Mendier n’est pas un crime et pourtant les malheureux qui croupissent sur nos trottoirs et dans les couloirs du métro n’ont pas la cote, c’est le moins qu’on puisse dire ! Le temps où, grâce à Coluche et à ses restos du cœur notamment, la charité était devenue ‘trendy’ est bien révolu. Les règlements anti-mendicité fleurissent partout, que ce soit dans les transports bruxellois, dans certains quartiers de Liège ou ailleurs.
L’année dernière, on a même mis hors la loi les mendiants à Assise ! Le bon saint-François, fondateur des moines mendiants, a dû se retourner dans sa tombe… Pour le moment, on en est aux « vous ne pouvez pas rester ici » ou aux « vous êtes obligé de quitter cet endroit » parfois suivis de « si tu ne dégages pas, on t’embarque ! ». Mais on sent venir le kärcher urbain et pointer le retour des rafles et des mandats de dépôt comme au temps du vagabondage hors la loi. A moins qu’avant cela, un chercheur tordu n’atteigne son heure de gloire en trouvant un répulsif qui éloigne à la fois les pauvres et les chiens ou un diffuseur d’ultra-sons insupportables seulement pour les gens assis à même le sol ou appuyés contre un mur…
Un poncif éculé sert d’excuse à ceux qui font la chasse aux mendiants : c’est la traque aux bandes organisées et la lutte contre la traite des êtres humains. Certes, il serait naïf de croire que les Oliver Twist ou les Cosette, d’une part, et les Fagin ou les Thénardier, d’autre part, ont disparu. Il doit même encore exister des « cours des miracles » où, jadis, les mendiants parisiens se débarrassaient le soir de leurs fausses infirmités de la journée. Mais soyons lucides : l’alibi de l’éradication des faux mendiants – dont tout le monde connait quelqu’un qui connait quelqu’un qui les a vu débarquer de belles limousines – a de forts relents xénophobes : comme par hasard, les « bandes » à qui on veut damer le pion sont, à 99 % ou presque, d’origine rom, tzigane ou manouche.
