Le vice-Premier ministre libéral flamand se positionne à son tour dans la crise des réfugiés, défend catégoriquement l’action du gouvernement fédéral, préserve Theo Francken et la N-VA, et… cible la Ville de Bruxelles. Polémique devant !
Certains reprochent au gouvernement fédéral de courir après les faits, de ne pas anticiper…
Ce n’est pas correct. En août, quand beaucoup de politiques étaient en vacances, Theo Francken avait commencé à augmenter la capacité de certains centres d’accueil. Il n’a pas dit : « On verra bien, attendons ». On ouvre 1.000 places par semaine ! Comparez avec les crises précédentes, beaucoup de gens restaient sans hébergement, ce n’est pas le cas cette fois, chaque réfugié peut trouver une place à l’intérieur, dans un bâtiment, sous un toit. Alors, certains font le choix de ne pas utiliser cette possibilité, c’est toute la discussion sur le parc Maximilien à Bruxelles, devant l’Office des étrangers, mais l’accueil au sein de bâtiments mis à disposition est assuré. D’ailleurs, le patron de la Croix rouge l’a souligné jeudi à la télévision flamande : la Belgique gère assez bien la crise actuelle.
Mais dans le bâtiment III du WTC, parc Maximilien, il n’y a pas des structures sanitaires, pas de douches…
Ce n’est pas vrai. Il y a tout cela. Il y a des douches dans les caves. Mais, en définitive, c’est une responsabilité conjointe : le fédéral, Fedasil, et Théo Francken, mettent à disposition un endroit où des gens peuvent loger, 500 personnes environ, et après cela, gérer l’ordre public, c’est une compétence de la Ville de Bruxelles. C’est à elle d’agir. Et je commence à me poser des questions. La Ville de Bruxelles ne devrait-elle pas se montrer plus active ?, et dire : « Ceci est un espace public ». Si j’étais bourgmestre, je ne tolérerais jamais que, dans ma commune, s’il y a une alternative, un espace public, un parc public, soit ainsi occupé, avec ce qui est à la fois un camping, un marché, presque un festival de musique. Non, quand il y a une alternative…
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Mais c’est au fédéral d’agir.
Mais non ! L’ordre public, c’est la ville. Et, honnêtement, on commence à être dans une situation où c’est un peu faire honte à Bruxelles comme capitale de l’Europe. J’espère que l’on va se rattraper.
C’est mauvais pour l’image de Bruxelles ?
Tout à fait, c’est clair. Tous les médias du monde sont ici, et on est en train d’essayer de montrer que l’on ne gère pas la crise, alors que c’est le contraire, on la gère, la capacité de logement est là. Mais à un moment donné, la Ville de Bruxelles doit dire que c’est un parc public, et qu’on ne loge pas comme ça dans un parc public.
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Yvan Mayeur, lui, bourgmestre de Bruxelles, met en cause l’Etat, qui est absent soutient-il…
Moi, pour l’instant, j’ai l’impression qu’il n’y a plus de gestion de l’ordre public à Bruxelles. Honnêtement, je ne peux pas penser que quelqu’un joue un jeu politique sur des questions humanitaires comme celles-ci, avec des gens qui viennent chez nous après un parcours souvent dramatique, qui ont perdu toute perspective, et choisissent l’Europe, où l’on doit les accueillir.
Vous renversez totalement l’argumentation de vos détracteurs : à la Ville de Bruxelles, ils vous reprochent précisément de ne pas gérer l’urgence au parc Maximilien…
Mais qui est responsable de l’ordre public ? S’il n’y avait pas d’alternative, je pourrais comprendre, mais ce n’est pas le cas, il y a un bâtiment avec 500 places.
Deux grands arguments vous sont opposés : 1. le gouvernement ne prévoit pas un plan de répartition entre les communes en Belgique, comme le fait l’Allemagne. Deux : il faut dépasser la barre des 250 dossiers traités chaque jour par l’Office des étrangers.
Ce n’est pas correct. Le système de pré-accueil, comme au WTC, cela ne s’était jamais fait auparavant. Et au-delà du pré-accueil, nous ouvrons 1.000 places par semaine pour les demandeurs d’asile enregistrés dans le système. Non, simplement, à un moment donné, la Ville de Bruxelles doit dire : « Nous n’autorisons plus ce campement un peu clandestin au centre de Bruxelles, vous devez rejoindre le bâtiment qui est mis à votre disposition ». A 100 mètres du parc !
Il faudrait faire évacuer le camp ?
Honnêtement, oui, quand il y a une alternative, ça me paraît assez logique.
Quant au plafond des 250 dossiers…
C’est la limite administrativement, et comme l’a dit Charles Michel, c’est la limite « aujourd’hui »… Est-ce qu’un jour on fera moins, ou bien davantage, on verra. Il faut des examens sérieux des demandes, au point de vue sécurité, médical, etc., et 250 dossiers, c’est notre capacité actuelle pour traiter les dossiers correctement.
Il y a une parfaite cohésion dans la coalition sur ce dossier ?
Une crise de l’immigration, ce n’est jamais facile à gérer, mais je regarde juste les faits, je vous l’ai expliqué, l’on peut dire que l’on travaille bien. J’ajoute qu’avec les Pays-Bas, la Belgique joue un rôle de leader européen en termes d’aide humanitaire et de coopération.
Les déclarations de Bart De Wever ? La Belgique est un « aimant » pour les réfugiés, il faut un « statut spécial » pour les demandeurs d’asile…
Chaque parti a son discours, c’est normal. Moi, je ne suis pas d’accord avec certaines idées avancées par De Wever : un statut spécial avec des droits sociaux réduits, la volonté de refouler les réfugiés aux frontières en Turquie… Tout cela, je suis contre. Je le dis. Ce qui compte, c’est ce que fait le gouvernement en définitive.
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Comment expliquer l’élan de solidarité exprimé par les patrons dans un domaine où ils interviennent généralement peu ? Les réfugiés qui arrivent sont une opportunité pour les employeurs ?
Certainement. Cette crise de l’immigration est assez différente des précédentes. Les gens qui viennent ici, surtout provenant de Syrie et d’Irak, ont une formation technique assez bonne, apprennent bien les langues, ont beaucoup de connaissances. Toute cette solidarité aujourd’hui, c’est un élément fragile, qu’il faut gérer de la bonne manière. Parce qu’on pourrait très rapidement perdre cette solidarité. Ce que nous disons, c’est que nous voulons donner une opportunité honnête aux gens qui viennent ici. Et l’opportunité honnête, c’est vraiment de pouvoir venir ici et construire leur vie. Cela veut dire qu’on leur donne l’opportunité d’apprendre la langue, d’avoir un boulot, pour pouvoir vraiment s’intégrer dans notre société. Si c’est ça qu’on veut faire, on peut le faire, mais pas pour tout le monde. On peut le faire, mais pour un nombre défini. Et il faut que chacun en Europe fasse l’effort. En ce sens, la perspective du patronat est la bonne. Le VLD la partage.
On ne va pas donner aux réfugiés des emplois précaires, dont aucun belge ne veut ?
Y a-t-il en Belgique des emplois qui ne font pas partie des législations du travail ? Non. Je pense que le premier souci, pour les gens qui viennent ici, c’est d’avoir de l’aide. Après ça, on leur donne une opportunité. Ce qu’ils recherchent, c’est le respect humain. Là-bas, ils avaient une vie, un boulot. Personne ne quitte son pays pour le plaisir. Ils veulent être respectés et faire partie de la société. C’est ça qu’on doit leur donner. Du respect, pas seulement à manger et une allocation. Mais du boulot, une école pour les enfants…
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