De profundis


La nuit tombe…
Nous portons le zodiac à l’eau…et déjà l’effroi glacé nous saisit…
Les flots noirs présagent de leur traitrise assassine.
Ceux qui renoncent sont déjà morts, ou pire.
Ceux qui embarquent, sidérés, se pétrifient.
La traversée est folie…et survie…Nécessité.

Un jour, deux jours, l’entassement,
l’assaut des vagues,
la torture des crampes,
la promiscuité des cris, des gémissements, des larmes et des morts…

Combien des miens jonchent les fonds de Méditerranée. ..?

Il est aisé de me condamner pour qui ne comprend le périple insensé.

Combien des miens jonchant les fonds de Méditerranée?

Ne dîtes pas à ma mère que j’ai échoué…

#FreeSeaWatch
#FreeAquarius
#FreeRescues

La Kerterre, ou comment construire sa maison de hobbit pour quelques centaines d’euros


© Kerterre

En Bretagne, une femme construit depuis plus de 20 ans des petites maisons faites de chaux et de chanvre, parfaitement habitables. Des logements bon marchés, isolants et allant de pair avec un mode de vie respectueux de la nature.

 

Avec leur forme arrondie qui se fond dans l’environnement où elles sont construites, les Kerterres font penser à des habitats troglodytes. Voire à des maisons de récits fantastiques, façon Bilbo Le Hobbit. Sauf que là, ce n’est pas de la fiction : à mi-chemin entre l’oeuvre d’art sculptée et la bâtisse, ces petites maisons connaissent un succès grandissant. En breton, « Ker » signifie « lieu habité ». Le nom Kerterre renvoie donc à un retour à la terre via notre habitation.

C’est en tout cas le nom qu’a donné Évelyne Adam, ancienne professeure de piano, à ces petits habitats. « Il y a 21 ans, nous raconte-t-elle, un ami m’a donné du chanvre. Je l’ai mélangé à de la chaux, et j’ai vu que ça carbonatait, que cela devenait de la pierre. » Après des années d’expérimentations, quelques formations de maçonnerie ici et là, elle est parvenue à bâtir de véritables maisons habitables à l’aide de ce matériau naturel.

© Kerterre. Sculptées à la main, les Kerterres peuvent prendre des formes diverses très esthétiques qui se mêlent à leur environnement.

Le mélange du chanvre et de la chaux permet ainsi de créer une matière très isolante et surtout solide : « Mes petites grottes sont garanties plus de 1000 ans ! Même si je ne serai plus là…», s’amuse la créatrice des Kerterres. La Kerterre est sculptée à partir de mèches de chanvre trempées dans la chaux, qui viennent s’entremêler en créant un mur autoportant.

 

Prix : 500 euros pour un dôme de 3 mètres de diamètre

Mais surtout, ce matériau naturel permet de construire des maisons à très bas coût. Pour une Kerterre « moyenne », de 3 mètres de diamètre, comptez environ 500 euros de matériel (il faudra tout de même ajouter le prix des portes et fenêtres). « J’ai toujours pensé que les maisons coûtaient trop cher à la nature, et aux humains. Avec la Kerterre, pas besoin de s’endetter pour 25 ans de crédit ! », précise-t-elle.

Il est possible, avec du temps et de la motivation, de construire sa Kerterre tout seul, la technique étant plutôt simple (en gros, on plonge des longues mèches de chanvre dans un mélange de chaux, d’eau et de sable, et on a notre matériau !).

Quelques notions de base sont toutefois utiles pour bâtir sa Kerterre. C’est pourquoi Evelyn Adam et son équipe proposent des stages et formations tout au long de l’année. Si l’on possède un terrain, on peut même accueillir chez soit un stage de Kerterre pour construire sa maison à l’aide d’une équipe et des formateurs. Pour un stage de 5 jours, comptez 395 euros, et pour une formation complète de trois semaines, il faudra débourser environ 1800 euros.

 

« Il y a 20 ans, on se moquait de moi. Et maintenant, la demande explose ! »

 

Les Kerterres d’Évelyne Adam suscitent un véritable intérêt aujourd’hui en France. De plus en plus de personnes se lancent ainsi dans l’aventure, à la recherche d’un habitat plus simple, plus proche de la nature. Dans la lancée du mouvement des Tiny house ou autres habitats minimalistes, la Kerterre prend de l’ampleur dans l’Hexagone. La créatrice des Kerterres explique ainsi que « les inscriptions pour les formations sont très vite complètes. À terme, on va devoir recruter plus de formateurs. » Amusée, elle nous confie : « Il y a 20 ans, on se moquait de moi. Et maintenant, la demande explose ! »

Certains choisissent de construire tout leur habitat à la manière d’une Kerterre, d’autres vont simplement en construire une dans leur jardin pour y installer un atelier, une chambre d’ami…

« On a une majorité de femmes qui participent au stage, raconte Évelyne Adam. C’est le réveil de la femme constructrice ! ». La Kerterre ne nécessite pas spécialement de force physique et peut en effet permettre à des femmes de construire leur maison, toute seule.

© Kerterre / À l’intérieur des Kerterres, des pièces confortables.

Le Kerterre : Une philosophie de vie plus qu’un habitat

Mais c’est avant tout une façon de vivre qui est prônée avec ce type d’habitat. Évelyne Adam dit que ses Kerterres permettent de « bonifier » la terre autour de soi. En plus d’être construite à partir de matériau 100% naturel, la Kerterre a vocation à se fondre dans l’environnement où elle est bâtie. Ces types de structure impliquent l’installation d’électricité hors réseau via des panneaux solaires par exemple, ou la mise en place de toilettes sèches. Ce mode de vie peut sembler quelque peu rustique pour certains. Pour d’autres, vivre comme un hobbit, c’est tout simplement la clef du bonheur !

Pour en savoir plus, un documentaire a été réalisé par Nikita Gouëzel sur les Kerterres, intitulé « Pour moi et plus que moi ».

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Méfiance envers les réfugiés: «L’opinion publique est très influencée par des discours politiques sécuritaires»


INTERVIEW « 20 Minutes » a interrogé Shoshana Fine, docteure en science politique et spécialiste des questions migratoires, sur le manque d’empathie des Français envers les réfugiés

Des réfugiés franchissent la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis
Des réfugiés franchissent la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis — SIPA 

  • Selon une étude de l’Ipsos, la légitimité des réfugiés à fuir leur pays est de plus en plus remise en cause dans le monde et notamment en France.
  • Si le scepticisme est mondial, les Français arrivent en tête de classement dans plusieurs opinions négatives sur les réfugiés.
  • « 20 Minutes » a interrogé Shoshana Fine, docteure en science politique et spécialiste des questions migratoires, pour tenter d’expliquer ce manque d’empathie.

Selon une enquête de l’Ipsos diffusée ce vendredi pour la journée mondiale des réfugiés, un Français sur deux et « 54 % de la population mondiale ne croient pas que les étrangers qui viennent dans leur pays sont de vrais réfugiés », contre 52 % en 2017.

Seulement 43 % des Français estiment qu’échapper à la guerre ou à des persécutions « constitue une raison suffisamment légitime pour se réfugier ». Le taux pour la population mondiale s’élève à 61 %, ce qui place les Français en bas du classement, avec les Hongrois.

Alors pourquoi a-t-on aussi peu d’empathie de notre part pour les réfugiés ? 20 Minutes a interrogé Shoshana Fine, docteure en science politique et relations internationales, spécialiste des questions migratoires et dans l’externalisation de la politique migratoire de l’Union Européenne dans les « pays tiers ».

Selon vous, comment expliquer ces chiffres et ce manque d’empathie de la part des Français envers les réfugiés ?

Il y a peut-être des raisons historiques et sociologiques, mais je crois qu’il ne faut pas dévier de la vraie explication. L’opinion publique est très influencée par des discours politiques traitant la question des réfugiés dans une sémantique sécuritaire et non solidaire. Il y a une banalisation de ce discours depuis le début de la crise migratoire, un discours à dominance négative. A fortiori en France, où que le gouvernement soit de droite avec Nicolas Sarkozy, de gauche avec Hollande, ou des deux comme Emmanuel Macron, les politiques au pouvoir ont gardé ce discours sécuritaire et néfaste sur les réfugiés.

Un autre chiffre pourrait expliquer cette peur : 58 % des Français sont convaincus que les réfugiés ne peuvent pas s’intégrer à la société d’accueil contre 47 % de la population mondiale ?

Il faut voir qu’en France, il y a énormément de difficulté pour s’intégrer. Pendant les deux-trois premières années, les réfugiés ont une vie extrêmement précaire. En théorie, ils peuvent travailler au bout de six ou neuf mois, mais en réalité, trouver un travail est extrêmement difficile pour eux tant il n’y a pas de politiques d’inclusion de l’Etat. Par exemple, aucun cours de langue n’est fourni, ce qui entrave forcément le processus d’intégration. Il faudrait absolument en mettre en place dès la demande d’asile et ne plus attendre qu’elle soit accordée, en se disant par exemple que l’apprentissage de notre langue et sa diffusion auront forcément des effets positifs, que la demande soit finalement validée ou non. On empêche ce processus d’intégration puis on leur reproche de ne pas s’intégrer, c’est une hypocrisie.

Si les Français ont des chiffres très hauts, il y a un scepticisme mondial sur les réfugiés, et des chiffres en progression partout sur la question…

Il faut rappeler qu’effectivement, ce n’est pas propre à la France. 85 % des réfugiés vivent dans des pays en développement, et le Nord qui a pourtant les capacités économiques pour accueillir les réfugiés ne le fait pas. Il y a une diffusion et une banalisation d’un discours d’extrême droite qui augmente la peur chez l’autre. En 2016, on parlait d’un million de réfugiés en Europe, une population que le continent peut tout à fait contenir.

Mais il y a eu une crise de la solidarité, plus qu’une crise migratoire. Le fait que chaque pays refuse de les accueillir renforce la méfiance des populations des autres pays. « Pourquoi personne ne veut des réfugiés ? C’est bien qu’il doit y avoir une raison. » Ce cercle vicieux créait un imaginaire du réfugié de peur et de suspicion, diffusé dans tous les pays du Nord. A force de ne pas accueillir de réfugiés, on s’en méfie. Etrangement, depuis 2016, il y a de moins en moins de réfugiés accueillis en Europe mais les Européens s’en méfient de plus en plus. Les Français, ou les pays du Nord, ne manquent pas d’empathie par nature, c’est simplement que les politiques ne sont pas adaptées. Si ces pays se mettaient à une politique d’accueil et d’ouverture, l’avis de la population changerait à ce sujet.

 

Comment peut-on hurler «Allahu akbar» ?


Un article publié dans Libération en 2014 qui est toujours d’actualité

Par Ghalib Al-Hakkak , Agrégé d’arabe, université Paris-1 Panthéon-Sorbonne

Le traitement de l’information depuis un moment, et, surtout, depuis les agressions récentes à Joué-lès-Tours, Dijon et Nantes, risque de réduire le sens de l’expression «Allahu akbar» à un slogan de haine, de brutalité, de terreur.

Dois-je m’alarmer, s’il est scandé par une personne dans la rue ? Que faut-il faire si je l’entends derrière ma porte ? J’ouvre ou j’appelle la police ? Revenons un peu au sens exact de cette expression. Il s’agit, en réalité, d’une comparaison tronquée : «Dieu est plus grand [que quiconque]». On pourrait la comprendre ainsi : «Dieu est le plus grand».

Mais en quelle occasion l’entend-on chez les musulmans arabes ? En dehors de la prière et de l’appel à la prière (le ‘dhân, chanté dans les villes musulmanes cinq fois par jour, jadis lancé du haut d’un minaret, ou du toit d’une mosquée, et depuis quelque temps souvent à partir d’un CD), cette expression peut surgir n’importe quand, et n’importe où, pour exprimer une admiration totale de quelque chose, tout simplement.

Il suffit d’aller sur YouTube et d’écouter les chansons d’Oum Kalsoum pour repérer, après chaque couplet, quelques Allahu akbar bien audibles au milieu des applaudissements. J’avoue qu’en croisant dans la rue une très belle femme, un silencieux Allahu akbarse déclenche dans mon cerveau. Face à la Joconde, il n’y a pas plus éloquent qu’un Allahu akbar. Une vieille tante, essayant Skype pour la première fois, s’est écriée : «Allahu akbar !» Elle a ajouté : «Le chrétien qui a inventé ça ira tout droit au paradis des musulmans !» Et que dire du gardien algérien de mon immeuble, il y a quarante ans, auquel j’essayais d’expliquer, qu’avec mon épouse nous avions sauvé et élevé un petit merle tombé du nid et que cet oiseau n’était toujours pas habitué à rester dehors. Cet homme me regardait avec un doute visible sur ma santé mentale. Mais, lorsqu’il a vu l’oiseau se précipiter de l’arbre d’à côté vers ma fenêtre qui venait de s’ouvrir, il n’a pu s’empêcher de crier trois fois : «Allahu akbar !» Le miracle que cela représentait à ses yeux ne pouvait être salué d’une autre manière.

C’est une belle expression, apaisante et rassurante, injustement confisquée aujourd’hui par les forces de la haine et de l’obscurantisme. Et je suis persuadé qu’une fois notre monde débarrassé de cette vague anormale de violence et d’exclusion au nom de l’islam, un énorme «Allahu akbar» traversera les esprits, chez les Arabes musulmans du monde entier avides de retrouver leur liberté totale de penser, leur amour du beau, leur solidarité sociale naturelle et leur sens inné de la fraternité.

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