Le président russe Vladimir Poutine a annoncé le retrait de ses troupes en Syrie, alors que le malheur syrien a 5 ans aujourd’hui. L’édito de Baudouin Loos.
Les prochaines semaines permettront sans doute d’apprécier l’ampleur du retrait militaire russe et de voir s’il (re)met en danger l’allié que Poutine venait de sauver d’une fin funeste, à savoir le dictateur Bachar el-Assad. Cela serait du reste fort étonnant
Le malheur syrien a en effet cinq ans ce 15 mars. Le « printemps », en Syrie, avait commencé à Damas par des manifestations, pacifiques mais néanmoins stupéfiantes pour beaucoup car sans précédent dans cet univers totalitaire. Trois jours plus tard, celles de Deraa, dans le sud, plus dures car elles protestaient contre des tortures infligées à des adolescents, tournèrent au bain de sang. Une expression qui va rester pertinente jusqu’à nos jours.
Faut-il convoquer les statistiques, ces froides abstractions ? Oui, quand même. Ne fût-ce que pour le nombre de 270.000 morts environ. Ou pour rappeler les dix à onze millions de déplacés. Parmi eux, près de cinq millions d’exilés. Dont une partie frappe à la porte d’une Europe qui se raidit, qui prend peur. Qui trahit ses idéaux.
Un conflit aux multiples visages
La dictature de la famille Assad a commencé le 12 novembre 1970 par un coup d’Etat. Hafez el-Assad décéda en 2000 et son fils Bachar reprit le flambeau, dans une république devenue propriété familiale. Alors, quand le vent de liberté des « printemps arabes » souffla jusqu’en Syrie onze ans plus tard, peu d’observateurs s’étonnèrent de la résistance du régime.
Mais la répression de la contestation allait échouer. Pire : les tirs à balles réelles contre les manifestants pacifiques allaient, en moins de six mois, déclencher un conflit des plus âpres, le plus sanglant de ce jeune siècle. Un conflit aux multiples visages. Où s’entrechoquent les intérêts des puissances mondiales et régionales. Où s’aiguisent les appétits des laissés-pour-compte comme les Kurdes. Où s’épanouit l’extrémisme religieux nourri par les injustices.
Dans ce sombre tableau, un acteur majeur semble comme occulté. Le peuple syrien. Il ne compte pas. Ou alors juste dans des chiffres. Telles quantités de réfugiés, de blessés. Qui sont autant de vies brisées dans d’indicibles souffrances.