliser Google Traduction est extrêmement tentant mais parfois, il vaut mieux songer à faire sans, voire à ne pas traduire du tout et laisser ce travail à quelqu’un d’autre.
Comme nous l’ont fait remarquer nos adorables lecteurs, il ne s’agit pas d’une erreur pour l’image ci-dessus. Juste d’un triste choix en anglais 🙂
Personne n’est à l’abri d’une mauvaise interprétation et ce ne sont pas ces traductions qui prouveront le contraire. Mais entre nous, même si elles s’avèrent gênantes, elles nous font quand même bien rigoler. Rien que pour ça, chez SooCurious on a très envie de dire : Merci Google Translate ! Quelle est la traduction qui vous a le plus fait rire ? Avez-vous d’autres exemples en tête ?
Syrie : les rouages de la répression au grand jour

Des documents officiels sortis du pays décrivent la machine de terreur d’Al-Assad.
Plusieurs actes d’accusation pour crimes de guerre contre Bachar al-Assad et ses collaborateurs ont été de nouveau établis par une commission internationale financée par les Occidentaux. Ces actes se fondent sur des documents officiels sortis clandestinement de Syrie, selon un rapport de Commission internationale pour la justice et la responsabilité (Cija) dontThe Guardian se fait largement l’écho. Le quotidien britannique ajoute que la Cija, financée par plusieurs gouvernements occidentaux, a également établi des actes d’accusation contre la rébellion pour crimes contre l’humanité.
Ce matériel accumulé par la Cija ne peut pour le moment être déposé devant la Cour pénale internationale (CPI), la Chine et la Russie, un des meilleurs alliés d’Al-Assad, bloquant systématiquement à l’ONU toute possibilité de saisine du procureur sur le cas de la Syrie.
«Manie». Les preuves présentées dans les actes d’accusation sont fondées sur des documents gouvernementaux sortis de Syrie par une équipe de 60 enquêteurs syriens au péril de leur vie. Environ 500 000 pages ont été rassemblées par la Cija, à tel point qu’il a fallu recruter des employés pour visionner des heures de vidéos de crimes présumés commis par l’opposition ou les groupes jihadistes, dont l’Etat islamique (EI).
Si les trois actes d’accusation portent principalement sur les premiers mois du soulèvement contre le régime, à partir de mars 2011, ils mettent surtout en lumière la machine administrative de la répression. Les documents officiels subtilisés montrent des «ordres précis pour écraser le soulèvement populaire qui s’étendait de Damas aux différentes provinces», selon la Cija. Ainsi, la «manie du régime de donner des ordres écrits à travers la chaîne de commandement et de rapporter aussi par écrit ce qu’il s’est passé montre que tout remonte au plus haut du pouvoir à Damas».
Jihadistes. Ces documents permettent de connaître les rouages du régime, qui a voulu démontrer, mercredi, par une photo publiée par l’agence officielle Sana, qu’Ali Mamlouk, chef des services de sécurité, ne serait pas assigné à résidence, contrairement à ce qu’ont avancé mardi par des journaux européens. Ceux-ci faisaient état de contacts d’Ali Mamlouk avec les services secrets turcs et du fait qu’il ait dénoncé l’envahissante présence iranienne. Pour démonter cette thèse, Mamlouk est montré aux côtés de Bachar al-Assad et du chef la commission du Parlement iranien pour la politique étrangère et la sécurité nationale, Alaeddine Boroujerdi. A en croire cette mise en scène, Ali Mamlouk serait toujours une pièce maîtresse du système Al-Assad, qui chaque jour ne peut que constater la perte de pans entiers du territoire. Mercredi, les jihadistes de l’EI ont pris une grande partie d’une localité située sur une route stratégique de la province de Homs (centre) après des combats ayant fait 48 morts.
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) le groupe extrémiste s’est emparé de larges parties d’Al-Soukhna et de ses environs après des combats commencés dans la nuit de mardi à mercredi. Le gouverneur de Homs, Talal Barazi, a confirmé à l’AFP que les jihadistes étaient entrés «dans certains quartiers de la ville». Selon l’Observatoire, au moins 28 soldats et supplétifs ainsi que 20 jihadistes de l’EI ont été tués et 100 belligérants ont été blessés. Aujourd’hui, la capitale provinciale de Homs est quasiment sous le contrôle du régime mais assiégée par les insurgés et l’EI.
Ali n’écrira pas car Ali n’existe pas!
Au Maroc, on a trouvé un moyen original pour empêcher un journaliste de (re)lancer son journal: le priver de papiers d’identité. C’est l’aventure vécue par Ali Lmrabet, poil-à-gratter du régime. Un régime qui ne raffole pas vraiment des voix libres…
«Alors, que fait-on avec cet Ali?» On imagine bien les têtes pensantes – l’expression est certes un peu flatteuse – réunies dans un bureau du palais royal à Rabat. Tous se regardent d’un air tout à la fois las et embarrassé. Comment, en effet, faire taire ce journaliste, Ali Lmrabet, qui déclenche si facilement le royal courroux? Le problème prend une acuité particulière ces jours-ci: l’énergumène a retrouvé le 11 avril sa pleine liberté de manœuvre, c’est-à-dire que, vu du palais, le pire est à craindre. En 2005, en effet, la «justice» marocaine avait inventé pour lui une peine ne figurant pas dans l’arsenal pénal, une interdiction de profession pendant dix ans, et voilà que ces dix ans ont pris fin. Pire: la rumeur dit que ce cuistre s’apprête à relancer un journal!
Alors, quelqu’un a eu une idée. Et les têtes pensantes s’y sont ralliées. Faute de mieux, car il s’agit d’un pis-aller de piètre facture morale. Mais la morale, parfois… Bref: on va priver l’intéressé de tout papier, comme cela il sera bien en peine d’obtenir une autorisation pour lancer un journal. On pourrait appeler ça un sabotage administratif. C’est moins spectaculaire que des poursuites judiciaires qui pourraient encore susciter à l’étranger des articles au ton désobligeant et, au fond, c’est tout aussi efficace.
Voilà le plan: on s’est arrangé pour qu’il doive renouveler sa carte d’identité (et son passeport est bientôt périmé). Quelle sera la faille? Son domicile, pardi! Il prétend habiter chez son père à Tétouan? Eh bien! on va dire qu’il s’agit d’un mensonge et lui refuser le renouvellement de ses papiers. Et des papiers, il en a besoin depuis que des agresseurs non identifiés (mais tellement reconnaissables…) les lui ont volés d’une manière violente.
Peu importe si un fonctionnaire de police qu’on avait oublié de mettre au parfum lui a délivré un certificat de résidence l’autre jour. Ce pauvre policier est allé pleurnicher chez Ali en disant qu’on le menaçait des plus graves ennuis s’il ne lui rendait pas le document, ce qu’Ali, bonne âme, accepta de faire (non sans en avoir fait quelques copies, histoire de pouvoir les exhiber à qui veut entendre son histoire). En quelque sorte, désormais, Ali Lmrabet n’existe plus. Pas de papiers, pas d’Ali Lmrabet et pas de journal créé par Ali Lmrabet! Le tour est joué, il suffisait d’y penser. Les têtes pensantes y ont donc pensé. On imagine sans peine leur soulagement un peu veule…
Mais, au fond, pourquoi ce collègue est-il tant craint? Ce journaliste met-il à lui tout seul le royaume en péril? Serait-il proche des djihadistes nihilistes prêts à faire tout sauter? Non, pas du tout. En fait, le bougre s’est taillé une fameuse (mais aussi fâcheuse) réputation depuis qu’il a quitté la diplomatie marocaine pour se lancer dans le journalisme. Voilà en effet un type qui estime que le journalisme consiste à ne pas se contenter de l’avis officiel, qui croit que tenter de voir ce qui se cache sous les cartes peut servir l’intérêt général. Quelle outrecuidance!
Cet Ali Lmrabet n’a jamais cessé d’enquiquiner son monde. Au sommet de l’Etat, surtout. Comme rédacteur en chef du Journal hebdomadaire (un organe iconoclaste que le régime a écrasé par des mesures judiciaires qui ont eu sa peau en 2010), comme propriétaire d’un autre hebdo, Demain (et sa version arabe), fermé en 2005, qui avait le toupet non seulement de voguer sur le mode ironique mais aussi de transgresser quelques tabous locaux tel que désigner les Sahraouis qui vivent à Tindouf, en Algérie, par le terme de «réfugiés» au lieu de l’appellation contrôlée et imposée d’en haut, les fameux «séquestrés du Polisario» (le mouvement indépendantiste sahraoui).
Le vrai-faux SDF n’a pas perdu la main: pendant qu’il purgeait sa peine, il a bossé pour des journaux espagnols. Et, surtout, il a depuis longtemps créé un journal en ligne, demainonline.com, hébergé à l’étranger, que le pouvoir exècre pour l’excellente raison que ce site refuse évidemment de respecter les intouchables «lignes rouges» (le roi, l’islam, l’armée, les «provinces du sud», à savoir la sacro-sainte «marocanité» du Sahara occidental).
Ali Lmrabet n’est pas seul dans son cas au Maroc. Dans ce pays où le décor démocratique ne trompe plus depuis des lunes les sujets de Sa Majesté, tout est fait pour que les journaleux les plus courageux finissent par choisir un autre métier ou… l’exil. Des journalistes sont d’ailleurs en prison ou attendent leur procès, des sites ont dû fermer, tous exemples qui illustrent l’inflexibilité absolue de ce souverain absolu. Le Maroc idéal des têtes pensantes susmentionnées? C’est «Circulez, y a rien à lire!».
BAUDOUIN LOOS
Une atmosphère de fin de règne
Le dernier Rémi
[youtube https://youtu.be/5hwR4WLqAsM?]