Syrie: l’habileté de Poutine ne doit pas nous leurrer


Mis en ligne mardi 29 septembre 2015, 15h33

La grande ambition du président russe passe en Syrie par le maintien et même le renforcement d’un dictateur, Bachar el-Assad.

L’édito de Baudouin Loos.

  • Vladimir Poutine © Reporters / Abaca

Il n’y a plus de bonne solution pour la Syrie. Les « grands » de ce monde le savent, qui se contentent d’y protéger vaille que vaille leurs intérêts. La Russie a lancé les initiatives les plus spectaculaires. Envoi de troupes et de matériel militaire dans l’ouest syrien, appel à une vaste coalition internationale contre l’Etat islamique (EI ou Daesh).

Il n’y a aucun doute que ces djihadistes doivent être neutralisés. Et que cela se passera par le recours aux armes, qui a déjà commencé. Les bombardements n’y suffiront pas. On cherche des candidats pour envoyer des troupes au sol. On ne trouvera pas. L’Afghanistan et l’Irak ont les vertus de repoussoirs.

L’habileté de Vladimir Poutine qui consiste à réclamer une coalition antiterroriste ne doit cependant pas nous leurrer. La grande ambition du président russe, celle de restaurer la puissance russe à hauteur de celle de l’Union soviétique, passe en Syrie par le maintien et même le renforcement d’un dictateur, Bachar el-Assad, grand criminel de guerre.

L’intellectuel palestinien Marwan Bishara l’écrivait récemment sur le site d’Al Jazeera : « Le choix a été clair dès le début : sacrifier Assad pour sauver la Syrie ou sacrifier la Syrie pour sauver Assad. »L’Iran, le Hezbollah libanais et la Russie ont fait leur choix. Les intérêts, toujours.

Pourtant, tétanisés par Daesh, les Occidentaux se tâtent à propos d’Assad. Et s’il fallait composer avec lui, finalement et malgré tout ? L’idée fait son chemin. Parce que, va l’argument, un sanglant chaos bien pire encore s’imposerait dans tout le pays s’il disparaissait du paysage.

Le « hic », c’est qu’Assad fait bien plus partie du problème que de la solution, comme l’a dit hier François Hollande à l’ONU. Le ministre britannique des Affaires étrangères, Philip Hammond, l’expliquait dans les colonnes du Monde, le 25 septembre :« Collaborer avec Assad ne fera que pousser l’opposition dans les bras de l’EI (…). Le comportement d’Assad envers sa population est le meilleur recruteur de l’extrémisme »…

En somme, comme le dit le politologue français François Burgat, à l’AFP, « Daesh n’est point la cause mais la conséquence du verrouillage répressif et manipulateur du régime ». Cause et conséquence doivent être traitées, ce qui est plus facile à dire qu’à faire, certes.

Mais l’afflux incessant des réfugiés, qui préoccupe logiquement nos dirigeants, ne tarira de toute façon pas avec l’élimination éventuelle de l’Etat islamique. Ils ne rentreront pas dans une Syrie dont le président prend les civils des zones récalcitrantes pour cibles de bombardements au moyen de barils de TNT largués par hélicoptères.

► Lire notre article: Vladimir Poutine va-t-il relancer Bachar al-Assad?

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Succès de foule pour la marche en soutien aux réfugiés ce dimanche: plus de 15 000 manifestants


Les citoyens se mobilisent ce dimanche à Bruxelles lors d’une marche de soutien aux réfugiés. Cette manifestation, lancée par la plateforme citoyenne qui s’occupe notamment de l’accueil en face de l’Office des étrangers, a démarré non loin de là, à quelques centaines de mètres du Parc Maximilien.

Quelque 15 000 personnes participent selon la police bruxelloise à la marche de solidarité avec les réfugiés dans la capitale. Les organisateurs en comptabilisent quant à eux environ 23 000. C’est en tout cas plus que les 10 000 participants que les organisateurs espéraient.

Le rendez-vous était fixé devant la gare du nord début d’après-midi avec un seul mot d’ordre: « refugees welcome ». La marche est assortie d’une pétition, présente également sur le web. Jusqu’à présent, elle a recueilli un peu moins de 10 000 signatures en faveur d’un accueil digne des réfugiés tout au long de leur procédure. Différentes associations se sont jointes à l’appel, Amnesty international, le CNCD 11 11 11, entre autres. Les manifestants réclament aussi des mesures contre les réactions racistes et xénophobes.

« Des citoyens européens se sont retroussé les manches »

« Ce sont 23.000 ‘oui’ à la solidarité, à la dignité et à l’hospitalité et autant de ‘non’ à la peur, au racisme et à la haine« , explique Elodie Franquart, de la ‘Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés de Bruxelles’, une des organisatrices de la marche. « Derrière nous se tiennent tous les citoyens européens qui se mobilisent pour aider les réfugiés. »

« Tout l’été déjà, des milliers de réfugiés ont pris le chemin de l’Europe« , poursuit Elodie Franquart. « Leur chemin a été long, dangereux et coûteux car il n’y a plus de possibilités légales pour venir ici. Tout l’été, ce sont des citoyens européens qui se sont retroussé les manches pour accueillir et aider ces gens, car les hommes politiques restaient en retrait. En Belgique, le manque de structures a eu pour conséquence qu’un campement a vu le jour au Parc Maximilien qui ne tourne que grâce à des bénévoles. Depuis un mois, des centaines de personnes dorment dans la rue car le gouvernement refuse de prévoir un accueil adéquat. »

« Il faut mettre fin à la Forteresse Europe« , poursuit-elle encore. « L’Europe est responsable de chaque réfugié mort en mer Méditerranée. Ce n’est pas l’Europe telle qu’elle a été imaginée, il est temps d’élaborer une politique migratoire humaine. Que ceci soit un signal à nos politiques. On ne parle pas ici de récupération politique, uniquement de gens qui ont fui des conflits. »

« Nous voulons travailler »

« Nous sommes sans domicile fixe car nous avons fui notre foyer« , a expliqué un réfugié irakien. « Nous sommes également seuls, car nous avons laissé nos familles derrière nous. Nous n’avons plus que de l’espoir, ne nous le retirez pas. La seule chose que nous demandons, c’est de vivre comme des humains, en paix. Nous pouvons et nous voulons travailler, créer et aimer, comme tout le monde. »

Une porte-parole du Ciré (Coordination et initiatives pour réfugiés et étrangers) a mis en garde: « on voit déjà qu’une distinction est faite entre les ‘bons’ réfugiés politiques et les ‘mauvais’ réfugiés économiques. Il est grand temps que nous nous révoltions contre ce discours. La situation actuelle est la conséquence des choix politiques faits ces 15 dernières années, où les intérêts économiques sont toujours passés avant les autres, humanitaires, notamment. »

Les organisateurs ont demandé aux associations ou partis politiques qui se joignent au mouvement de ne pas afficher de drapeaux pour ne pas en faire une marche partisane. Les organisateurs ont également invité de délégations étrangères à manifester à leurs côtés pour insister sur le contexte européen de la crise de l’accueil.

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En Syrie, l’armée mexicaine des États-Unis


… Ou le fiasco des rebelles syriens modérés formés et armés par Washington à coups de millions de dollars pour venir à bout de l’organisation État islamique.

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Des rebelles syriens participent à une séance d'entraînement dans la ville de Maaret Ikhwan, près d'Idleb, en 2012 (photo d'illustration).   
Des rebelles syriens participent à une séance d’entraînement dans la ville de Maaret Ikhwan, près d’Idleb, en 2012 (photo d’illustration).     AP/SIPA©Muhammed Muheisen

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BOURGOGNE : Dans une école d’Auxerre c’est «pastille rouge» pour les élèves qui ne mangent pas du porc…


Une distinction, qu’une élue de la ville juge «discriminatoire». Jeudi soir, elle a interpellé le maire socialiste d’Auxerre.

Voilà une affaire risque de faire grand bruit. Elle a été révélée ce jeudi soir, par Malika Ounès, conseillère municipale d’opposition à la Mairie d’Auxerre, dirigée par le socialiste Guy Ferez.
«C’est complètement incroyable. A l’école des Pieds Dalloues à Auxerre, les enfants de la cantine qui ne mangent pas de porc portent un collier avec une grosse pastille rouge. Et les enfants qui ne mangent pas de viande du tout, ont eux droit au même collier, mais avec une grosse pastille jaune. C’est révoltant. Cela renvoie à des heures sombres», lâche Malika Ounès.
Elle est d’autant plus révoltée que jeudi soir, le Maire d’Auxerre, Guy Ferez, qui figure en deuxième position sur la liste socialiste de l’Yonne pour les élections régionales, n’a fait que peu de cas du sujet… «Quand je l’ai publiquement interpellé sur cette forme de ségrégation, Monsieur Ferez s’est limité à me répondre qu’il n’était pas au courant», raconte Malika Ounès qui, outre son mandat de conseillère municipale à Auxerre, est également vice-présidente du conseil départemental de l’Yonne.
L’élue a montré au conseil municipal le fameux collier avec la pastille rouge. «C’est une mère de famille qui m’a interpellé et fait part de son indignation. Des pratiques comme celle-ci ne sont pas acceptables. On n’a pas le droit d’imposer cela, en catimini, à des enfants».
Farah, la maman, contactée par creusot-infos, explique comment elle a découvert que sa fille portait un collier avec une pastille rouge… «Mardi ma fille, qui a 9 ans et qui est en CM1, m’a dit qu’il lui fallait un bonnet de bain pour la piscine. C’est dans le magasin, pendant l’essayage que j’ai découvert qu’elle portait ce qui ressemblait à un collier. Elle m’a alors expliqué qu’à la cantine on donnait un collier avec une grosse pastille rouge aux élèves ne mangeant pas de porc, et un collier avec une pastille jaune aux élèves ne mangeant pas de viande du tout. Je pense que ma fille l’avait gardé autour du cou sans le faire exprès. Je lui ai demandé de le retirer et j’ai décidé de contacter Madame Ounès que je connais. Il faut que cela cesse».
C’est pour cela que Malika Ounès a donc interpellé, jeudi soir, le Maire d’Auxerre. «Mais je ne suis pas certaine qu’il a bien compris la gravité des choses», lâche l’élue.

Alain BOLLERY
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Malika Ounès a exhibé, jeudi soir,
le fameux collier avec la pastille rouge

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François Burgat


La France accélère le processus de désespérance qui a nourri les rangs de Daech !
« Au lieu de le résorber, la France est malheureusement en train d’accélérer (…) le processus de désespérance qui a gonflé les rangs de Daech . Elle participe à cette redoutable « montée aux extrêmes » de la crise au détriment d’une sortie « par le centre » qui exigeait l’association d’une large partie de l’opposition islamiste ».-

HB : Selon vous, quelles seront les conséquences des bombardements sur le terrain? Risques de dommages collatéraux ? Croyez-vous que ces bombardements contribueront effectivement à affaiblir l’EI d’un point de vue opérationnel? Ne risque-t-on pas de provoquer la fuite des populations dans les territoires sous contrôle de l’EI, jusqu’à présent relativement épargnées par les bombardements du régime ?

– FB : S’il serait présomptueux d’apprécier sous un angle strictement militaire l’impact potentiel de ces frappes françaises, je dirai toutefois que – compte tenu des moyens peu importants pouvant être mis en œuvre- elles ont en fait très peu de chance d’affecter significativement l’équilibre militaire ou les déplacements de population initiés par l’intervention américaine préexistante.Leur portée symbolique et donc politique peut en revanche être considérée comme bien plus importante. La décision de frapper Daesh tout en laissant Bachar poursuivre, à une toute autre échelle, son oeuvre de mort est infiniment regrettable : la France vient en quelque sorte d’expliciter son changement de camp. Elle s’affiche désormais clairement dans les rangs de la contre révolution arabe. D’un côté et d’abord, il y avait le régime de Bachar al-Assad, dont la répression inhumaine d’un mouvement populaire initialement pacifique est la véritable source des maux présents de la Syrie. De l’autre, Daesh, qui n’est point la cause mais la conséquence de ce verrouillage répressif et manipulateur du régime, que l’ingérence décisive de l’Iran et de la Russie a considérablement aggravé. Or, entre ces deux acteurs, la France a établi une hiérarchie de la nuisance très « idéologisée » et de ce fait très peu respectueuse des responsabilités respectives. C’est le vocabulaire (islamique) des acteurs qui a déterminé notre choix et non la responsabilité réelle de chacune des parties en cause . Après avoir longtemps refusé de s’engager sérieusement dans la lutte contre sa véritable cause, la France vient de confirmer son choix de combattre la conséquence de la crise syrienne. Paris est passé du soutien – surtout verbal et très vite suspicieux – à une opposition qui était peut être en partie islamiste, mais néanmoins « républicaine » (c’est à dire autre que jihadiste) à une connivence quasi explicite avec l’axe – dont le sectarisme, chiite ou anti-musulman celui là, est bien loin d’être absent, on l’oublie souvent – qui unit Damas, le Liban du Hizbollah- Téhéran et Moscou. Au lieu de le résorber, la France est malheureusement en train d’accélérer ainsi le processus de désespérance qui a gonflé les rangs de Daesh. Elle participe à cette redoutable « montée aux extrêmes » de la crise au détriment d’une sortie « par le centre » qui exigeait l’association d’une large partie de l’opposition islamiste. Cet alignement résonne bien sur très au dela du territoire syrien, jusque dans le tissu national français. Pour des raisons le plus souvent bassement électoralistes, nous sommes en train d’aggraver un peu plus encore le climat de suspicion et de désaveu qui empoisonne notre relation avec le monde musulman (sunnite), cette composante importante de notre environnement, international mais également intérieur, à laquelle notre destin est pourtant indissolublement lié. (FB pour HB)

Tunisie: «Essebsi veut empêcher la vérité sur la corruption d’éclater»


loos

Jaouhar Ben M’Barek, militant de gauche, s’est opposé au gouvernement dominé par les islamistes d’Ennahda; il se dresse maintenant pour contester les initiatives de la coalition entre les anciens du régime dictatorial défunt et Ennahda. Rencontre avec un homme qui assume sa laïcité sans ambages.

Juriste, professeur d’université, Jaouhar Ben M’Barek, 46 ans, fait partie de ce qu’on appelle «la société civile» en Tunisie, l’un des quelques pays arabes où cette expression fait sens. Il a de qui tenir: ses parents ont connu les geôles de Bourguiba, son père, un syndicaliste connu, y a même séjourné pendant six ans. Il anime une association, «Destourna» (Notre Constitution), qui est une des rares du genre à se revendiquer ouvertement de la laïcité, à clairement promouvoir la séparation de l’Etat et de la religion. De passage à Bruxelles, il nous a confié ses impressions sur la situation dans son pays.

Comment évaluez-vous la coalition au pouvoir qui met ensemble depuis l’année dernière plusieurs partis dont les deux poids lourds, Nidaa Tounès (premier parti, regroupant pêle-mêle des nostalgiques de l’ancien régime et des gens venus de la gauche) et Ennahda (le parti islamiste)?

Cette alliance a été peu compréhensible pour les électeurs qui ont souvent eu un sentiment de trahison puisque ces deux formations avaient fait campagne aux élections de novembre 2014 en se diabolisant mutuellement! Et 72 heures après le scrutin, elles négociaient, d’où le soupçon que les carottes étaient cuites avant les élections. Par ailleurs, nous avons un problème d’opposition puisque les partis qui composent la majorité disposent de quasiment 90% des élus au parlement! Certes, il existe une opposition extra parlementaire mais elle est fragmentée. On l’a encore vu ce samedi 10 septembre à Tunis, où trois manifestations sur le même sujet n’ont même pas pu démarrer à la même heure!

Ce jour-là, un millier de manifestants ont en effet protesté contre  le projet de loi dit de «Réconciliation économique» adopté par le gouvernement qui doit être discuté et voté par le parlement. Cette affaire fait grand bruit au pays car d’aucuns considèrent que cette loi revient juste à accorder l’amnistie aux corrompus de l’ancien régime… 

Oui. Il s’agit au départ d’une initiative du président Béji Caïd Essebsi, lequel s’était pourtant abstenu d’en parler lors de la campagne électorale pour l’élection qu’il a remportée en 2014. J’estime d’ailleurs que cette question importante devrait faire l’objet d’un référendum. C’est une mauvaise loi pour au moins quatre raisons: 1. elle est anticonstitutionnelle, contraire à la procédure de la justice transitionnelle prévue par la Constitution pour solder le passé ; 2. ses prétendues retombées financières seront quasi nulles ; 3. le message est catastrophique: il nous dit que la Tunisie reste dans l’impunité par rapport à la corruption, qu’elle n’est pas prête à se réformer, que la bonne gouvernance attendra – pour les investisseurs nationaux ou étrangers qui cherchent un climat de transparence loin de l’affairisme et de la corruption qu’on a longtemps connus, c’est dramatique ; 4. la loi apporte aux Tunisiens un nouveau sujet de discorde. Il faut dire non! Va-t-on réhabiliter les Ben Ali et ceux de leur sphère qui se sont servis dans la caisse durant deux décennies? Il faudrait être très naïf pour croire qu’ils vont rapatrier le fruit de leurs larcins et l’injecter dans l’économie nationale.

Si ce n’est pas une tentative de relancer l’économie, comment analysez-vous alors cette loi de «réconciliation économique»?

C’est la facture que le président doit payer à ses donateurs qui l’ont aidé pendant la campagne électorale! C’est purement politique. Les deux grands partis coalisés au sein de la majorité gouvernementale tiendront bientôt leur congrès et les dirigeants doivent jeter du lest aux mécontents. C’est donc aussi un donnant-donnant: «je vote cette loi et j’obtiens plus de ministres au gouvernement», voilà ce qu’on offre d’un côté aux RCDistes (du nom de l’ancien parti de Ben Ali) au sein de Nidaa Tounès, et de l’autre aux cadres d’Ennahda, le parti islamiste, qui estiment qu’avec un seul ministre le parti a été marginalisé dans l’exécutif. En réalité, cette loi scelle l’alliance historique entre l’ex-RCD et Ennahda.

Pendant ce temps, l’Instance vérité et dignité (IVD), l’organe officiel de la justice transitionnelle, qui dispose selon la Constitution d’un mandat de quatre ans pour établir les dossiers des victimes de l’ancien régime et permettre à la justice de lancer des poursuites, fait l’objet de nombreuses critiques

J’ai figuré parmi les premiers critiques, il y avait beaucoup à redire. Mais ici, c’est grave: la loi de «réconciliation» met quasiment fin à la justice transitionnelle! Il faut savoir que beaucoup de victimes ont déjà été indemnisées et/ou réintégrées dans leurs fonctions. Ôter les crimes économiques de la compétence de l’IVD c’est l’asphyxier. Il faut au moins sauver l’aspect «vérité», plus important que l’aspect «sanctions». Mettre au jour le «comment»: comment la Tunisie en était arrivée là? C’est-à-dire arrivée à un tel stade de corruption, de malversations, de mauvaise gouvernance. L’identification des failles doit permettre d’éviter le retour aux mauvaises pratiques, d’entamer les réformes nécessaires. Mais ceux qui ont procédé au pillage des deniers publics ne veulent pas de ce processus. Et il faut bien constater que le président Essebsi veut empêcher la vérité d’éclater. L’IVD est démunie, elle ne dispose d’aucun levier de manoeuvre, tout le monde est contre elle: la justice, la police, le gouvernement, les médias…

La Tunisie offre la particularité d’être à la fois le pays arabe qui a le moins mal réussi son «printemps» et celui d’où émane la plus grande proportion de djihadistes qui vont en Syrie et ailleurs, comment l’expliquez-vous?

D’abord, les chiffres ne sont pas toujours concordants et ils sont surtout difficiles à vérifier faute de sources indépendantes. En outre, la Tunisie communique de manière transparente sur le nombre de ses ressortissants qui rallient les groupes terroristes contrairement aux autres pays de la région. Ensuite, il faut noter que le départ de djihadistes en Syrie était une politique d’Etat largement financée et presque avouée et cela deux années durant (2012-2013). A l’époque, la Tunisie avait rompu ses relations diplomatiques avec la Syrie et avait organisé le congrès des amis de la Syrie contre le régime Assad. Enfin, la politique d’étranglement et l’efficacité des services de sécurité et de l’armée dans le démantèlement et la lutte contre les cellules terroristes ont progressivement asphyxié les groupes djihadistes en repoussant plusieurs de leurs adeptes en dehors du territoire. Ceux-là rejoignent l’Etat islamiste (Daesh) en Syrie ou en Irak et surtout en Libye mais toujours avec l’espoir de revenir en conquérants.

Deux attentats sanglants -le Bardo et Soussse, sans parler des maquis à l’ouest- ont montré que les djihadistes tunisiens sévissent d’ailleurs déjà sur le sol national et peuvent être très  percutants. Quelle part de responsabilité estimez-vous portée par les autorités depuis 2011? 

Une responsabilité extrêmement lourde car pour la période qui a précédé les élections de 2014 le fondamentalisme a été instrumentalisé, les islamistes au pouvoir à l’époque étaient tentés en quelque sorte de faire chanter la société en brandissant la menace d’islam radical et terroriste qui contraste avec un islam modéré qu’ils prétendent, eux, incarner. Le laxisme et le laisser-faire qui en ont découlé ont permis aux terroristes de s’implanter et de mettre en place l’infrastructure de la terreur (recrutement, armement, financement…). Cela dit, il faut peut-être commencer par dénoncer toute forme d’instrumentalisation de la terreur, y compris le chantage sécuritaire qui consiste aujourd’hui à s’appuyer sur le terrorisme pour amener la population à renoncer à sa liberté.

Propos recueillis à Bruxelles par Baudouin Loos

 

PS Jaouhar Ben M’Barek était l’invité le 15 septembre dernier de l’association European Endowment for Democracy.

Frappes en Syrie : n’oublions pas le boucher de Damas


Par Marc Semo 15 septembre 2015 à 19:56

ÉDITOL’écrasante majorité des 4 millions de réfugiés syriens arrivant en Europe ou entassés dans les camps du Liban, de Jordanie et de Turquie ne fuient pas l’Etat islamique mais Bachar al-Assad. Ils fuient la répression et les tortures en zone gouvernementale ou les bombardements systématiques en zone rebelle. Plus de 80 % des 240 000 personnes tuées lors de ce conflit l’ont été par les soudards du régime. C’est une réalité que l’on ne peut oublier alors que le Parlement français débat de l’intervention aérienne en Syrie contre l’EI. Ces jihadistes, à la différence du boucher de Damas, représentent certes une menace directe pour la France. Jusqu’ici, pourtant, Paris s’était refusé à effectuer dans ce pays des frappes semblables à celle menées depuis déjà un an en Irak aux côtés des Américains et des Britanniques, malgré l’évidente interpénétration de ces deux théâtres d’opération. Il s’agit donc d’une volte-face.

Intervenir dans l’espace aérien syrien, protégé par un système sophistiqué de défense installé par les Russes, implique en effet un accord implicite du régime et une coordination au moins indirecte. Les Américains jouent ce jeu depuis un an. La France le refusait au motif que cette coopération ne peut que renforcer ce dictateur qui a délibérément attisé le développement de l’Etat islamique pour en faire un repoussoir et qui n’a pas hésité à utiliser l’arme chimique contre son propre peuple. La priorité était le renversement de «cet homme qui ne devrait pas avoir sa place sur Terre», comme le martelait Laurent Fabius à l’été 2011. Cette stratégie a été un échec. Toute une partie de la droite, mais pas seulement, clame aujourd’hui qu’il faut choisir le moindre mal, comme lors de la Seconde Guerre mondiale en s’alliant avec Staline contre Hitler. Pour Washington comme pour Londres, la priorité est désormais la lutte contre l’EI, le départ du pouvoir d’Al-Assad pouvant être l’aboutissement d’un processus de transition négocié y compris avec la Russie, voire l’Iran.

Hollande a pris acte de la nouvelle donne. Lors de sa conférence de presse de rentrée, il rappelait que l’indispensable neutralisation d’Al-Assad aurait lieu «à un moment ou un autre» de la transition. L’implication dans les opérations aériennes en Syrie permettra à Paris d’avoir accès aux informations dont disposent les Américains. Les frappes aériennes tricolores, pourtant, ne changeront pas grand-chose. Elles seront limitées faute de moyens : en un an, l’aviation française a mené en Irak 200 frappes, contre 6 500 pour l’US Force. Le choix de Barack Obama d’une guerre aérienne dans le but «d’affaiblir puis détruire» l’EI montre ses limites. Les forces locales – combattants kurdes ou armée syrienne libre – ne suffisent pas. D’aucuns évoquent une nécessaire intervention au sol, récusée par l’Elysée car «irréaliste et inconséquente». Le vrai défi reste de définir une stratégie qui permette à la fois de combattre l’EI et le régime assassin que fuient par millions les Syriens.

Ilan Pappé: Les 10 mythes d’Israël


nettoyagepappeLes 10 mythes d’Israël
Ilan Pappé, CJPMO, novembre 2012Toute tentative de résoudre un conflit doit s’attaquer aux racines de celui-ci, et les racines d’un conflit se trouvent généralement dans son histoire. La distorsion et la manipulation des faits historiques expliquent très souvent l’incapacité de le résoudre. À l’inverse, une approche plus exhaustive et véridique du passé permettra de trouver une solution et d’accéder plus facilement à une paix durable. Une histoire déformée peut en fait faire plus de tort, comme le démontre le cas du conflit israélo-palestinien : elle peut justifier l’oppression, la colonisation, et l’occupation.L’acceptation généralisée de l’histoire du sionisme est fondée sur un ensemble de mythes qui mettent en doute le droit moral des Palestiniens, remettent en cause la nécessité d’adopter un comportement éthique, et compromettent les chances d’en arriver à une paix juste dans l’avenir. Ces mythes sont largement répandus car ils sont relayés par nos médias de masse occidentaux et par nos élites politiques qui, après les avoir érigés en vérité, s’en servent pour justifier pas tant la politique israélienne, comme plutôt l’ingérence de l’Occident dans cette région du monde. Voici les dix mythes les plus répandus qui, sous le couvert de l’immunité, ont justifié l’impunité et les actes inhumains commis en Palestine.

1 Premier mythe : La Palestine était une terre sans peuple, prête à accueillir un peuple sans terre.

Le premier mythe est de nous faire croire que la Palestine était une terre inhabitée, prête à accueillir un peuple sans terre. Plusieurs historiens très compétents ont déjà démontré que c’était faux. Ils ont en effet démontré qu’avant même l’arrivée des premiers sionistes, la Palestine était une société prospère, surtout rurale, mais dotée d’un centre urbain particulièrement dynamique. Comme la plupart des pays arabes environnants, la Palestine était sous la domination de l’Empire ottoman. Mais l’émergence du mouvement nationaliste naissant aurait tôt fait de transformer la Palestine en État-nation comme ce fut le cas pour l’Iraq et la Syrie, si cela n’avait été de l’arrivée des sionistes.

La seconde partie de ce mythe est tout aussi douteuse, mais moins importante. De nombreux intellectuels, notamment israéliens, ont remis en doute l’existence d’un lien génétique entre les colons sionistes et les juifs qui vivaient en Palestine à l’époque romaine avant d’être exilés. Il ne faut pas accorder trop d’importance à ce détail, car quoi qu’il en soit, de nombreux mouvements nationalistes créent de toutes pièces la genèse de leur histoire et la situent dans un passé très lointain. Ce qui compte vraiment, c’est de savoir ce qu’on fait au nom de cette histoire : sert-elle à justifier la colonisation, l’expulsion et les tueries ou est-elle le point de départ de la paix et de la réconciliation? Peu importe que cela soit vrai ou faux, si en définitive elle ne sert qu’à justifier le fait de coloniser, de déposséder et même dans certains cas de procéder au génocide d’une population autochtone tout entière.

2 Deuxième mythe : Les Palestiniens ont réagi à l’arrivée des premiers colons juifs par une campagne de terreur, avant même la création de l’État d’Israël

Le deuxième mythe fondateur consistait à nous faire croire que la population palestinienne a réagi à l’arrivée des premiers colons par une campagne de terreur antisémite jusqu’à la création de l’État d’Israël. Comme le démontrent les journaux intimes des premiers sionistes, ils ont au contraire été très bien accueillis par les Palestiniens, qui leur ont offert le gîte et leur ont appris à cultiver leurs terres. Ce n’est que lorsqu’il est devenu évident que ces colons étaient venus remplacer la population autochtone et non cohabiter avec elle que la résistance palestinienne a commencé, résistance qui n’était du reste pas différente des autres luttes anticolonialistes.

3 Troisième mythe : Les mensonges entourant la création de l’État d’Israël

Le troisième mythe est en fait une série d’histoires à dormir debout au sujet de la guerre de 1948. Elles sont au nombre de quatre.

3.1 Les Palestiniens ne peuvent s’en prendre qu’à eux même pour tout ce qui leur arrive, car ils ont rejeté le plan de partage de l’ONU de 1947

La première consiste à dire que les Palestiniens ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes pour ce qui leur est arrivé en raison de leur refus du plan de partage de l’ONU en novembre 1947. Cette allégation passe sous silence la nature colonialiste du mouvement sioniste. Il aurait été très improbable, par exemple, que les Algériens acceptent de céder la moitié du pays aux colons français. Un tel refus ne serait pas qualifié d’irraisonnable ou d’irrationnel. Ce qui est parfaitement clair, c’est qu’une telle objection de la part d’un autre pays arabe n’aurait pas justifié le nettoyage ethnique dont sont victimes les Palestiniens comme « punition » lorsqu’ils acceptent ou rejettent un plan de paix de l’ONU mis au point sans qu’ils soient consultés.

3.2 Les Palestiniens ont évacué leurs maisons suite à un appel de leurs dirigeants

Certains ont même suggéré que les Palestiniens auraient volontairement abandonné leurs maisons, en réponse à l’appel des dirigeants arabes qui leur auraient supposément demandé de laisser la voie libre aux armées venues libérer leurs terres. Il s’agit en fait d’une invention du ministre des Affaires étrangères israélien de l’époque (début des années 50). Un peu plus tard, de nombreux historiens israéliens ont modifié cette histoire, et soutenu que les Palestiniens sont partis afin de fuir la guerre. La vérité, c’est que la moitié des Palestiniens devenus réfugiés en 1948 ont été expulsés avant même que la guerre ne débute, le 15 mai 1948.

3.3 Israël était un David qui combattait le Goliath arabe

Les études ont démontré que les Palestiniens ne disposaient d’aucune force militaire. Elles ont également démontré que les troupes envoyées par les pays arabes étaient inférieures en nombre, moins bien équipées et moins bien entraînées que les troupes israéliennes. De plus, il est encore plus important de noter que les troupes arabes ont été envoyées en Palestine après le 15 mai 1948, date de création de l’État d’Israël. Elles agissaient en réaction au nettoyage ethnique entrepris par les troupes sionistes à partir de février 1948.

3.4 Après la guerre qui a mené à sa création, Israël a tendu la main aux Palestiniens et à ses voisins arabes.

Pour ce qui de la main tendue d’Israël, les documents de l’époque montrent clairement que les dirigeants israéliens étaient particulièrement intransigeants et refusaient catégoriquement d’engager des discussions au sujet de l’avenir de la Palestine postmandat ou du droit de retour des réfugiés qui avaient fui la guerre. Alors les gouvernements arabes et les Palestiniens étaient désireux de participer à un nouveau processus de paix de l’ONU plus raisonnable, les Israéliens ont assassiné l’envoyé des Nations unies, le Comte Bernadotte, et rejetés la proposition de la Commission de conciliation des Nations unies pour la Palestine (PCC) de rouvrir les négociations. Comme l’a illustré Avi Shlaim dans son livre The Iron Wall, contrairement à l’idée répandue selon laquelle les Palestiniens auraient raté toutes les occasions de faire la paix, ce sont en fait les Israéliens qui ont systématiquement rejeté toutes les offres déposées sur la table des négociations.

4 Quatrième mythe : Avant 1967, Israël était un état bienveillant et démocratique

La quatrième idée reçue, c’est qu’Israël est un état démocratique et bienveillant, qui cherchait à faire la paix avec ses voisins et dont les citoyens étaient tous égaux, jusqu’à la guerre de juin 1967. C’est un mythe qui a malheureusement été relayé par un certain nombre d’intellectuels palestiniens et pro-palestiniens reconnus, mais qui n’a en fait aucun fondement historique. Un cinquième des citoyens israéliens tombait sous le coup d’une loi martiale impitoyable, fondée sur les principes de l’état d’urgence du mandat britannique, et qui niait leurs droits les plus élémentaires. Durant cette période, plus de cinquante citoyens palestiniens ont été tués par les forces de sécurité israéliennes. Parallèlement, Israël poursuit sa politique agressive à l’endroit des pays arabes voisins, en les attaquant pour avoir osé aider les réfugiées à revenir ou à récupérer les biens et les troupeaux qu’ils avaient perdus. C’est sans compter son implication aux côtés des Français et des Britanniques lors de la tentative de renversement du gouvernement légitime de Gamal Abdul Nasser en Égypte.

5 Cinquième mythe : Le seul objectif du combat mené par les Palestiniens est de semer la terreur

Le cinquième mythe consiste à nous faire croire que la lutte palestinienne n’est en fait rien d’autre que du terrorisme. Le combat mené par l’OLP était en fait une guerre de libération, opposée à un projet colonial. Apparemment, il devient difficile d’accorder une légitimité à une lutte anticoloniale quand l’oppresseur est juif, et l’oppressé (majoritairement) musulman.

6 Sixième mythe : Israël s’est vu obliger d’occuper la Cisjordanie et la bande de Gaza en 1967 et de garder ces territoires jusqu’à ce que les Palestiniens soient disposés à faire la paix.

Le sixième mythe: Israël a été forcé d’occuper et de garder la Cisjordanie et la bande de Gaza jusqu’à ce que les Palestiniens et le monde arabe acceptent de faire la paix avec l’État hébreu. L’élite politique et militaire israélienne considère la guerre de 1948 comme une occasion manquée : il s’agissait d’une occasion unique d’occuper toute la Palestine historique (du Jourdain jusqu’à la mer Méditerranée). La seule chose qui les en a empêchés était l’accord tacite avec le Royaume hachémite de Jordanie qui prévoyait que ce dernier limiterait sa participation à l’effort de guerre arabe en échange d’une annexion de la Cisjordanie. Depuis 1948, cette élite israélienne cherchait une occasion de se reprendre et a commencé vers le milieu des années 60 à se donner les moyens de ses ambitions.

La conjoncture historique leur a fourni plusieurs occasions d’exécuter leur plan, mais ils ont souvent reculé au tout dernier moment. En 1958 et 1960 par exemple, le premier ministre israélien David Ben-Gourion a interrompu au dernier moment le plan d’expansion par crainte de la réaction internationale, et à cause du problème démographique qui se poserait inévitablement (il pensait qu’Israël ne serait pas en mesure d’assimiler un nombre aussi important de Palestiniens). La meilleure occasion se présenta en 1967 : bien que les Israéliens prétendaient ne pas vouloir entrer en guerre avec la Jordanie, mais y être contraints après l’attaque de cette dernière, les Israéliens n’étaient absolument pas obligés d’occuper la Cisjordanie, surtout qu’il ne s’agissait que d’une escarmouche de plus entre les deux pays. Annexer la Cisjordanie et la bande de Gaza faisait partie des plans d’Israël depuis 1948, et 1967 fut l’occasion de mettre ce plan à exécution.

7 Septième mythe : Israël avait l’intention d’occuper pacifiquement la Palestine, mais a été forcé de répondre à la violence des Palestiniens.

Le septième mythe: Israël avait l’intention d’occuper pacifiquement la Palestine, mais a été forcé d’adopter une position plus dure à cause des actes de violence des Palestiniens. Depuis le début de l’occupation, tout acte de résistance, qu’il soit pacifique ou violent, a été considéré comme du terrorisme et brutalement réprimé en punissant collectivement la population.

En fait, les Palestiniens ont dû choisir entre: 1)accepter de vivre dans une prison à ciel ouvert israélienne avec une autonomie très limitée, et servir de main-d’œuvre bon marché dénuée de droit, ou 2) résister ne serait-ce que modérément et finir dans une prison à sécurité maximale en étant exposé à des punitions collectives telles que les démolitions de maisons, les détentions sans procès, les expulsions, et trop souvent, les assassinats et les meurtres.

Le principal changement que les Palestiniens ont dû accepter – ou la punition qu’ils ont dû supporter – était qu’Israël déciderait de manière unilatérale quelle partie de la Cisjordanie et de la bande de Gaza il leur enlèverait et annexerait. En fin de compte, plus de la moitié de la Cisjordanie a été annexée d’une façon ou d’une autre, tandis que la bande de Gaza deviendra éventuellement une région sur laquelle Israël exercera un contrôle direct.

Ce mythe a été entretenu en partie par l’allégation selon laquelle les sionistes libéraux aux États-Unis, et en Israël, partageaient avec le reste des forces politiques israéliennes la même opinion au sujet de la lutte menée par l’OLP, à savoir que l’OLP – à l’intérieur et à l’extérieur de la Palestine – semait la terreur pour la terreur. Malheureusement, cette diabolisation est encore très présente dans les pays occidentaux, et s’est accentuée après 2001 en tentant de faire l’amalgame entre l’Islam, le terrorisme et la Palestine. L’OLP a en fait été reconnue comme le seul représentant légitime du people palestinien par un plus grand nombre d’États que ceux qui ont reconnu Israël. Il importe de souligner que cette diabolisation s’est poursuivie même après les Accords d’Oslo de 1993 en vertu desquels Israël a prétendument reconnu cette organisation comme un partenaire légitime. Même l’Autorité palestinienne est encore décrite de nos jours par Israël comme une marionnette qui encourage la terreur. La pire forme de diabolisation, qui a convaincu l’Occident de recourir au boycottage politique, était dirigée contre le Hamas. Alors que les sociétés civiles à l’échelle mondiale contestent cette diabolisation, les médias de masse et les politiciens, eux, tombent encore dans le piège.

8 Huitième mythe : Les Accords d’Oslo sont le reflet d’une volonté de paix des deux parties.

Le huitième mythe est de croire que les Accords d’Oslo étaient un processus de paix né du désir de chacune des parties de trouver une solution au conflit. Le projet de partage de la Palestine qui remonte aux années 1930 était en fait un concept sioniste que les Palestiniens ont rejeté jusqu’à la fin des années 1980. Entre-temps, la portion des terres que les Israéliens étaient disposés à leur céder est passée de 50 % à 15 %. La volonté d’appeler cette parcelle de terre un État ne peut pas masquer le fait que le processus d’Oslo, conçu uniquement par les Israéliens, n’offrait aux Palestiniens qu’un « bantoustan » fragmenté, et reléguait aux oubliettes le « droit de retour » des réfugiés palestiniens ou toute autre solution à ce problème.

Les Accords d’Oslo sont le résultat d’une combinaison de facteurs qui a miné le pouvoir de l’OLP et de son dirigeant, Yasser Arafat, à tel point que, contre l’avis de ses meilleurs amis, il a adhéré au processus d’Oslo dans l’espoir d’obtenir une indépendance même partielle de la Palestine. Cela s’est soldé par la destruction quasi totale de la Palestine et des Palestiniens.

9 Neuvième mythe : La deuxième Intifada était une campagne de terreur orchestrée par Arafat.

Le neuvième mythe était que la seconde Intifada était une attaque terroriste d’envergure parrainée et, dans une certaine mesure, planifiée par Arafat. Il s’agissait, en fait, d’une manifestation de masse démontrant l’insatisfaction éprouvée à l’égard des Accords d’Oslo perçus comme une trahison et exacerbée par les mesures de provocation adoptées par Ariel Sharon et son entourage au sujet des lieux saints de l’Islam en Palestine. Cette protestation non violente a été brutalement réprimée par Israël et a donné lieu à une réaction encore plus désespérée – la multiplication des attentats-suicides comme dernier recours face à la puissance militaire la plus importante de la région. Il existe des preuves flagrantes de la façon dont les rapports des correspondants des journaux israéliens, qui ont couvert les premiers stades de l’Intifada – laquelle a été qualifiée de mouvement non violent qui a été violemment réprimé – ont été mis de côté par les rédacteurs en chef afin de se conformer à la version du gouvernement.

La version voulant que les Palestiniens aient fait avorter le processus de paix par la force et réaffirmant par le fait même qu’Israël n’a jamais raté une occasion de conclure un accord de paix, contrairement à l’idée répandue selon laquelle les Palestiniens auraient raté toutes les occasions de faire la paix, mais qu’il n’y avait personne avec qui négocier du côté palestinien est particulièrement cynique. Le gouvernement israélien et l’armée ont tenté d’imposer par la force leur propre version des Accords d’Oslo – soit perpétuer l’occupation pour toujours, mais avec le consentement des Palestiniens – et Arafat, même s’il était affaibli, ne pouvait pas l’accepter. Arafat et d’autres dirigeants qui auraient pu favoriser la réconciliation de leurs peuples ont été ciblés par les Israéliens; la plupart d’entre eux, et probablement Arafat lui-même, ont été assassinés.

10 Dixième mythe : Le règlement du conflit israélo-palestinien est proche.

Le dixième et dernier mythe est que la solution pour Israël et la Palestine est à portée de la main : la solution à deux États s’imposera d’elle-même et le problème sera presque résolu. Cette solution n’est définitivement pas sur cette terre, elle se trouve peut-être quelque part dans l’univers. La réalité sur le terrain qui consiste en une colonisation massive et en une annexion directe d’une grande partie de la Cisjordanie par Israël fera en sorte que tout État sera réduit à n’être qu’un misérable « bantoustan ». Si un accord devait être conclu à cet effet, cet état ne disposerait pas d’une souveraineté qui lui est propre. Pire encore, la Palestine ne correspondrait qu’à 20 % du territoire qu’elle devrait occuper, et le peuple palestinien ne se limiterait qu’aux gens vivant actuellement en Cisjordanie (il semble que la bande de Gaza soit exclue de toute discussion ultérieure et qu’une bonne partie de Jérusalem ne fera pas partie non plus de l’État envisagé).

La solution à « deux États », comme nous l’avons évoqué auparavant, est une invention israélienne destinée à lui permettre de réaliser la quadrature du cercle – ou comment inclure la Cisjordanie sous contrôle israélien sans incorporer la population qui y vit. On a suggéré ainsi qu’une partie de la Cisjordanie pourrait être autonome, et même devenir un « État », à condition que les Palestiniens abandonnent tout espoir de retour des réfugiés, qu’ils renoncent à l’égalité des droits pour les Palestiniens qui vivent en Israël, abandonnent Jérusalem à son sort et oublient à tout jamais l’idée de mener une vie normale en tant qu’êtres humains sur leur terre natale.

Toute critique de cette mythologie est aussitôt qualifiée d’antisémite. En fait, cette politique et cette mythologie expliquent pourquoi l’antisémitisme est encore vivant. Israël réitère que ce qu’il fait, il le fait au nom du judaïsme – soit l’association dans les esprits les plus retors entre la colonisation sioniste et la religion juive. Cette association doit être rejetée au nom du judaïsme.

Au des valeurs universelles, le droit de toute personne qui vit dans cette partie du monde (ou qui en a été expulsé) doit être respecté. Israéliens et Palestiniens devraient vivre ensemble sur un pied d’égalité, et ce devrait être le principal objectif à l’ordre du jour pour la paix et la réconciliation dans la région.

Source: CJPMO , Original en anglais: CJPME

Comment aider les Réfugiés?


Chers amis,

De nombreuses personnes arrivent actuellement en Belgique en quête de protection, fuyant la guerre, la violence et les persécutions. Les places d’accueil se remplissent rapidement, et les autorités essayent de s’adapter à ces circonstances nouvelles. Par ailleurs, l’origine de ces personnes expliquent qu’une majorité d’entre elles sont reconnues rapidement comme Réfugiés et invitées dès lors à quitter les centres d’accueil pour s’installer par elles-mêmes et commencer une nouvelle vie parmi nous. Au-delà de l’accueil des demandeurs d’asile dont il est beaucoup question aujourd’hui, cette évolution implique donc un véritable défi pour notre association et l’ensemble de la société, afin de les aider à trouver une place pleine et entière à nos côtés, afin aussi d’informer tout un chacun et d’aider à la compréhension mutuelle et à un vivre ensemble de qualité dans la différence.

Ces derniers jours, nous avons reçu beaucoup de demandes de sympathisants et de citoyens qui souhaitent apporter leur aide aux demandeurs d’asile et Réfugiés. Voici donc quelques pistes pour vous y retrouver, autant de précisions sur ce que vous pouvez faire avec nous, Convivial, et ce que vous pouvez faire avec d’autres associations impliquées.

Vous trouverez par ailleurs quelques propositions/rendez-vous à notre agenda.

Je vous remercie pour votre soutien chaleureux en cette période où se dessine peut-être un nouvel élan Européen et Belge, politique et de société, autour de la solidarité et du vivre ensemble !

                                                               Bruno GILAIN, Directeur

Rappel préliminaire

Les demandeurs d’asile en phase d’accueil/en procédure sont en principe hébergés dans un centre d’accueil ou une structure individuelle gérée par Fedasil ou un partenaire de Fedasil. Par manque de places d’accueil, certaines personnes sont cependant à la rue…
Si vous souhaitez soutenir des demandeurs d’asile à ce niveau, nous vous invitons à contacter le CIRE ou VWV, coupoles francophone et néerlandophone des associations actives auprès des demandeurs d’asile et partenaires de Fedasil ou directement Caritas qui gère et recherche dans ce cadre des logements pour l’accueil de demandeurs d’asile.

Le Mouvement Convivial accompagne les Réfugiés qui ont reçu un droit de séjour et qui sont dès lors invités à quitter rapidement les centres d’accueil (pour libérer leur place pour d’autres demandeurs d’asile) et s’installer durablement sur le territoire belge. La tâche n’est pas aisée pour eux : trouver un logement, financer la garantie locative, meubler son appartement, effectuer les démarches administratives auprès des communes, CPAS, mutuelles, … Notre association accompagne les Réfugiés pour effectuer leurs premiers pas pour s’installer et les aide à s’orienter dans leur nouvel environnement de vie.

Comment aider les Réfugiés?

Le logement: Un des premiers besoins à rencontrer est un logement décent à un prix abordable. Vous pouvezlouer un logement à un Réfugié ! Notre antenne Logement prendra contact avec vous et sera l’intermédiaire entre vous et le Réfugié pour finaliser le contrat de bail. Nous cherchons en priorité des logements à Bruxelles, dans des villes ou des endroits aisément accessibles par transports en commun. Nous pouvons également vous aider à confier votre bien à une AIS partenaire qui prendra en charge l’entièreté de la gestion locative contre une réduction de loyer.
>> Contact: logement@convivial.be
>> Visionnez la vidéo sur les propriétaires malins

Les dons de biens matériels: nous sommes submergés par les dons en vêtements, merci de ne plus en apporter pour le moment! Par contre, nous récoltons des meubles, des lits, matelas, draps, couvertures et couettes, vaisselle et ustensiles de cuisine en bon état qui sont offerts aux Réfugiés qui s’installent. Nous sommes ouverts de 9h00 à 12h30 et de 13h à 17h du lundi au jeudi et le vendredi de 9h00 à 12h00 pour les y déposer. Pour les dons de meubles importants, vous pouvez nous contacter pour un enlèvement par notre camionnette en Région Bruxelloise.
>> En savoir plus

L’aide financière ciblée: nous offrons un système de prêt sans intérêt pour les garanties locatives et/ou les premiers mois de loyer des Réfugiés qui s’installent. Ce fonds de prêt est fortement sollicité vu l’absence de ressources financières des Réfugiés lors de leur recherche de premier logement et cela permet de convaincre les propriétaires d’accepter de louer leur bien. Ces prêts sont remboursés dans l’année, ce qui réalimente le fonds pour faciliter d’autres logements. Vous pouvez contribuer à accroître ce fonds de prêt au logement.
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Le soutien volontaire à nos équipes: nos diverses équipes de travail social sur le terrain incluent des personnes volontaires apportant leur expérience et compétence à un accueil et un accompagnement de qualité aux Réfugiés. Si vous parlez une des langues des principales régions d’origine des Réfugiés (Syrie, Irak, Afghanistan, Guinée…) et/ou avez une expérience dans le travail social avec les migrants, n’hésitez pas à nous contacter !
>> Contact: grh@convivial.be

Mieux comprendre la réalité des Réfugiés: si vous êtes intéressés à découvrir et mieux comprendre la situation des Réfugiés à travers le monde, le parcours des Réfugiés en Belgique et notre action sur le terrain, nous vous proposons de participer à une séance de sensibilisation organisée régulièrement à Convivial. Prochaine date : 12 octobre de 9h à 12h30.
>> En savoir plus

Aider une famille de manière spécifique?

Vous souhaiteriez apporter votre aide à une famille ou un demandeur d’asile/Réfugié de manière spécifique ? Nous ne sommes pas en mesure de vous proposer cela directement à Convivial, pour des raisons de moyens, de responsabilité et parce que nous ne pouvons pas offrir ce type de soutien personnalisé à l’ensemble de notre public.

Ceci dit, nous sommes convaincus de la valeur que représente pour un Réfugié un contact privilégié et bienveillant avec quelqu’un connaissant bien la Belgique, prêt à donner un peu de temps et d’attention. En dehors d’une démarche directe vers des demandeurs d’asile à la rue et des lieux d’accueil de crise (voir via CIRE etVluchtelingenwerkVlaanderen), il existe une variété de lieux travaillant avec les Réfugiés dans la durée dont la fréquentation peut conduire à ce type de relations.

Les sensibilisations à la réalité des Réfugiés à Convivial offrent ainsi une première manière de s’informer. Nous organisons de même mensuellement des « rencontres croisées » entre Belges et Réfugiés autour de midi thématiques et autres sorties culturelles, destinées précisément à favoriser l’échange et la rencontre de manière relativement informelle. La prochaine aura lieu le 1er décembre (voir agenda ci-dessous).

Vous pouvez également contacter la plateforme citoyenne d’aide aux réfugiés.